Protection des lieux avoisinants et démolition, mode d’emploi

L’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme permet de refuser un permis de construire (ou de le délivrer sous condition) si l’aspect du projet est tel qu’il porte atteinte à son environnement.

Rappelons en effet que, selon cette disposition « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales ». 

Cette disposition peut-elle être invoquée par une commune pour refuser d’autoriser la démolition d’un bâtiment, le projet du pétitionnaire étant de remplacer ce dernier par une nouvelle construction ?

Le Conseil d’Etat vient de tracer le chemin que doit suivre la commune dans un tel cas de figure.

Tout d’abord, il est rappelé que le recours à l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme implique de la part de la collectivité un raisonnement en deux temps :

« Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ou à la conservation des perspectives monumentales, l’autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l’assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l’existence d’une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d’apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d’évaluer, dans un second temps, l’impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site ».

Ceci étant rappelé, le Conseil d’Etat va plus loin et précise comment ce second temps du raisonnement doit s’appliquer lorsque les services instructeurs examinent une demande de permis prévoyant la démolition d’un bâtiment existant et la réalisation d’une nouvelle construction :

« Il n’en va pas différemment lorsqu’il a été fait usage de l’article L. 451-1 du code de l’urbanisme permettant que la demande de permis de construire porte à la fois sur la construction et sur la démolition d’une construction existante, lorsque cette démolition est nécessaire à cette opération. Dans un tel cas, il appartient à l’administration d’apprécier l’impact, sur le site, non de la seule démolition de la construction existante mais de son remplacement par la construction autorisée ».

Donc, lorsqu’elle est saisie d’une demande de permis de construire portant également sur la démolition d’un bâtiment et qu’elle envisage de faire application de l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme, la commune doit apprécier l’impact du projet dans son ensemble, en tenant compte des effets de la démolition envisagée mais aussi de ceux résultant de la nouvelle construction qui est projetée.

Si elle refuse le permis uniquement au motif que les effets de la démolition sur les lieux avoisinants sont excessifs, elle risque d’être sanctionnée en cas de recours.

Ref. : CE, 12 mai 2022, Société Léane, req., n° 453959. Pour lire l’arrêt, cliquer ici