Fin des « sorties sèches » de l’ASE : suite de la mise en oeuvre de la loi Taquet, avec la définition du financement étatique de la prise en charge, par l’ASE, des jeunes majeurs

Au JO de ce matin est paru un arrêté d’application du volet de « la loi Taquet » dédié à la fin des « sorties sèches » de l’ASE (aide sociale à l’enfance)… 

Faisons-en un rapide (et incomplet, certes) survol.

I. Rappel de ce volet de la loi Taquet dédié au lancinant problème des « sorties sèches » de l’ASE pour les jeunes majeurs jusqu’à 21 ans (y compris mineurs émancipés de moins de 18 ans) et de ses premiers textes d’application pour les jeunes majeurs

II. Au JO de ce matin, est fixé le financement de l’Etat pour le maintien de la prise en charge des jeunes majeurs par l’aide sociale à l’enfance

 

 

Image par Sasin Tipchai (sur Pixabay)

 

I. Rappel de ce volet de la loi Taquet dédié au lancinant problème des « sorties sèches » de l’ASE pour les jeunes majeurs jusqu’à 21 ans (y compris mineurs émancipés de moins de 18 ans) et de ses premiers textes d’application pour les jeunes majeurs

 

La loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dite « Loi Taquet » , visait — entre autres volets importants —  à mettre fin aux fameuses « sorties sèches » de l’aide sociale à l’enfance, avec une garantie qu’aucun de ces jeunes « ne sera désormais laissé sans solution à sa majorité ». Un accompagnement systématique par les départements et par l’État est prévu par cette loi pour les jeunes majeurs jusqu’à 21 ans (y compris mineurs émancipés de moins de 18 ans).

Voir l’article 10 de cette loi Taquet :

« I.-Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa de l’article L. 112-3, les mots : « peuvent également être » sont remplacés par les mots : « sont également » ;
2° L’article L. 222-5 est ainsi modifié :
a) Après le 4°, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Les majeurs âgés de moins de vingt et un ans et les mineurs émancipés qui ne bénéficient pas de ressources ou d’un soutien familial suffisants, lorsqu’ils ont été confiés à l’aide sociale à l’enfance avant leur majorité, y compris lorsqu’ils ne bénéficient plus d’aucune prise en charge par l’aide sociale à l’enfance au moment de la décision mentionnée au premier alinéa du présent article. » ;
b) L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Peuvent être également pris en charge à titre temporaire, par le service chargé de l’aide sociale à l’enfance, les mineurs émancipés et les majeurs âgés de moins de vingt et un ans qui ne bénéficient pas de ressources ou d’un soutien familial suffisants. » ;
c) Au dernier alinéa, après la seconde occurrence du mot : « mentionnés », sont insérés les mots : « au 5° et » ;
3° L’article L. 222-5-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le dispositif mentionné à l’article L. 5131-6 du code du travail est systématiquement proposé aux personnes mentionnées au 5° de l’article L. 222-5 du présent code ainsi qu’aux majeurs âgés de moins de vingt et un ans lorsqu’ils ont été confiés à un établissement public ou à une association habilitée de la protection judiciaire de la jeunesse dans le cadre d’une mesure de placement et qu’ils ne font plus l’objet d’aucun suivi éducatif après leur majorité, qui ont besoin d’un accompagnement et remplissent les conditions d’accès à ce dispositif. »
II.-Les charges supplémentaires résultant pour les départements du 5° de l’article L. 222-5 du code de l’action sociale et des familles donnent lieu à un accompagnement financier de la part de l’Etat, dont les modalités sont déterminées par la prochaine loi de finances.»

Voir déjà à ce sujet, avant l’adoption de cette loi du 7 février 2022 :

Voir aussi sur les contrats jeune majeur :

 

 

Puis au JO du 6 août 2022, fut publié le décret n° 2022-1125 du 5 août 2022 relatif à l’accompagnement vers l’autonomie des jeunes majeurs et des mineurs émancipés ayant été confiés à l’aide sociale à l’enfance (NOR : PRMA2211505D) qui met en oeuvre ce volet de la « Loi Taquet » :

Ce décret précise donc les modalités de mise en œuvre de ce droit à l’accompagnement pour les jeunes majeurs de moins de vingt-et-un ans anciennement confiés à l’aide sociale à l’enfance instauré par la loi du 7 février 2022 relative à la protection de l’enfance. Ce régime s’applique aussi aux mineurs émancipés.

