Confondre note de synthèse et projet de délibération s’avère parfois possible avant la séance. Pas après.

Confondre note de synthèse et projet de délibération n’est pas toujours, du moins si le projet s’avère très clair, un péché mortel au stade de l’information donnée, avant la séance, aux élus (I.).

Cette confusion n’est en revanche pas possible au stade du droit à communication des documents administratifs (II). Même si une délibération — mise en ligne — est proche de ce qu’avait été la note de synthèse, cette dernière doit être communiquée à un éventuel demandeur, sous réserve des occultations habituelles.


 

 

I. Confondre note de synthèse et projet de délibération n’est pas toujours, du moins si le projet s’avère très clair, un péché mortel au stade de l’information donnée, avant la séance, aux élus

 

La note de synthèse, notamment, donne lieu à des jurisprudences subtiles.

Sur le principe, elle est toujours exigée dès 3500 habitants pour les communes et, désormais, pour toutes les intercommunalités, de toutes tailles. Voir à ce sujet :

NB rappel : dans les départements et les régions, en revanche, s’impose un rapport par point de l’ordre du jour, et non une simple note de synthèse. , 

La jurisprudence, reprenant les obligations imposées par le Code général des collectivités territoriales (CGCT), en ses articles L. 2121-12 et L. 2121-13, conduit schématiquement à vérifier deux points :

  • les conseillers municipaux ont-ils pu consulter les pièces et documents nécessaires à leur information ? (CE, 23 avril 1997, Ville Caen c/ Paysant, n°151852, Dr. adm. 1997, comm. 196 ; voir aussi par exemple CAA Bordeaux, 29 oct. 2002, Bordeaux : AJDA 2003, p. 203, note C. Devès).
  • l’information fournie a-t-elle été suffisante, n’a-t-elle pas induit en erreur les élus ? (CE, 1er octobre 1997, Avrillier  ; Dr. adm. 1997, comm. 342).

Sur ces points la jurisprudence abonde pour confirmer que ce qui compte est la bonne information des élus locaux membres de l’assemblée délibérante au moment de la convocation du comité.

Au total, le Conseil d’Etat n’est d’ailleurs pas formaliste : il impose que les élus aient une information sur l’objet de la délibération que celle-ci se matérialise, ou non, dans la note de synthèse prévue par l’article L. 2121-12 du CGCT. Citons sur ce point les tables du recueil Lebon :

 « Les documents joints à la convocation adressée par le maire aux conseillers municipaux, en vue de la séance au cours de laquelle devait être adopté le budget, comprenait le projet intégral de budget primitif divisé en chapitres et articles ainsi que, notamment, l’état détaillé des emplois permanents, l’état des ensembles immobiliers et mobiliers, l’état de la dette et des créances et l’état des emprunts garantis par la commune. Ces documents ont permis aux conseillers municipaux de disposer d’une information répondant aux exigences posées par les articles L.121-22 et L.121-10-III du code des communes, même en l’absence de la “note explicative de synthèse” prévue par ce dernier article »
(CE, 9 / 8 SSR, du 12 juillet 1995, req. n°157092).

Un autre arrêt du Conseil d’Etat impose par exemple que pour une vente immobilière, l’information des élus porte, sommairement, sur les motifs de la cession, le prix et le bénéficiaire de l’acquisition, ces informations retracées dans la note de synthèse étant suffisantes (CE, 8 juin 2011, req. n°327515, publié au rec.).

Citons deux décisions rendues par le Tribunal de Paris :

  • acceptation par le TA de Paris du fait que l’exposé des motifs d’une délibération peut valoir note de synthèse et, en l’état d’un raisonnement assez détaillé, information suffisante (pour un tarif de restauration scolaire) : TA Paris, 29 septembre 2015, n° 1507531 ;
  • caractère suffisant d’une note de synthèse rappelant les domaines de délégation à l’exécutif et estimant pertinent que tel ou tel domaine donne lieu à délégation à celui-ci : TA Paris, 10 avril 2014, n° 1305635.

