L’ARCEP censure le blocage de l’accès, pour les opérateurs de THD, aux infrastructures publiques d’accueil (même quand existe un RIP)

Accès des opérateurs de communication à très haut débit (THD) : l’ARCEP tranche en défaveur des collectivités qui refusent l’accès à leurs infrastructures de génie civil (et qui le font au nom de l’existence déjà d’un réseau d’initiative publique).

L’accès au réseau et à ses plans doit être en l’espèce autorisé.

Mais s’impose un examen au cas par cas, rappelle l’ARCEP qui refuse dans ce dossier que la personne publique (une communauté de communes en l’espèce) se voie contrainte d’accepter par anticipation, par principe donc, toute demande ultérieure d’accès. 

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Pour faciliter le déploiement de la fibre optique, et en réduire le coût, le Code des postes et des communications électroniques (CPCE) prévoit que les gestionnaires d’infrastructures d’accueil doivent faire droit aux demandes raisonnables d’accès à leurs infrastructures émanant d’un exploitant de réseau ouvert au public à très haut débit.

Ces demandes se fondent sur les articles L. 34-8-2-1 et L. 34-8-2-2 de ce CPCE, qui, donc, imposent aux gestionnaires d’infrastructures d’accueil une obligation de faire droit à toute demande raisonnable d’accès à ces infrastructures d’accueil.

Les collectivités, de leur côté, bloquent parfois pour inciter les opérateurs à passer par les réseaux d’initiative publique (RIP ; article L. 1425-1 du CGCT) ou au nom de l’existence de ces RIP (qui dès lors feraient que le régime des articles L. 34-8-2 et suivants du CPCE ne seraient pas, selon ces collectivités, applicable).

C’est ce raisonnement qui vient d’être battu en brèche par l’ARCEP, et ce en ces termes :

« a) Sur le refus d’accès justifié par Coeur de Savoie par la disponibilité d’une offre de Fibre Optique Noire (FON)
« IELO soutient que Coeur de Savoie ne peut se prévaloir de la disponibilité d’une offre de location FON pour justifier son refus d’accès à ses infrastructures d’accueil dès lors qu’« [u]ne offre de location de FON ne saurait constituer une offre d’accès aux infrastructures d’accueil ».
« Coeur de Savoie fait valoir que « l’existence et la disponibilité [d’un] réseau entièrement maillé de FON, disséminé au sein des fourreaux, constitue une offre de gros d’accès à une infrastructure d’accueil du gestionnaire, adaptée à la fourniture de réseaux de communications électroniques à très haut débit »54. Ce faisant, la disponibilité d’une telle offre constitue, selon Coeur de Savoie un motif valable pour refuser une demande d’accès selon l’article L. 34-8-2-1 du CPCE.
« L’Autorité relève que le 22° de l’article L. 32 du CPCE précité exclut expressément la FON de la définition des infrastructures d’accueil. Dès lors, si, conformément à L. 34-8-2-1 du CPCE, la disponibilité d’une offre de gros d’accès à une infrastructure d’accueil est susceptible de justifier le refus d’accès du gestionnaire, l’offre de location de FON ne peut être regardée comme une offre de gros d’accès à une infrastructure d’accueil au sens de ces dispositions. Partant, Coeur de Savoie n’est pas fondé à se prévaloir de la disponibilité d’une offre de location de FON sur le parc d’activités Alpespace pour justifier son refus opposé à la demande de IELO.
« Au surplus, l’Autorité relève que Coeur de Savoie a précisé dans ses écritures que la disponibilité d’une offre de location FON « n’a jamais été invoquée à titre principal pour justifier le refus de déploiement » opposé à IELO par Coeur de Savoie.
« En conséquence, la disponibilité d’une offre de location FON qui n’est pas une offre de gros d’accès à des infrastructures d’accueil au sens de l’article L. 34-8-2-1 du CPCE ne permet pas de justifier le refus opposé par Coeur de Savoie à la demande de IELO.»

Dans cette affaire, où donc le demandeur est la société IELO, et le défendeur une communauté de communes, l’Arcep :

  • fait droit aux demandes de IELO sur la mise à disposition d’infrastructures d’accueil. Elle considère donc qu’il était justifié et raisonnable que la communauté de communes transmette à IELO un projet de modification de la convention dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, afin de donner accès à ce dernier au parcours demandé, ou à défaut, à un parcours d’infrastructures d’accueil alternatif permettant la desserte du client de IELO.
  • fait droit à la demande de communication des plans des infrastructures d’accueil sur le périmètre de la convention.
  • refuse en revanche de considérer comme raisonnable la demande de IELO visant à imposer à la communauté de communes d’accepter par anticipation toute demande ultérieure d’accès à ses infrastructures d’accueil qui serait formulée par IELO.

Une analyse au cas par cas s’impose donc toujours, par principe, mais il sera souvent illégal de refuser l’accès à ces ouvrages…

Après il en résulte des difficultés en cas de dommages à ces ouvrages, mais c’est une autre histoire…

 

• Décision n° 2023-2868-RDPI de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en date du 21 décembre 2023 se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant, d’une part, la société IELO-LIAZO SERVICES et, d’autre part, la Communauté de communes « Cœur de Savoie »