Un élu communautaire ou métropolitain décède ou démissionne. Qui siège à sa place ? MISE À JOUR en raison de la LOI n° 2023-506 du 26 juin 2023

Un élu communautaire ou métropolitain décède ou démissionne. Qui siège à sa place ? La réponse était déjà assez complexe en ce domaine, non sans blocages.

Bonne nouvelle : la loi « Gatel » n° 2023-506 du 26 juin 2023 règle une partie de ces blocages.
Mauvaise nouvelle, le régime
in fine s’avère assez complexe et n’est pas, non plus, exempt, si ce n’est de blocages, à tout le moins d’incertitudes. 

Voyons ceci au fil d’une vidéo et d’un article. 

 

I. VIDEO

 

Voici une vidéo, de 11 mn 40, à ce sujet :

https://youtu.be/JzJYnKveh48

 

II. ARTICLE

 

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I. Ce qui ne change pas

 

I.A. Le cas des communes de moins de 1.000 habitants

En cas de décès ou de démission d’un conseiller communautaire ou métropolitain, si la commune a moins de 1.000 habitants, on va chercher le suivant dans l’ordre du tableau de la commune (art. L. 273-12 du code électoral) sous réserve de possibles démissions en cascade, bien sûr, ou du cas de nouvelle désignation du maire impliquant une nouvelle élection du maire et des adjoints, et donc une refonte du tableau des élus.

I.B. Le cas des communes de 1.000 habitants ou plus

 

Oui…Mais dans les communes de 1.000 habitants et plus, que faire en cas de démission (ou de décès) d’un élu communautaire (ou métropolitain) ?

Réponse : on va chercher le suivant de liste de même sexe dans la liste des élus appelés à siéger à l’EPCI sauf si la commune n’avait qu’un siège de titulaire à l’intercommunalité (auquel cas on prend le ou la suivante de la liste pour siéger à l’EPCI et qui par définition est d’un sexe opposé de l’élu démissionnaire ou décédé) .

Citons cet extrait de l’article L. 273-10 du Code électoral :

« Lorsque le siège d’un conseiller communautaire devient vacant, pour quelque cause que ce soit, il est pourvu par le candidat de même sexe élu conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement suivant sur la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu. Toutefois, lorsque la commune ne dispose que d’un siège de conseiller communautaire, ce siège est pourvu par le candidat supplémentaire mentionné au 1° du I de l’article L. 273-9. »

Oui mais si la commune a deux sièges ou plus à l’EPCI à fiscalité propre MAIS qu’il n’y a plus de suivant de liste de même sexe pour la liste intercommunale appelé à siéger à l’EPCI ? Ou si la commune a un seul siège de titulaire mais plus de suivant de liste (de sexe opposé cette fois) dans la liste intercommunale ?

Réponse : et bien alors on va piocher dans le suivant de liste non élu communautaire ET (si la commune a deux sièges ou plus à l’intercommunalité) de même sexe la liste de ceux qui ont été appelés à siéger au conseil municipal. La suite de l’article L. 273-10 du code électoral est claire sur ce point :

« Lorsqu’il n’y a plus de candidat élu conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement pouvant le remplacer sur la liste des candidats au siège de conseiller communautaire, le siège est pourvu par le premier conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement de même sexe élu sur la liste correspondante des candidats aux sièges de conseiller municipal n’exerçant pas de mandat de conseiller communautaire. Toutefois, lorsque la commune ne dispose que d’un siège de conseiller communautaire, le siège est pourvu par le premier conseiller municipal élu sur la liste correspondante des candidats aux sièges de conseiller municipal n’exerçant pas de mandat de conseiller communautaire

 

Exemples de bulletins de vote dans des communes de 1.000 habitants ou plus, en 2014 (avec une grande variété d’étiquettes politiques)

 

II. Ce qui change avec la loi n° 2023-506 du 26 juin 2023 « tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires »

 

II.A. Le problème antérieurement posé (communes de 1.000 habitants ou plus)

 

Oui mais s’il n’y a plus d’autres élus conseillers municipaux appelés à siéger à l’intercommunalité ? Peut-on par exemple piocher dans les suivants de liste qui ne siègent pas en conseil municipal mais qui pourraient siéger du coup à l’intercommunalité ?

