10 questions sur le nouveau régime de scission des communautés de communes et d’agglomération

Nouvelle diffusion en raison des questions qui nous sont fréquemment posées ces temps-ci… 

 

L’article 26 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique crée une nouvelle procédure qui vise à attaquer de front les communautés XXL. Des communautés qu’il est de bon ton de brocarder, certes non sans raisons, mais pour certains territoires… quelles sont les solutions envisagées pour certains territoires très espacés et dénués de vraie ville centre de proximité ?

Le législateur a en effet prévu une procédure de scission (dénommée « partage » dans la loi)… et qui devrait faire beaucoup parler d’elle au fil du mandat à venir.

Une grande communauté (de communes ou d’agglomération) peut en effet se trouver scindée en plusieurs blocs , à l’image, en biologie, d’une division cellulaire.

 

 

I. Quelles sont les communautés qui pourront ainsi se scinder (se partager) en plusieurs blocs ?

 

Les comunautés de communes ou d’agglomération.

 

II. Cette scission sera-t-elle contrainte par des paramètres géographiques ?

 

Oui car chacun des périmètres des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre résultant de ce partage devra :

  • d’une part respecter les seuils de population et prendre en compte les autres orientations et obligations prévus en droit (seuils minima pour les communautés d’agglomération ; seuils et orientations définis aux III et VII de l’article L. 5210-1-1 du CGCT)
  • d’autre part former un ensemble d’un seul tenant et sans enclave

 

III. Quelles seront les conditions de majorité pour pouvoir opérer une telle scission ? Quelle est la procédure à suivre ?

 

Il faut, pour qu’un tel partage puisse être opéré, avoir :

  • la majorité qualifiée des conseils municipaux (celle prévue à l’article L. 5211-5 du CGCT) au sein de chaque fragment de l’actuelle communauté, composant le territoire de chaque future communauté)
  • un avis simple de l’actuel conseil de communauté
  • un avis simple du ou des comité(s) technique(s) (comité sociaux territoriaux à l’avenir)
  • une consultation pour avis simple de la CDCI plénière (non prévue par le nouveau texte stricto sensu mais à prévoir en vertu des dispositions des articles L. 5211-5 et L. 5211-45 du CGCT)

 

IV. Pourra-t-on scinder une communauté d’agglomération pour faire deux communautés de communes ?

 

Le droit ne l’interdit pas. En pratique, rares seront les préfets qui oseront le faire, sauf très forte pression ou sauf déverrouillage majeur dans les pratiques de l’Etat.

 

V. Est-ce la procédure à utiliser pour rejoindre une autre communauté ?

 

Il est possible de faire une année une répartition (scission) de communauté, puis l’année d’après qu’une des deux communautés issues de la scission opère une fusion avec une communauté ou une métropole voisine. Mais si tel est l’objectif, d’autres procédures seront à privilégier.

 

VI. Quid de la DGF ? de la fiscalité ?

 

Des études financières et juridiques sérieuses s’imposeront naturellement en pareil cas. Mais gare à divers points, dont le régime de la DGF en première année en communautés de communes… Sur ce point, diverses précisions sont ardemment attendues (idem pour une communauté qui se scinderait en une communauté à FPU et une autre à fiscalité additionnelle…).

 

VII. Quelles sont alors les modalités de répartition des personnels ?

 

Les modalités de répartition du personnel entre ces établissements publics de coopération intercommunale sont décidées par délibérations concordantes :

  • de l’EPCI existant, après avis du ou des comités sociaux territoriaux (CT) compétents.Une fiche d’impact décrivant notamment les effets du partage sur l’organisation et les conditions de travail ainsi que sur la rémunération et les droits acquis des fonctionnaires et des agents contractuels territoriaux concernés est jointe à la convocation des membres des comités sociaux territoriaux.
  • et de la majorité qualifiée des conseils municipaux des communes intéressées (conditions de majorité prévues au II de l’article L. 5211-5 du CGCT).

A défaut d’accord sur la répartition au plus tard trois mois avant le partage, celle-ci est arrêtée par le préfet.

Les fonctionnaires conservent les conditions de statut et d’emploi qui sont les leurs. Les agents contractuels territoriaux conservent, à titre individuel, le bénéfice des stipulations de leur contrat. Les services antérieurement accomplis en qualité d’agent contractuel de l’ancien établissement public de coopération intercommunale sont assimilés à des services accomplis en qualité d’agent contractuel de l’établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé.

Puis, dans un délai de six mois à compter de sa création, chaque nouvel établissement public de coopération intercommunale définit le régime indemnitaire qui s’applique aux agents nouvellement recrutés. Dans l’attente, ces derniers bénéficient du régime indemnitaire qui était applicable à l’emploi auquel ils sont affectés.

 

VIII. Quelles sont alors les modalités de répartition des biens ?

 

Ces modalités sont, là encore, définies par délibérations concordantes :

  • de l’EPCI existant
  • et de la majorité qualifiée des conseils municipaux des communes intéressées (conditions de majorité prévues au II de l’article L. 5211-5 du CGCT).

À défaut d’accord sur la répartition au plus tard trois mois avant le partage, celle-ci est arrêtée par le préfet.

Ledit préfet constate, sous réserve des droits des tiers, la répartition entre les communautés créées de l’ensemble de l’actif et du passif au vu du dernier compte administratif de l’établissement public de coopération intercommunale qui fait l’objet du partage.