Ce texte :

  • prévoit que l’accompagnement s’appuie sur un projet pour l’autonomie devant couvrir a minima certains besoins :
    • « Art. R. 222-6. – Le président du conseil départemental complète si nécessaire, pour les personnes mentionnées au 5° de l’article L. 222-5 ayant été accueillies au titre des 1°, 2° ou 3° du même article, le projet d’accès à l’autonomie formalisé lors de l’entretien pour l’autonomie mentionné à l’article L. 222-5-1, afin de couvrir les besoins suivants :
      « 1° L’accès à des ressources financières nécessaires à un accompagnement vers l’autonomie ;
      « 2° L’accès à un logement ou un hébergement ;
      « 3° L’accès à un emploi, une formation ou un dispositif d’insertion professionnelle ;
      « 4° L’accès aux soins ;
      « 5° L’accès à un accompagnement dans les démarches administratives ;
      « 6° Un accompagnement socio-éducatif visant à consolider et à favoriser le développement physique, psychique, affectif, culturel et social.»
  • prévoit des modalités de coordination des acteurs locaux pour faciliter l’accès des jeunes majeurs accompagnés à l’ensemble des droits mobilisables en fonction de leurs projets.
    • « Art. R. 222-7. – Les mesures d’accompagnement vers l’autonomie sont décidées en concertation avec les personnes concernées, par le président du conseil départemental, en lien avec le représentant de l’Etat dans le département et les autres acteurs ayant conclu conjointement avec lui le protocole mentionné à l’article L. 222-5-2. Les mesures sont mises en œuvre avec la participation active des personnes concernées
  • prévoit un bilan à ce sujet présenté annuellement par l’observatoire départemental de la protection de l’enfance :
      • « Art. R. 222-9. – Le président du conseil départemental présente chaque année devant l’observatoire départemental de la protection de l’enfance, un bilan relatif à l’accompagnement vers l’autonomie des personnes mentionnées au 5° de l’article L. 222-5 ainsi qu’aux activités de la commission départementale d’accès à l’autonomie des jeunes majeurs. »
  • institue une commission ad hoc :

    • « Art. R. 222-8. – Il est institué, dans chaque département, une commission départementale d’accès à l’autonomie des jeunes majeurs, présidée par le président du conseil départemental, qui réunit le représentant de l’Etat dans le département, le président du conseil régional et les institutions et organismes mentionnés à l’article L. 222-5-2, aux fins d’élaborer et d’assurer le suivi de la mise en œuvre des protocoles prévus par le même article. Un arrêté conjoint du ministre chargé de l’enfance et du ministre en charge des collectivités territoriales en fixe la composition et en précise les modalités de fonctionnement.»

 

 

C’est cette commission ad hoc qui a donné lieu à :

 

Cette commission départementale d’accès à l’autonomie prévue à l’article R. 222-8 du code de l’action sociale et des familles s’en trouve :

  • présidée par le président du conseil départemental ou son représentant.
  • composée :
    1° Du représentant de l’Etat dans le département ;
    2° Du président du conseil régional ou de son représentant ;
    3° Du directeur général de l’agence régionale de santé ou de son représentant ;
    4° Du directeur départemental des services de l’éducation nationale ou de son représentant ;
    5° Du directeur territorial de la protection judiciaire de la jeunesse ou de son représentant ;
    6° Du directeur de la caisse des allocations familiales ou de son représentant ;
    7° Du directeur de la caisse primaire d’assurance maladie ou de son représentant ;
    8° Du directeur du centre régional des œuvres universitaires et scolaires ou de son représentant ;
    9° Des directeurs d’une ou de plusieurs associations gestionnaires des établissements et services de protection de l’enfance concernés par l’accès à l’autonomie ou l’accueil des majeurs de moins de vingt-et-un an ou de leurs représentants ;
    10° Du président de l’association régionale des missions locales ou de son représentant ;
    11° Du directeur régional de Pôle emploi ou de son représentant ;
    12° Du directeur de l’union régionale pour l’habitat des jeunes ou de son représentant ;
    13° Des directeurs d’un ou plusieurs centres d’information et d’orientation du département ou de leurs représentants ;
    14° Des présidents d’une ou plusieurs associations départementales mentionnées à l’article L. 224-11 du code de l’action sociale et des familles ou de leurs représentants ;
    15° D’un représentant du service intégré d’accueil et d’orientation mentionné au L. 345-2-4 du même code.