Réponse avant la nouvelle loi : Non. Car alors on applique la fin de ce même article L. 273-10 du code électoral qui parle bien « de conseillers municipaux » (ou d’arrondissement) pour les élus à faire siéger alors à l’EPCI à fiscalité propre, et non des autres suivants de liste :

« Lorsqu’il n’existe pas de conseiller municipal ou de conseiller d’arrondissement pouvant être désigné en application des deux premiers alinéas, le siège de conseiller communautaire reste vacant jusqu’au prochain renouvellement du conseil municipal de la commune.»

Et quid s’il reste un seul suivant de liste élu conseiller municipal… mais qui est du même sexe que l’élu démis, démissionnaire ou décédé ? Idem : on a une situation de blocage.

De tels cas de figure resteront rare cela dit. Il concernent pour l’essentiel des cas de grandes villes ayant beaucoup de sièges par leur population lors de la répartition intercommunale des sièges, mais qui se retrouvent souvent noyées par de très nombreuses communes ayant eu un siège (en sus dans la répartition globale) alors qu’elles avaient un quotient inférieur au poids requis pour avoir un siège dans les calculs des articles L. 5211-6 et suivants du CGCT.

… ou bien des élus minoritaires.

Ce point (à l’exception d’un regrettable oubli pour les communes n’ayant qu’un seul siège…) est retracé dans la réponse ministérielle à une question écrite parlementaire que voici :

 

II.B. La solution apportée par la nouvelle n° 2023-506 du 26 juin 2023 « tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires » (communes de 1.000 habitants ou plus)

 

A été publiée la loi n° 2023-506 du 26 juin 2023 tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires (NOR : TREX2307518L) :

Ce texte provient  de la proposition de loi sénatoriale n° 860 déposée notamment par Mme Françoise Gatel au Sénat :

Le rapport de la commission des lois du Sénat (étant précisé qu’il n’y a eu qu’une seule lecture) fournissait un exemple net d’une des situations qu’il s’agissait, sinon de résoudre, au moins d’éviter :

Citons un extrait de l’exposé des motifs de la proposition de loi :

« Désormais, lorsqu’il apparaît que l’élu démissionnaire ne peut être remplacé par un élu de même sexe, il pourrait être dérogé à la règle de parité en prévoyant le remplacement de l’élu démissionnaire par le premier conseiller municipal élu sur la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu puis, dans un second temps, sur la liste correspondante des candidats aux sièges de conseiller municipal n’exerçant pas de mandat de conseiller communautaire. Il ne pourrait être fait application de ces dispositions qu’au terme de la première année de mandat. Tel est l’objet de la présente proposition de loi.»

Revenons à la Commission des lois du Sénat qui, dans son rapport, présentait ainsi graphiquement cette proposition (ci-dessous en jaune, source Sénat) :

Le texte n’a donné lieu qu’à un amendement de clarification au Sénat, puis à une adoption sans changement à l’Assemblée, pour éviter toute navette inutile.

On notera par exemple la position, de la Ministre Dominique Faure, en plénière au Sénat :

« La proposition faite Mme Gatel, qui consiste seulement, dans le cas résiduel où aucun conseiller de même sexe ne pourrait occuper le siège vacant, à admettre qu’un conseiller de sexe différent l’occupe, me semble en tout état de cause tenir sur la ligne de crête. L’objectif n’est aucunement de revenir sur nos ambitions en matière de parité, mais cette proposition permet de traiter le cas dans lequel l’application des règles en la matière conduit à une impasse institutionnelle et, à la fin, démocratique.
« Vous l’aurez compris, la problématique de la représentation des communes au sein des conseils communautaires est un sujet qui retient toute mon attention. Face à ce problème bien identifié, votre solution, madame la sénatrice Gatel, se détache. Je la soutiens…»

Nous avons donc un texte final et consensuel au titre duquel, après le troisième alinéa de l’article L. 273-10 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au troisième alinéa, au terme de la première année suivant l’installation du conseil municipal de la commune concernée, lorsqu’il n’existe pas de conseiller municipal ou de conseiller d’arrondissement pouvant être désigné en application des deux premiers alinéas, le siège devenu vacant est pourvu par le premier candidat élu conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement suivant sur la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu, sans tenir compte de son sexe. Lorsqu’il n’y a plus de candidat élu conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement pouvant pourvoir le siège sur la liste des candidats au siège de conseiller communautaire, le siège est pourvu par le premier conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement élu sur la liste correspondante des candidats aux sièges de conseiller municipal n’exerçant pas de mandat de conseiller communautaire, sans tenir compte de son sexe. »

