Un tableau d’avancement établi par ordre alphabétique entraîne l’illégalité du décret de nomination des promus même lorsque le requérant est un candidat écarté.

Par un arrêt M. B… c/ ministre de la culture en date du 21 septembre 2023 (req. 464800), le Conseil d’État :

– d’une part, rappelle, conformément à sa jurisprudence, que le tableau d’avancement ne peut pas légalement être établi par ordre chronologique mais doit l’être par ordre de mérite,

– d’autre part, précise que le tableau d’avancement et le décret de nomination pris à sa suite forment une opération complexe de sorte qu’un requérant peut, lors d’un recours dirigé contre le décret de nomination, exciper de l’illégalité du tableau d’avancement, laquelle entraîne par voie de conséquence l’illégalité de la promotion, et ce (c’est là l’apport de l’arrêt) même si le requérant est un candidat qui ne figure pas sur le tableau d’avancement.

Monsieur B…, conservateur en chef du patrimoine, a attaqué le décret du président de la République portant nomination et titularisation de 27 de ses collègues dans le grade de conservateur général du patrimoine au titre de l’année 2022, promotion établie sur la base d’un tableau d’avancement établi par la ministre de la culture où figurait les 27 promus par ordre alphabétique.

Le Conseil d’État, se fondant sur les dispositions : « Contrairement à ce que soutient la ministre de la culture, la circonstance que M. B… n’avait pas attaqué le tableau d’avancement ne lui interdisait pas de contester le décret qu’il attaque portant nomination dans le grade de conservateur général du patrimoine au motif que le tableau d’avancement a été établi par ordre alphabétique et non par ordre de mérite. Dès lors que l’établissement du tableau d’avancement et les mesures individuelles de promotion du décret attaqué constituent une opération complexe, le caractère définitif du tableau d’avancement ne peut, en tout état de cause, faire obstacle à la recevabilité d’un tel moyen. »

Or, en l’espèce, constate le Conseil d’État, « le tableau d’avancement pour l’accès au grade de conservateur général du patrimoine au titre de l’année 2022, établi par l’arrêté de la ministre de la culture en date du 10 décembre 2021, comporte une liste de 27 conservateurs en chef du patrimoine inscrits par ordre alphabétique. C’est aussi dans le même ordre alphabétique que le décret attaqué nomme ces 27 conservateurs dans le grade de conservateur général du patrimoine au titre de l’année 2022. En présentant ainsi la liste des candidats par ordre alphabétique, le tableau d’avancement méconnaît les dispositions […] de l’article 58 de la loi du 11 janvier 1984, applicable en l’espèce, qui subordonnent la promotion des agents au seul critère du mérite et de la valeur professionnelle. Il s’ensuit […] que le requérant est fondé à demander, par voie de conséquence de l’illégalité entachant le tableau d’avancement, l’annulation du décret portant nomination dans le grade de conservateur général du patrimoine au titre de l’année 2022 qu’il attaque. »

Enfin, l’exécution de l’arrêt impliquant seulement que la ministre de la culture reprenne les opérations de nomination dans le grade de conservateur général du patrimoine au titre de l’année 2022, elle est enjointe de reprendre ces opérations.

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant : https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2023-09-21/464800

Les conclusions du rapporteur public sont également peut être consulté à partir de ce lien : https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CRP/conclusion/2023-09-21/464800?download_pdf