Un bulletin municipal peut-il ouvrir, à ses auteurs, l’accès aux avantages de la profession de journaliste ?

Un bulletin municipal peut-il ouvrir, à ses auteurs, l’accès à la carte de presse ? au statut fiscal y correspondant ? Un bulletin municipal est-il assez indépendant à ce sujet ? A ces questions, les juridictions répondent par la négative.

 

I. Non à la carte de presse (pour le bulletin municipal de Levallois-Perret sous la précédente mandature) pour le TA de Cergy-Pontoise

 

Aux termes de l’article L. 7111-3 du code du travail :

« Est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources. (…) ».

Ce régime est précisé par les articles L. 7111-6 et R. 7111-1 de ce même code.

Le TA en déduit qu’il résulte de ces dispositions que la qualité de journaliste professionnel suppose :

  • premièrement, que l’intéressé exerce une activité dans une entreprise de presse, une publication quotidienne ou périodique, une agence de presse, ou une entreprise de communication au public par voie électronique,
  • deuxièmement, qu’il ait pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de sa profession et en tire le principal de ses ressources.

La circonstance que l’activité en cause ne soit pas exercée au sein d’une entreprise de presse ne fait certes pas obstacle à la reconnaissance de son caractère journalistique, mais à la condition que puisse être identifiée une publication de presse autonome à la réalisation de laquelle contribue l’intéressé, au regard notamment de son objet par rapport à la structure employant l’intéressé, de l’existence d’une ligne éditoriale propre et de ses sources de financement.

Le TA a donc validé la position de la commission supérieure qui a refusé de délivrer à M. X la carte d’identité des journalistes professionnels au motif que

  • « le magazine Info-Levallois, qui ne dispose pas d’une indépendance éditoriale, a (…) pour objet principal la promotion du territoire levalloisien. Il apparait comme un journal municipal, organe de communication de la ville (…) Par suite, ce magazine ne peut être regardé comme une publication au sens de l’article L. 7111-3 du code du travail. M. X ne remplit donc pas les conditions prévues par ce texte pour se voir reconnaître la qualité de journaliste professionnel au titre de l’année 2018 ».

Intéressant en droit… et piquant en l’espèce.

Voir TA Cergy-Pontoise, 26 novembre 2019, n° 1810100 :

 

cergy-pontoise.tribunal-administratif.fr:content:download:166866:1675057:version:1:file:1810100

 

 

II. Même raisonnement, sous l’angle fiscal, par la CAA de Bordeaux

 

Le même raisonnement a été schématiquement conduit par la CAA de Lyon.

Les dispositions du 1° de l’article 81 du code général des impôts exonèrent d’impôt sur le revenu, à concurrence de 7 650 euros, les frais professionnels des journalistes.

Ce régime s’applique aux journalistes ou rédacteurs, définis comme étant les personnes apportant une collaboration intellectuelle permanente à des publications périodiques en participant directement à l’élaboration du contenu de l’information des lecteurs.

Une contribuable, rédactrice au sein d’un journal municipal et qui intervient également au sein du blog de la commune, a revendiqué le bénéfice de l’avantage fiscal réservé aux journalistes.

La cour a constaté, cependant, que « si ce journal et ce blog peuvent être regardés comme ayant le caractère de publications périodiques, celles-ci ne possèdent aucune autonomie fonctionnelle vis-à-vis de la commune et aucune indépendance éditoriale à l’égard de cette collectivité, de sorte que leur rôle et leur activité se confondent avec ceux de cette dernière. »

Exit donc l’avantage fiscal et la qualification juridique de journaliste (ou de rédacteur) qui y conduit.

Source : CAA Bordeaux, 29 juillet 2020, n° 18BX03939 :

http://jurissite-caa-bordeaux.fr/index.php?post/Impôt-sur-le-revenu-–-1°-de-l’article-81-du-CGI-%3A-allocation-des-journalistes-pour-frais-d’emploi–-Qualité-de-journaliste-d’une-personne-dans-une-publication-municipale-sans-autonomie-à-l’égard-de-la-commune-Absence

 

Voir antérieurement et dans le même sens : Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 13 novembre 2013, n° 1107281 ; Tribunal administratif de Lyon, du 14 mai 1990, inédit au recueil Lebon

NB : voir aussi http://www.ccijp.net/article-19-formulaires-de-demandes-individuelles.html