Transfert de routes aux départements, régions et métropoles : fixation des modalités de calcul de la compensation financière

Ont été fixées, au JO de ce matin, les modalités de calcul de compensation financière des transferts aux départements, régions et métropoles d’un certain nombre de voiries de l’Etat, et ce en application de la loi 3DS…. Revenons sur toute cette saga avant que de parcourir ce régime financier. 

 

 

I. Rappel de ce régime

 

Les articles 38 à 41 de la loi 3DS 2022-217 du 21 février 2022 traitent des transferts aux départements, voire aux régions ou aux métropoles, de voiries non concédées relevant à ce jour de l’Etat.

Près de 10 300 km de RN étaient ainsi potentiellement  « décentralisables » selon un régime assez complexe que nous avions tenté de décortiquer via la vidéo et l’article ci-dessous :

 

Voir notamment notre vidéo détaillée de 21 mn 01 :

https://youtu.be/0rSVU6Mp-cE

 

Mais les départements, régions et métropoles n’ont pas été très motivées, ce qui fait que ce régime, sans accoucher d’une souris, devrait rester en deçà des ambitions de l’Etat :

 

Il y a deux mois, était adopté le décret n° 2022-1404 du 4 novembre 2022 relatif aux autoroutes et aux les zones assurant la continuité autoroutière dans le cadre de ce régime. Voir notre article publié alors :

 

C’est un texte plus important qui a été publié ensuite avec le décret n° 2022-1527 du 7 décembre 2022 (NOR : TRET2227391D) :

 

Aux termes de ce texte, les voiries transférées au titre de la loi 3DS et dont les opérations, non achevées, étaient inscrites dans les contrats de plan Etat région (CPER), donneront lieu à subrogation pour les départements, régions ou métropoles récupérant lesdites voiries… avec maintien des financements de l’Etat sous forme de subventions.

Pour plus de détails, voir :

 

Puis fut publié le décret n° 2022-1709 du 29 décembre 2022 relatif à la compensation financière (des transferts généraux de la loi 3DS, le régime des voiries étant en grande partie distinct) :

 

 

Vint enfin la publication au JO de la liste des autoroutes, routes et portions de voies transférées ou mises à disposition en application des articles 38 et 40 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (NOR : TRET2236986S) :

Extrait du Journal officiel électronique authentifié PDF – 227,8 Ko

Voir cette liste… bien en deçà des espoirs gouvernementaux initiaux :

II. Au JO de ce matin, la détermination des modalités de calcul de compensation financière des transferts

 

A été publié au JO de ce matin le :

  • Décret n° 2023-455 du 12 juin 2023 relatif aux modalités de calcul de compensation financière des transferts de compétences résultant des articles 38 et 40 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (NOR : TRET2308221D) que voici :

Les ressources à attribuer aux régions, aux départements, aux métropoles et à la métropole de Lyon au titre de la compensation financière des charges afférentes aux autoroutes, aux routes et aux portions de voies non concédées qui leur sont transférées ou mises à disposition sont :

« équivalentes aux dépenses consacrées par l’Etat à l’exercice des compétences transférées pendant les périodes de référence prévues aux articles 1er et 2 du décret n° 2022-1709 du 29 décembre 2022. »

Le renvoi à ce décret est pour les périodes de références (et non par exemple pour l’indexation ou pour la prise en compte ou non du FCTVA, etc. D’où de possibles débats sur certains sujets d’ailleurs selon nous).

Autrement dit :

1/ pour le calcul des charges de fonctionnement : les trois dernières années précédant le transfert de compétences.

2/ pour le calcul des charges d’investissement : les cinq dernières années précédant le transfert de compétences.

… avec ajout de l’inflation (« Les ratios financiers nationaux moyens sont établis à partir des dépenses de l’Etat mentionnées à l’article 1er et sont actualisés en fonction de l’indice des prix à la consommation hors tabac, tel que constaté à la date du transfert ou de la mise à disposition »).

Les caractéristiques des voies transférées ou mises à disposition sont appréciées au 31 décembre 2023.

