La jurisprudence CZABAJ, très utilisée, consiste à poser qu’un acte administratif individuel non notifié ou mal notifié […]

Aux termes de l’arrêt d’Assemblée du Conseil d’État Ternon (26 octobre 2001, n°197018), « l’administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de décision ».

Mais un vice de procédure (et, par extension, de forme) peut parfois ne pas entraîner l’illégalité d’un acte. En ce domaine, les juristes jargonnent désormais en s’interrogeant, au cas par cas, sur le point de savoir si tel ou tel vice est, ou n’est pas, « danthonysable » :

« si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie » (CE Ass., 23 décembre 2011, Danthony, n°335033, publié au Rec. p. 649 ; GAJA 21e éd. n°112).

Il en résulte une grille de lecture simple. Un vice de procédure n’entraîne l’illégalité d’une décision que :

  • soit s’il a privé les intéressés d’une garantie
  • soit s’il a été susceptible d’influencer le sens de la décision…

Or, par une décision à publier aux tables du rec., le Conseil d’Etat a eu à concilier Ternon et Danthony.

La jurisprudence CZABAJ, très utilisée, consiste à poser qu’un acte administratif individuel non notifié ou mal notifié (en […]

Czabaj… c’est l’histoire d’un produit que le Conseil d’Etat a concocté tout seul dans son coin alors que, […]

Nouvelle diffusion 2 mois après les 2 arrêts de la Cour de cassation 

A la base, un texte de la partie réglementaire du Code de justice administrative posait que faute de notification en bonne et due forme des voies et délais de recours, pour les actes individuels, c’était sans condition de délai que pouvait agir un requérant. 

Quelques textes législatifs vont aussi dans ce sens, mais sans être aussi clairs, loin s’en faut.

Plutôt que de demander au pouvoir réglementaire de modifier ce texte (le bonheur juridique pouvant être aussi simple qu’un coup de fil…), il a plu au Conseil d’Etat de se simplifier la tâche en posant que cette règle devait être contre-balancée par un principe de sécurité juridique (principe en grande forme depuis plus de dix ans) conduisant donc à ce fameux délai indicatif d’un an au delà duquel le requérant ne peut plus agir. 

Ainsi les actes individuels non notifiés ou mal notifiés ne peuvent-il plus être attaqués indéfiniment (un délai — indicatif — d’un an pour engager un recours étant alors appliqué par le juge mais avec des modulations au cas par cas). 

C’est cela, la jurisprudence Czabaj de 2016, avec sa riche postérité contentieuse. 

Puis voici qu’on découvre que ce produit inventé sur-mesure s’exporte mal. Très mal. La CEDH a censuré, non son principe, mais l’immédiateté de son application. La Cour de cassation a refusé ce principe. Conduisant à une situation complexe.

Voyons ceci avec une courte vidéo (4 mn) et un article détaillé. 

A la base, un texte de la partie réglementaire du Code de justice administrative posait que faute de […]

Nouvelle diffusion en raison de l’ajout d’une vidéo très courte (4 mn) en complément de cet article qui, […]

Le Conseil d’Etat vient de poser que le délai raisonnable d’un an, de recours, au-delà duquel il est impossible d’exercer un recours juridictionnel est opposable aux recours dirigés contre les décisions d’espèce, à savoir les décisions « non réglementaires qui ne présentent pas le caractère de décisions individuelles ». 

Mais la Haute Assemblée a prévu que cette règle de l’arrêt CZABAJ (délai de recours indicatif d’un an lorsqu’il y a eu vice dans les modes de notification des voies et/ou délais de recours contre cet acte, donc) s’applique « lorsque la contestation émane des destinataires de ces décisions à l’égard desquels une notification est requise pour déclencher le délai de recours. »

Cette décision portant en l’espèce sur une question de transfert dans le domaine public communal, sera publiée en intégral au Recueil Lebon. Le Conseil d’Etat, en sus, y précise le contrôle (limité) exercé par le juge de cassation sur l’appréciation, par le juge du fond, des modulations à apporter, ou non, à ce délai indicatif d’un an. 

Détaillons cette importante et nouvelle évolution du principe de sécurité juridique, au détriment du principe de légalité. 

Sauf justification précise, sauf cadre légal le permettant (subventions par exemple) ou contrepartie d’intérêt général (via divers cadres juridiques précis), une personne morale de droit public ne peut jamais faire de cadeau.

Et ce n’est pas nouveau. 

Mais ce qui est nouveau, c’est que le Conseil d’Etat, par un arrêt d’une grande clarté, en repose le principe, l’applique aux BEA, plus précisément l’applique aux clauses de renonciation à acquérir les construction de l’emphytéote… et plus encore que la Haute Assemblée se penche aussi sur les éléments de valorisation à prendre en compte en ces domaines. 

Ajoutons y une information complémentaire sur les notes explicatives de synthèse adressées aux conseillers municipaux qui confirme le raidissement de la jurisprudence, ces temps-ci, en ce domaine… 

 

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Le nouvel arrêt en date du 13 septembre 2021, rendu par le Conseil d’Etat, porte sur une délibération par laquelle une commune cède avant terme un terrain donné à bail emphytéotique, alors que celui-ci avait prévu à son expiration la reprise gratuite des constructions de l’emphytéote. 

L’affaire remontait à loin puisqu’elle porte sur un bail emphytéotique, conclu entre la commune de Dourdan et la société Dourdan Vacances, pour une durée de 60 ans à compter de… 1962.

Ce bail emphytéotique avait emporté la mise à disposition par une commune d’un ensemble de terrains en vue de la construction et de l’exploitation d’un village de vacances, stipulant qu’à son expiration, la commune acquerrait la propriété des constructions édifiées par l’emphytéote sans avoir à lui verser d’indemnité.

Mais la cession du bien à la société, par la commune, a fini par être opéré de manière anticipée en 2010, faisant naître un contentieux à plusieurs rebonds. Cette délibération du conseil municipal de 2010, attaquée et annulée par ce nouvel arrêt du Conseil d’Etat, approuvait la vente des terrains à l’emphytéote à une date antérieure à l’expiration du bail, ce qui revenait pour la commune à renoncer à l’acquisition de ces constructions…. et ce alors que la vente du bien était opérée pour un prix symbolique d’un million d’euros.

Cette délibération a donc été censurée, conduisant aux apports juridiques suivants :

  • I. Confirmation : pas de cadeau injustifié… Donc un rabais n’est pas illégal dans son principe, mais il doit être fondé sur des « motifs d’intérêt général et comporte(r) des contreparties suffisantes.»
  • II. Le Conseil d’Etat précise : les éléments de valorisation à prendre en compte ; les motifs d’intérêt général et les contreparties suffisantes dans le cas d’un BEA ; l’application de ces règles au cas des clauses de renonciation à acquérir les construction de l’emphytéote.
  • III. Et encore faut-il entrer dans ces mécanismes assez dans le détail dès la note de synthèse si la commune atteint ou dépasse le seuil de 3 500 habitants… (ou dès le rapport s’il s’agit d’un département ou d’une région…)
  • IV. Voici cette décision