Quelles collectivités peuvent-elles recourir au crowdfunding (financement participatif) ?

Entre autres désintermédiations, le crowdfunding (financement participatif) se développe. Les particuliers prêtent, en direct, via une plate-forme, à des emprunteurs. Voir par exemple, pour un projet de financement participatif de travaux d’éclairage d’une commune :

 

Un des problèmes consistait à se demander si ces maniements de fonds ne devraient pas en passer par un mandat avec l’accord du comptable public, ou par une régie de recettes. Ce qui toutefois se discutait en droit. De même la légalité du financement par des personnes morales restait-elle fort incertaine.

L’article 48 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021 a étendu le champ de ces financements participatifs. 

Le I de cet article 48 a modifié l’article L. 1611-7-1 du CGCT, lequel dispose désormais ceci :

« A l’exclusion de toute exécution forcée de leurs créances, les collectivités territoriales et leurs établissements publics peuvent, après avis conforme de leur comptable public et par convention écrite, confier à un organisme public ou privé l’encaissement :
[…]
4° Du revenu tiré d’un projet de financement participatif, au sens du cinquième alinéa de l’article L. 548-1 du code monétaire et financier, au profit de tout service public, à l’exception des missions de police et de maintien de l’ordre public. Par dérogation aux articles L. 511-5 et L. 511-6 du même code, les personnes morales peuvent accorder des prêts aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, dans la limite d’un prêt par projet de financement participatif. Le taux conventionnel applicable à ces crédits est de nature fixe et ne dépasse pas le taux mentionné à l’article L. 314-6 du code de la consommation. Un décret fixe les principales caractéristiques de ces prêts.»

 

Et le II de cet article, non codifié, de prévoir ce qui suit :

« II.-A titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2022, les collectivités territoriales et leurs établissements publics peuvent, à l’exclusion de toute exécution forcée de leurs créances, confier à un organisme public ou privé, sur avis conforme de leur comptable public et par convention écrite, l’encaissement du revenu tiré d’un projet de financement participatif sous forme de titres de créance au profit de tout service public, à l’exception des missions de police et de maintien de l’ordre public.

Les collectivités territoriales peuvent se porter candidates à cette expérimentation auprès des ministres chargés des collectivités territoriales et des comptes publics. Les ministres chargés des collectivités territoriales et des comptes publics se prononcent sur les candidatures, en tenant compte de la nature du projet, de son montant, de son coût de financement et, le cas échéant, de son impact environnemental. Les critères d’éligibilité des collectivités territoriales ainsi que les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation sont définis par arrêté conjoint des ministres chargés des collectivités territoriales et des comptes publics.

Cette expérimentation fait l’objet d’une première évaluation dont les résultats sont transmis au Parlement au plus tard dix-huit mois avant son terme. Un bilan définitif de l’expérimentation est transmis au Parlement au plus tard trois mois après son terme.»

 

Une première application réglementaire (pour la partie codifiée dans le CGCT) est venue avec le décret n° 2022-1307 du 12 octobre 2022 en matière de conventions de mandat concernant l’encaissement des revenus tirés d’un projet de financement participatif :

 

Une autre est venue au JO ce week-end avec l’arrêté du 23 janvier 2023 définissant les critères d’éligibilité des collectivités territoriales ainsi que les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation prévue au II de l’article 48 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances (NOR : IOMB2235055A) :

 

Iil s’agit donc du texte réglementaire pour l’autre cadre, celui — précité — II de l’article 48 de la loi du 8 octobre 2021 susvisée.

Ces collectivités peuvent déposer leur candidature à l’expérimentation prévue au même II, au plus tard le 31 mars 2024, auprès du représentant de l’Etat dans le département.
Les collectivités et leurs établissements publics doivent s’engager à clôturer la période de levée de fonds au plus tard le 31 décembre 2024.

Ce dossier de candidature comporte :

– une délibération de la collectivité territoriale ou de l’établissement public approuvant la candidature ;

– une description du projet présentant sa nature, des éléments relatifs à son impact environnemental le cas échéant, son coût prévisionnel, ses conditions de financement, les modalités d’encaissement des revenus issus du financement participatif et de leur remboursement ;

– le montant de l’épargne brute, des remboursements d’emprunt, des recettes d’emprunts et la capacité de désendettement constatés lors des trois derniers comptes administratifs approuvés, les montants prévisionnels de l’épargne brute, des remboursements d’emprunt, des recettes d’emprunts et la capacité de désendettement pour l’exercice en cours et les trois exercices suivants ;

– les données du projet de contrat d’émission sous forme de titres de créance (annexe II de l’arrêté).

L’épargne brute et les remboursements d’emprunt qui correspondent aux remboursements de dette sont définis par l’article D. 1611-41 du code général des collectivités locales.

Seuls peuvent être éligibles à l’expérimentation, les collectivités territoriales et leurs établissements publics qui, au vu des éléments constitutifs du dossier, remplissent l’ensemble des critères suivants :

  • les projets financés ne relèvent pas de missions de police et de maintien de l’ordre public ;
  • sur les trois dernières années et pour l’exercice en cours de manière prévisionnelle en tenant compte des recettes issues du financement participatif, le candidat dispose d’une capacité de désendettement inférieure aux seuils fixés au 1° de l’article D. 1611-41 du code général des collectivités territoriales.
  • Sur les trois dernières années, le candidat dispose d’une épargne nette positive. L’épargne nette est entendue comme la différence entre l’épargne brute et le montant du remboursement annuel de la dette en capital.