La compensation financière due à chaque région, département, métropole et à la métropole de Lyon, correspondant aux charges de fonctionnement et d’investissement des autoroutes, des routes et des portions de voies non concédées qui lui sont transférées ou mises à disposition, est calculée par application de ratios financiers correspondants aux caractéristiques de ces voies.
Tout est prévu par cette annexe :
    • ANNEXE
      MÉTHODE DE CALCUL DE LA COMPENSATION FINANCIÈRE ATTRIBUÉE AUX RÉGIONS, AUX DÉPARTEMENTS, AUX MÉTROPOLES ET À LA MÉTROPOLE DE LYON

      I. – Principes de calcul de la compensation
      La compensation financière est la somme des produits calculés par catégorie de voie (cf. II) et par thématique (cf. IV) en multipliant une grandeur physique caractéristique des besoins par un ratio financier.
      Les thématiques utilisées sont relatives aux catégories de charges suivantes :
      Pour le fonctionnement :

      – l’entretien courant des chaussées, ouvrages, équipements et dépendances ;
      – l’entretien de l’immobilier technique ;
      – l’exploitation et la viabilité hivernale ;
      – l’éclairage et la ventilation des tunnels ;
      – les études, inspections et contrôles.

      Pour l’investissement :

      – l’entretien préventif et la réhabilitation des chaussées ;
      – l’entretien spécialisé et la réhabilitation des ouvrages d’art ;
      – le renouvellement des équipements d’exploitation ;
      – le renouvellement des matériels et de l’immobilier technique ;
      – les aménagements de sécurité et environnementaux.

      Les données permettant de déterminer les caractéristiques des voies transférées ou mises à disposition sont établies dans les conditions prévues au II.
      La grandeur physique à retenir pour chaque catégorie de charges est précisée au III.
      La méthode de calcul des ratios financiers, applicables à chacune des catégories de charges est décrite au IV.
      La méthode de calcul de l’actualisation des charges est décrite au V.
      II. – Catégories des voies transférées ou mises à disposition
      Les voies transférées ou mises à disposition sont réparties en 3 catégories :

      – groupe 1.A : les axes supportant des trafics moyens journaliers annuels supérieurs à 30 000 véhicules/jour aux caractéristiques fonctionnelles élevées telles que les autoroutes, les routes à chaussées séparées aux abords des grandes agglomérations ou interurbaines et remplissant un rôle de desserte locale pendulaire ;
      – groupe 1.B : les axes aux caractéristiques fonctionnelles élevées (identiques à celle du groupe 1.A) supportant un trafic moyen journalier annuel inférieur à 30 000 véhicules/jour tels que les routes assurant une liaison longue distance ;
      – groupe 2 : les routes bidirectionnelles.

      Les données relatives aux voies transférées ou mises à disposition, notamment la catégorie à laquelle appartient chaque voie sont consultables sur le site d’ouverture des données du réseau routier national.
      III. – Grandeurs physiques à retenir pour le calcul de la compensation financière
      A. – La surface de chaussées est prise en compte :

      1. Pour les travaux d’entretien courant des chaussées (nids de poules), préparatoires au renouvellement des couches de roulement et de requalification des structures de chaussées ;
      2. Pour les travaux de renouvellement, de maintenance (surveillance, entretien) et de requalification des équipements statiques (signalisation horizontale et verticale, dont les portiques potences et hauts mats dispositifs de retenue ; dispositifs de protection contre les chutes de bloc ; éclairage public ; dispositifs anti bruit ; clôtures, etc.) et des dispositifs d’assainissement ;
      3. Pour le fonctionnement, la maintenance et l’investissement des équipements dynamiques de gestion du trafic, des systèmes informatiques de gestion du trafic et de la radio d’exploitation.

