CEREMA : le décret est sorti, visant à en réformer l’organisation et, surtout, à permettre que les collectivités puissent y recourir en « in house »

L’article 159 de la loi 3DS (loi n° 2022-217 du 21 février 2022) modifiait la loi 2013-431 du 28 mai 2013 afin de permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements d’être membres du CEREMA (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), dont les missions sont redéfinies, afin que celui-ci puisse, recevoir, desdits membres, des missions sans mise en concurrence en « in house » (prestations de services intégrées).

NB : rappelons que, en droit français du moins (le juge européen étant quant à lui plus souple sur ce point : CJCE, 13 novembre 2008, Coditel Brabant SA, aff. C324/07 ; CJUE, 8 décembre 2016, Undis Servizi Srl c/ Comune di Sulmona, n° C-553/15)  pour que l’on soit en in house, il ne suffit pas que l’on crée une structure entre personnes publiques à l’exclusion de toute personne privée (sur ce point voir CJCE, 11 janvier 2005, Stadt Halle, aff. C-26/03 ; CJCE,18 novembre 1999, Teckal, Rec. CJCE 1999, p. 8121 ; CJCE, 10 novembre 2005, Commission c/ Autriche, aff. C-29/04… mais le droit européen a un peu évolué depuis lors). En effet, il a plu au juge français d’être plus exigeant en imposant, pour qu’il y ait contrôle analogue, quand on n’a pas de place au sein du conseil d’administration de la structure ainsi contrôlée, qu’il y ait des exigences supplémentaires. Une attention toute particulière doit être apportée aux conditions contractuelles du contrôle analogue pour sécuriser l’ensemble (CE, 6 novembre 2013, Marsannay-la-Côte, n° 365079, 365082 et 366544). A moins que le régime du CEREMA soit perçu comme une dévolution de droits exclusifs (CJUE, 10 novembre 1998, Gemeente Arhnem, Gemeente Rheden / BFI Holding, C 360/96 ; CJUE, 23 mai 2000, Sydhavnens, C 209 /98, concl. Léger ; voir aussi CE, 14 octobre 2020, n° 428691) mais faute pour le CEREMA d’être le seul acteur possible dans ce domaine, nous ne croyons pas à l’applicabilité de cette interprétation juridique.

Le décret d’application de ce régime est au JO de ce matin.

 

Sa notice officielle est ainsi rédigée :

« Le texte modifie l’organisation et le fonctionnement du CEREMA de façon à créer les conditions d’une relation de quasi-régie entre, d’une part, l’Etat et certaines collectivités territoriales ou groupements de collectivités et, d’autre part, cet établissement public, consécutivement à l’entrée en vigueur de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale. »

Oui mais… mais… rappelons qu’il a — hélas — plu au Conseil d’Etat, par son arrêt Marsannay-la-Côte, d’être plus exigeant que la CJUE — voir supra — sur ce point.

C’est là d’ailleurs une tradition nationale bien ancrée consistant à être plus exigeant en droit européen que le juge européen lui-même tout en se plaignant bruyamment des rigueurs de celui-ci (j’ai moult exemples en ce domaine, en droit des déchets, en notion de droits exclusifs, etc.). Sic.

Revenons à notre propos. Il a donc plu au juge français d’être plus zélé que la CJUE en ce domaine et donc le Cerema aura intérêt à prévoir des clauses très solides de contrôle analogue…