 

Le président du conseil départemental :

  • peut associer tout autre représentant de structures ou services susceptibles d’apporter des éléments utiles à l’insertion des jeunes, notamment le réseau Information jeunesse labellisé par l’Etat.
  • arrête la liste des membres de la commission départementale d’accès à l’autonomie dans le département.

Reste ensuite à fixer les missions de cette commission, ce qui est assuré par l’article 2 de l’arrêté, lequel pose que celle-ci :

  • établit un diagnostic de leurs besoins d’accompagnement social et éducatif et des ressources du territoire pouvant être sollicitées pour répondre à ces besoins.
  • organise le partenariat entre ses différents membres afin de favoriser l’accès des majeurs de moins de vingt-et-un ans visés par l’article L. 222-5-2 du code de l’action sociale et des familles à l’ensemble de leurs droits, notamment :
    1° A des ressources financières nécessaires à un accompagnement vers l’autonomie ;
    2° A un logement ou un hébergement ;
    3° A un emploi, une formation ou un dispositif d’insertion professionnelle ;
    4° Aux soins.
  • s’assure qu’un accompagnement dans les démarches administratives ainsi qu’un accompagnement socio-éducatif visant à consolider et à favoriser leur développement physique, psychique, affectif, culturel et social leur est offert.
  • coordonne les acteurs pouvant concourir à cet accompagnement vers l’autonomie et facilite l’accès aux dispositifs de droit commun pour ces jeunes majeurs et mineurs émancipés afin de privilégier le recours à ces dispositifs.
  • veille à la mise en œuvre du protocole départemental d’accès à l’autonomie mentionné à l’article L. 222-5-2 du code de l’action sociale et des familles,
  • évalue les actions mises en place dans ce cadre
  • propose des modifications de ce protocole afin de l’améliorer.
  • peut coordonner des parcours d’accompagnement individuel de majeurs de moins de vingt et un ans et des mineurs émancipés, en particulier lorsque leur situation se caractérise par une particulière complexité du point de vue de la mise en œuvre de leur projet d’insertion (à charge pour la commission de préciser les modalités de repérage et de suivi de ces jeunes.
    Lorsqu’un membre de la commission doit être mobilisé pour faciliter le parcours d’un jeune concerné, il désigne un ou plusieurs professionnels chargés de participer au suivi coordonné.

 

Cette commission se réunit au minimum deux fois par an.

II. Au JO de ce matin, est arrêté le financement de l’Etat pour le maintien de la prise en charge des jeunes majeurs par l’aide sociale à l’enfance (ASE)

 

Au JO de ce matin, se trouve :

 

Voir aussi au même JO, pour les MNA, l’arrêté du 19 septembre 2023 fixant le montant du financement exceptionnel de l’Etat pour la prise en charge des mineurs non accompagnés confiés à l’aide sociale à l’enfance sur décision de justice et pris en charge au 31 décembre 2022 (NOR : PRMA2316654A)
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000048092002

 

L’enveloppe financière ouverte par la loi du 30 décembre 2022 de finances pour 2023, au titre de l’accompagnement financier de l’Etat pour le maintien de la prise en charge des jeunes majeurs sortant de l’aide sociale à l’enfance sans ressources ni soutien familial suffisant au titre de la mise en œuvre de l’article 10 de la loi du 7 février 2022, est répartie au prorata du nombre estimé de ces jeunes précédemment confiés à chaque conseil départemental et devenant majeurs au cours de l’année 2023.
Ce nombre est estimé sur la base du nombre de jeunes de 16 à 17 ans confiés à l’aide sociale à l’enfance au 31 décembre 2021, issu de l’enquête annuelle « Aide sociale » de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques auquel est ajouté une estimation de l’évolution du nombre de mineurs non accompagnés accueillis au cours de l’année 2022 par rapport à l’année 2021, calculée à partir des informations transmises par le département au ministère de la justice en application de l’article R. 221-14 du code de l’action sociale et des familles.