Il en résulte le mode d’emploi suivant qui s’applique si plusieurs conditions se trouvent réunies :

  • nous sommes bien dans une commune de 1.000 habitants ou plus
  • nous ne sommes pas dans la première année suivant l’installation du conseil municipal de la commune concernée (année civile ? 12 mois glissants ?)
  • il n’est pas possible d’utiliser le mode d’emploi prévu par les deux premiers alinéas de l’article L. 273-10 du code électoral et qui a été développé ci-avant en « I.B. »… autrement posé, nous sommes dans l’hypothèse vue en « II.A.»

En ce cas, donc, on peut aller piocher, faute de pouvoir appliquer le régime normal exposé ci-avant en I.A. :

  • par défaut le suivant de liste de même sexe dans la liste des élus communautaires
  • à défaut le suivant de liste de sexe opposé dans la liste des élus communautaires
  • à défaut le suivant de liste de même sexe dans les suivants de liste de la liste pour le conseil municipal (on passe donc de la colonne de droite à celle de gauche dans la présentation des bulletins de vote)… en ne piochant que dans ceux de ces suivants de liste qui sont bien conseillers municipaux
  • et encore à défaut le suivant de liste de sexe opposé dans les suivants de liste de la liste pour le conseil municipal (on passe donc de la colonne de droite à celle de gauche dans la présentation des bulletins de vote)… en ne piochant que dans ceux de ces suivants de liste qui sont bien conseillers municipaux
  • et si cela ne fonctionne pas… on continue en dépit de cette loi, hélas, à ne pas pouvoir piocher dans les suivants de liste de la liste municipale qui ne seraient pas par ailleurs conseillers municipaux (cas rare mais qui peut concerner certaines très grandes communes).

 

Reste que ce texte me semble recéler 3 incertitudes :

  • le graphique de la Commission des lois du Sénat semble indiquer que si la commune ne dispose que d’un siège à la communauté ou à la métropole, et qu’il faudrait aller piocher dans les suivants de liste des conseillers municipaux « non fléchés » (ce qui est possible après deux démissions et/ou décès)… la loi GATEL ne s’appliquerait pas. Je ne vois pas les raisons de cette exclusion dans ces textes.
  • on continue de devoir aller chercher (sauf commune n’ayant qu’un siège) le suivant de liste de même sexe en cas de démission ou de décès… durant la 1e année du mandat, c’est certain.
    Au-delà de cette 1e année, c’est le plus probable.Mais il pourrait être posé qu’on devrait aller chercher le suivant de liste de sexe opposé en vertu de la loi GATEL une fois la 1e année de mandat passée.Cependant, cette possible interprétation resterait difficile à soutenir car la loi GATEL ne s’applique :

    • d’une part qu’au delà du délai d’un an
    • et d’autre part que faute pour les aliénéas précédents d’être applicables (« lorsqu’il n’existe pas de conseiller municipal ou de conseiller d’arrondissement pouvant être désigné en application des deux premiers alinéas» ).
      AU TOTAL, on semble en pareil cas devoir aller chercher (sauf commune n’ayant qu’un siège) le suivant de liste de même sexe en cas de démission ou de décès la 1e année (ça c’est certain)… et idem au delà de ce délai d’un an (on peut juste aller chercher le suivant de liste de même sexe si on ne peut pas faire autrement, faute d’application du droit usuel). Mais la rédaction de cette loi laisse la place, donc, à de possibles interprétations divergentes.
  • n’a toujours pas été réglé la question des cas où il reste des suivants de liste dans la liste municipale; mais qui sont NON ELUS au conseil municipal car tous les élus de la liste siègent déjà à l’intercommunalité ?…

 

Un point a été précisé lors des débats parlementaires : la loi GATEL s’appliquerait un an après les élections, donc, même pour les vacances NON résolues intervenues pendant cette période d’un an.

 

 

 

D’où la solution suivante, mais avec encore quelques possibles débats à la marge… et pas mal de migraines au milieu :