      B. – La surface de tablier des ouvrages est prise en compte :

      1. Pour les travaux d’entretien courant et entretien spécialisé des ouvrages d’art ainsi que les études de réparation et les opérations « simples » ne nécessitant pas d’études d’avant-projet ;
      2. Pour les travaux de requalification des structures endommagées des ouvrages d’art (renforcement, réparation, remplacement ou reconstruction d’un ouvrage) et les opérations d’entretien spécialisé de grande ampleur rendues nécessaires par l’état particulièrement dégradé d’un ou plusieurs ouvrages.

      C. – Le linéaire de routes est pris en compte :

      1. Pour les travaux d’entretien des dépendances vertes et bleues, les mises aux normes environnementales, l’entretien et la rénovation des aires de repos et de service ;
      2. Pour les prestations de viabilité hivernale (entretien, fonctionnement, locations relatives de matériels spécifiques de viabilité hivernale, prestations effectuées par des tiers, fondants routiers, prestations d’ingénierie) ;
      3. Pour les travaux relatifs à la sécurité routière (traitement des sections de route à forte pente, interventions sur les passages à niveau, lutte contre la prise à contresens des autoroutes et routes à chaussées séparées, traitement des obstacles latéraux, lutte contre l’hypovigilance sur autoroute, aménagements pour la sécurité des agents et autres actions spécifiques de sécurité routière) et à la gestion de trafic ;
      4. Pour la maintenance et le fonctionnement des équipements radio, les dépenses d’entretien, de location, d’acquisition et de fonctionnement (carburant notamment) des matériels (engins et véhicules d’exploitation et d’entretien, véhicules de liaison) ;
      5. Pour les dépenses immobilières (fonctionnement, charges et fluides, maintenance et entretien courant, autres travaux de rénovation ou de réhabilitation) ;
      6. Pour les prestations du CEREMA.

      D. – Le linéaire de tubes est pris en compte :

      1. Pour le fonctionnement et la maintenance des équipements de sécurité des tunnels ;
      2. Pour les opérations de mise en sécurité des tunnels.

      IV. – Définition des ratios nationaux annuels
      Les ratios financiers sont définis pour chaque thématique selon les différentes catégories de voies. Les thématiques utilisées sont les suivantes :

      1. Chaussées ;
      2. Ouvrages d’art ;
      3. Equipements ;
      4. Tunnels ;
      5. Programmes thématiques (aménagements de sécurité, gestion de trafic et mesures environnementales) ;
      6. Exploitation (y compris le matériel, la viabilité hivernale, les aires de services et les dépenses centrales liées aux fréquences radio, aux prestations météorologiques, notamment) ;
      7. Prestations du CEREMA.

      Le ratio national annuel est calculé en faisant le rapport entre les dépenses, calculées et actualisées conformément aux termes du présent décret, consacrées à la thématique concernée pour l’ensemble du réseau routier national non concédé par le nombre d’unité d’œuvre des grandeurs physiques définies au III.
      Pour tenir compte de l’impact des conditions hivernales sur les chaussées, de l’impact des protections de blocs sur les routes de montagne et des dépenses importantes en matière de gestion de trafic sur les voies très circulées, un complément sera attribué :

      – pour les chaussées classées en H3 (hiver assez rigoureux), H4 (hiver rigoureux) et H5 (hiver très rigoureux) ;
      – pour les équipements des chaussées classées en H4 (hiver rigoureux) et H5 (hiver très rigoureux) ;
      – pour la gestion de trafic concernant la catégorie A1.

      V. – Calcul de l’actualisation
      Conformément aux articles 1er et 2 du décret n° 2022-1709 du 29 décembre 2022, les charges de fonctionnement et d’investissement sont actualisées en fonction de l’indice des prix à la consommation hors tabac, tel que constaté à la date du transfert.
      L’actualisation des dépenses de l’année n (Dn) se fera comme suit :
      DAn = ((IN – In) / In) * Dn
      avec : DAn = dépenses de l’année n actualisées ;
      IN = IPC hors tabac au 1er janvier de l’année de transfert ;
      In = IPC hors tabac au 1er janvier de l’année n.
      Les dépenses à prendre en compte sont ainsi égales à la moyenne sur 3 ou 5 ans des dépenses actualisées des années n concernées.