 

Avec les montants que voici :

Code département Départements Montant
01 Ain 444 092 €
02 Aisne 505 974 €
03 Allier 325 182 €
04 Alpes-de-Haute-Provence 115 270 €
05 Hautes-Alpes 72 803 €
06 Alpes-Maritimes 620 030 €
07 Ardèche 265 727 €
08 Ardennes 236 606 €
09 Ariège 111 630 €
10 Aube 319 115 €
11 Aude 370 077 €
12 Aveyron 211 126 €
13 Bouches-du-Rhône 1 358 971 €
14 Calvados 633 377 €
15 Cantal 101 923 €
16 Charente 296 061 €
17 Charente-Maritime 533 881 €
18 Cher 297 275 €
19 Corrèze 155 311 €
20 Collectivité de Corse 188 072 €
21 Côte-d’Or 396 771 €
22 Côtes-d’Armor 513 254 €
23 Creuse 98 283 €
24 Dordogne 412 545 €
25 Doubs 431 959 €
26 Drôme 479 280 €
27 Eure 536 308 €
28 Eure-et-Loir 331 249 €
29 Finistère 700 113 €
30 Gard 440 452 €
31 Haute-Garonne 990 107 €
32 Gers 224 473 €
33 Gironde 1 208 513 €
34 Hérault 845 717 €
35 Ille-et-Vilaine 878 477 €
36 Indre 178 365 €
37 Indre-et-Loire 311 835 €
38 Isère 849 357 €
39 Jura 223 259 €
40 Landes 332 462 €
41 Loir-et-Cher 285 141 €
42 Loire 583 629 €
43 Haute-Loire 172 298 €
44 Loire-Atlantique 918 519 €
45 Loiret 516 894 €
46 Lot 94 643 €
47 Lot-et-Garonne 257 234 €
48 Lozère 57 029 €
49 Maine-et-Loire 655 218 €
50 Manche 389 491 €
51 Marne 240 246 €
52 Haute-Marne 154 098 €
53 Mayenne 292 421 €
54 Meurthe-et-Moselle 572 709 €
55 Meuse 160 164 €
56 Morbihan 464 719 €
57 Moselle 691 619 €
58 Nièvre 226 900 €
59 Nord 2 238 661 €
60 Oise 621 244 €
61 Orne 280 288 €
62 Pas-de-Calais 1 324 996 €
63 Puy-de-Dôme 711 033 €
64 Pyrénées-Atlantiques 537 521 €
65 Hautes-Pyrénées 173 511 €
66 Pyrénées-Orientales 277 861 €
67 & 68 Communauté d’Alsace 1 469 387 €
69D Nouveau Rhône 337 316 €
69M Métropole de Lyon 768 061 €
70 Haute-Saône 213 553 €
71 Saône-et-Loire 370 077 €
72 Sarthe 425 892 €
73 Savoie 315 475 €
74 Haute-Savoie 457 439 €
75 Paris 1 337 130 €
76 Seine-Maritime 1 242 487 €
77 Seine-et-Marne 1 013 161 €
78 Yvelines 1 111 444 €
79 Deux-Sèvres 141 964 €
80 Somme 600 616 €
81 Tarn 291 208 €
82 Tarn-et-Garonne 234 180 €
83 Var 615 177 €
84 Vaucluse 269 367 €
85 Vendée 446 518 €
86 Vienne 354 303 €
87 Haute-Vienne 285 141 €
88 Vosges 342 169 €
89 Yonne 376 144 €
90 Territoire de Belfort 148 031 €
91 Essonne 823 876 €
92 Hauts-de-Seine 1 001 027 €
93 Seine-Saint-Denis 1 401 438 €
94 Val-de-Marne 894 251 €
95 Val-d’Oise 900 318 €
971 Guadeloupe 241 460 €
972 Martinique 203 846 €
973 Guyane 128 617 €
974 La Réunion 395 558 €
976 Mayotte 150 000 €

 

 

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