 

IX. Qui adopte les comptes administratifs post-scission ?

Chaque EPCI issus du partage vit sa vie budgétaire et adopte son budget (le temps de le faire, il faudra sans doute prévoir des avances de trésorerie, voire ventiler, répartir, les douzièmes provisoires…).

Le compte administratif de la communauté coupée en morceaux est :

  • approuvé par les nouveaux établissements publics de coopération intercommunale.
  • ou à défaut, passé le 30 juin de l’année n+1, arrêté par le préfet après avis rendu dans le délai d’un mois par la chambre régionale des comptes.

 

 

X. Aurons-nous beaucoup de telles scissions au fil du prochain mandat ?

Dans nombre de territoires, des divorces à l’amiable sont envisagés. Dans d’autres, ce sont au contraire de nouvelles fusions qui sont à l’étude. Sur ces divers points, il faudra attendre de voir ce que donneront les municipales, d’une part, et l’évolution des pratiques préfectorales, d’autre part…

 

 

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Crédits : Brian Zablocky sur Wikipedia, https://en.wikipedia.org/wiki/User:ZabMilenko

 

VOICI LES DISPOSITIONS CORRESPONDANTES :

 

Article 26

  1. – Après l’article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 5211-5-1 Aainsi rédigé :

« Art. L. 5211-5-1 A. – I. – Des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent être créés par partage d’une communauté de communes ou d’une communauté d’agglomération existante dans les conditions prévues à l’article L. 5211-5, après avis de l’organe délibérant de l’établissement public existant.

« Les conditions prévues au II du même article L. 5211-5 doivent être réunies dans le périmètre de chaque nouvel établissement ainsi créé.

« Chacun des périmètres des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre résultant des opérations décrites aux premier et deuxième alinéas du I du présent article doit respecter les seuils de population et prendre en compte les autres orientations et obligations définies aux III et VII de l’article L. 5210-1-1.

« II. – Les modalités de répartition du personnel entre ces établissements publics de coopération intercommunale sont décidées par délibération de l’établissement public de coopération intercommunale existant, après avis du ou des comités sociaux territoriaux compétents. Cette délibération doit faire l’objet d’un accord des conseils municipaux des communes intéressées, dans les conditions de majorité prévues au II de l’article L. 5211-5.

« A défaut d’accord sur la répartition au plus tard trois mois avant le partage, celle-ci est arrêtée par le représentant de l’État dans le département.

« Une fiche d’impact décrivant notamment les effets du partage sur l’organisation et les conditions de travail ainsi que sur la rémunération et les droits acquis des fonctionnaires et des agents contractuels territoriaux concernés est jointe à la convocation des membres des comités sociaux territoriaux.

« Les fonctionnaires conservent les conditions de statut et d’emploi qui sont les leurs. Les agents contractuels territoriaux conservent, à titre individuel, le bénéfice des stipulations de leur contrat. Les services antérieurement accomplis en qualité d’agent contractuel de l’ancien établissement public de coopération intercommunale sont assimilés à des services accomplis en qualité d’agent contractuel de l’établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé.

« Les agents bénéficient des garanties prévues aux articles L. 5111-7 et L. 5111-8.

« Dans un délai de six mois à compter de sa création, le nouvel établissement public de coopération intercommunale définit le régime indemnitaire qui s’applique aux agents nouvellement recrutés. Dans l’attente, ces derniers bénéficient du régime indemnitaire qui était applicable à l’emploi auquel ils sont affectés.

« La répartition du personnel effectuée dans les conditions prévues au premier alinéa du présent II est annexée à l’arrêté du représentant de l’État dans le département portant création du nouvel établissement public.

« III. – Les modalités de répartition des biens, équipements et services publics ainsi que de l’ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés sont décidées par délibération de l’établissement public de coopération intercommunale existant. Cette délibération doit faire l’objet d’un accord des conseils municipaux des communes intéressées dans les conditions de majorité prévues au II de l’article L. 5211-5. À défaut d’accord sur la répartition au plus tard trois mois avant le partage, celle-ci est arrêtée par le représentant de l’État dans le département.

« Les budgets des nouveaux établissements publics de coopération intercommunale sont adoptés dans les conditions fixées à l’article L. 1612-3. Le compte administratif de l’établissement public de coopération intercommunale qui a fait l’objet du partage est approuvé par les nouveaux établissements publics de coopération intercommunale. En cas d’absence d’adoption du compte administratif à la date du 30 juin de l’année suivant le partage, le représentant de l’État dans le département arrête le compte à l’appui du compte de gestion, après avis rendu dans le délai d’un mois par la chambre régionale des comptes.

« La répartition des biens, équipements et services publics effectuée dans les conditions prévues au premier alinéa du présent III est annexée à l’arrêté du représentant de l’État dans le département portant création du nouvel établissement.

« Le représentant de l’État dans le département constate, sous réserve des droits des tiers, la répartition entre les établissements publics de coopération intercommunale qui ont été créés de l’ensemble de l’actif et du passif au vu du dernier compte administratif de l’établissement public de coopération intercommunale qui fait l’objet du partage. » 

  1. – La seconde phrase du deuxième alinéa du II de l’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales est supprimée.