Conception-réalisation : la légalité du motif de rejet fondé sur l’expérience en milieu tropical…

La commune de B., par un avis de marché publié au JOUE le 14 août 2023, a appelé à la concurrence en vue de l’attribution d’un marché de conception-réalisation pour la réalisation d’un groupe scolaire comportant dix-sept classes élémentaires sur une surface d’approximativement 2 514 m2.

Par une décision du 23 octobre 2023, la commune a informé la société F., mandataire d’un groupement momentané d’entreprise, que sa candidature avait été rejetée.

La commune a justifié le rejet en invoquant l’insuffisance de références en conception-réalisation pour la partie architecturale et le manque d’expérience de construction scolaire en milieu tropical.

C’est dans ces conditions que la société F. demande au juge des référés d’annuler, à compter de la phase d’analyse des candidatures, la procédure, ainsi que la décision du 23 octobre 2023 rejetant sa candidature.

Les motifs de rejet sont-ils fondés en droit ?

 Concernant le premier motif de rejet, le juge des référés constate que le motif du manque de références en conception-réalisation pour la partie architecturale est entaché d’irrégularité. Le règlement de la consultation n’impose pas un nombre minimum de références, et le dossier de candidature de la société respecte les conditions.

Cependant, la candidature n’a pas été notée sur ce critère spécifique.

Effectivement, concernant le motif d’insuffisance d’expérience en construction scolaire en milieu tropical, le juge rappelle dans un premier temps que le règlement de la consultation exige que chaque candidat atteste de compétences, notamment dans les domaines des travaux « tous corps d’état » et de la qualité environnementale du bâti en milieu tropical.

Ainsi, le juge des référés considère que la commune pouvait valablement se fonder sur un motif tiré de l’insuffisance des capacités professionnelles du groupement en matière de construction scolaire en milieu tropical pour rejeter sa candidature.

Le juge souligne le caractère spécifique du climat tropical, et précise que la société F. n’a pas fourni suffisamment d’arguments pour justifier l’irrégularité du critère :

« 6. En deuxième lieu, en bornant à soutenir que les constructions en milieu tropical ne nécessitent pas de savoir-faire et de compétences techniques particulières, alors qu’il est constant que le climat tropical présente des caractéristiques particulières en matière de chaleur, de pluie et d’humidité, la société requérante n’apporte pas d’éléments suffisants afin d’étayer son moyen selon lequel le critère lié à l’expérience en matière de construction en milieu tropical serait injustifié, disproportionné et discriminatoire ».

Par conséquent, le juge relève que le milieu tropical présente bien des spécificités justifiant le rejet de l’offre de la société F., et validant ainsi la décision en ce sens de la commune de B.

Tribunal administratif de Mayotte, ord. 26 janvier 2024, n°2304704

 

*article rédigé avec la collaboration de Lou Préhu, juriste