Mais cette souplesse n’est pas sans limites. Même si le point de l’ordre du jour semble transparent, un minimum d’explications s’impose (CE 13 février 2009, Elections des délégués de la commune de Clermont Ferrand à la communauté d’agglomération « Clermont Communauté », n° 317787), avec sinon des risques d’annulations redoutables (voir par exemple CAA Bordeaux 13 mars 2000 commune de Blaye n°07BX00652) si les enjeux du dossier ne sont pas assez mis en relief.

Mais parfois le juge admet des notes de synthèse très, très synthétiques  (CE 30 avril 1997 commune de Sérignan n° 158730 ; CAA Marseille 3 juillet 2006 M.G n° 04MA02108).

Parfois, le juge admet que la note de synthèse soit remplacée par la communication d’un projet de délibération très clair. Parfois, la censure s’impose pour des notes insuffisamment fouillées ou au contraire qui sont immensément détaillées, sans synthèse ni propositions claires, au point d’y noyer le lecteur…

Sources : art. L. 1411-4, L. 1524-5, L. 2121-12, L. 2121-13, L. 2121-19, L. 2121-26 et L. 2224-5, ainsi que L. 5211-39 (issu de la loi du 12/7/99) du CGCT ; art. L. 241-11 du Code des juridictions financières ; CE, ass., 9/11/73 Cne de Pointe-à-Pitre, rec. 631 ; CE 27/10/89 de Peretti, n°70549 ; CE 29/6/90 Cne de Guitrancourt, n°68743 ; CE 8/6/94 Cne de Ville-en-Vernois, rec. 828 ; CE 12/7/95 Cne de Fontenay-le-Fleury, n° 157092 ; CE, Sect., 23/4/97 V. de Caen, n°151852 ; CE 30/4/97 Cne de Sérignan, n°158730 ; CE 11/01/02, Janin, n°215314 ; CE 9/04/04, Vast, n°263759 ; CE, Ass. 27/05/05, Dpt de l’Essonne, n°268564 ; CE, Ass. 27/05/05, Cne d’Yvetot, n°265494 ; CE, Sect, 5/10/05 M. Tomaselli, n°256055 ; CE 11/09/06, Cne de Théoule-sur-Mer, n°255273; CE 10/01/07, Sté Pompes Funèbres et conseillers funéraires du Roussillon, n°284063CAA Paris, 3/07/01, Voiret, n°98PA01434 ; CAA Nantes, 18/06/04, Cne de Carnac, n°03NT01143 ; TA Lyon, 7/03/01, Kolischev, n°9803985 ; TA St-Denis, 8/12/04, Hoarau, n°0200806 ; Rép. Min. n°70685, JOAN Q, 8/04/02, p. 1916 ; etc.

Voir à ces sujets ma petite vidéo de 4 mn 31 :

 

https://youtu.be/GK432JcIrRA

 

 

 

II. Cette confusion n’est en revanche pas possible au stade du droit à communication des documents administratifs

 

En revanche, il n’est pas possible de refuser de transmettre une note de synthèse, au titre du droit à communication des actes administratifs… au motif que la délibération finale ressemble considérablement à ce qu’était la note de synthèse.

Ce point avait été rendu clair par le TA d’Orléans, sans que celui-ci, en l’espèce, n’estime comme abusives les demandes de communication de documents administratifs faites par le requérant :

 

Le Conseil d’Etat vient de le confirmer.

Le moyen de recours en cassation de la communauté de communes qui avait refusé cette communication de documents était ainsi résumé par le Conseil d’Etat :

« les notes de synthèse sont quasiment identiques aux délibérations, lesquelles sont publiées, que la mise en ligne nécessite d’augmenter les capacités de stockage numérique, avec des conséquences écologiques et financières, et que l’occultation, dans les marchés publics, des mentions relevant du secret des affaires, nécessiterait de mobiliser un agent pendant plusieurs jours.»

… moyen qui n’a pas été considéré comme sérieux.

Source :

Conseil d’État, 24 mai 2023, n° 469652