PLU et réduction d’une AOP : quand faut-il obtenir l’avis conforme de la CDPENAF ?

Lorsqu’une collectivité envisage d’adopter un document d’urbanisme qui a pour effet de réduire d’une façon importante la surface d’un territoire identifié comme étant affecté à la production d’une appellation d’origine protégée (AOP), elle doit consulter la Commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) et obtenir son avis favorable.

Cette obligation est posée par l’article L. 112-1-1 du Code rural :

« Lorsqu’un projet d’élaboration, de modification ou de révision d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale a pour conséquence, dans des conditions définies par décret, une réduction substantielle des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou une atteinte substantielle aux conditions de production de l’appellation, l’autorité compétente de l’Etat saisit la commission du projet. Celui-ci ne peut être adopté qu’après avis conforme de cette commission ».

Il est important alors d’identifier correctement ce qu’est une surface affectée à la fabrication de produits bénéficiant d’une AOP pour pouvoir déterminer si un avis conforme de la CDPENAF est requis.

Par une décision rendue le 29 janvier 2024, le Conseil d’Etat vient de préciser qu’il fallait s’attacher à l’exploitation effective des surfaces protégées par une AOP et ne pas prendre en compte les surfaces qui étaient seulement susceptibles d’être utilisées au titre de cette appellation :

« 2. Aux termes de l’article L. 153-16 du code de l’urbanisme:  » Le projet de plan arrêté est soumis pour avis : / (…) / 2° A la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime lorsque le projet de plan local d’urbanisme couvre une commune ou un établissement public de coopération intercommunale situés en dehors du périmètre d’un schéma de cohérence territoriale approuvé et a pour conséquence une réduction des surfaces des espaces naturels, agricoles et forestiers « . Aux termes de l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime :  » Dans chaque département, il est créé une commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (…) Lorsqu’un projet d’élaboration, de modification ou de révision d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale a pour conséquence, dans des conditions définies par décret, une réduction substantielle des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou une atteinte substantielle aux conditions de production de l’appellation, l’autorité compétente de l’État saisit la commission du projet. Celui-ci ne peut être adopté qu’après avis conforme de cette commission « . Aux termes de l’article D. 112-1-23 du même code :  » Pour l’application du cinquième alinéa de l’article L. 112-1-1 : 1° Une réduction des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée est considérée comme substantielle lorsqu’elle porte : soit sur plus d’un pour cent de l’aire géographique de cette appellation, soit, le cas échéant, sur plus de deux pour cent de l’aire comprise dans le périmètre géographique d’une commune ou, le cas échéant, d’un établissement public de coopération intercommunale. / 2° Une atteinte aux conditions de production d’une appellation d’origine protégée est considérée comme substantielle lorsqu’elle est de nature à rendre un produit non conforme au cahier des charges de l’appellation « .

3. Pour l’application des dispositions citées au point 2, doivent être regardées comme  » des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée  » les surfaces qui sont recensées comme étant effectivement exploitées à ce titre et non celles qui seraient susceptibles de l’être au regard des prescriptions d’urbanisme applicables.

4. Pour juger que la délibération relative au plan local d’urbanisme de la commune de Thyez n’entrait dans aucune des deux hypothèses, prévues à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime, dans lesquelles la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers doit être saisie pour rendre un avis conforme, la cour administrative d’appel de Lyon a retenu que le calcul de la réduction des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée, dont l’aire géographique couvre en l’espèce tout le territoire de la commune, devait, pour l’application de ces dispositions, se fonder sur l’évolution des superficies des zones agricoles et naturelles du plan local d’urbanisme susceptibles d’être affectées à de telles productions, et non sur celle des surfaces agricoles utiles déclarées correspondant aux surfaces effectivement exploitées pour ces productions. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu’en statuant ainsi la cour a commis une erreur de droit ».

Pour savoir si elle doit recueillir un avis conforme de la CDPENAF au titre de la  réduction d’une surface couverte par une AOP, la collectivité doit donc s’attacher à la réalité du terrain.

Ref. : CE, 29 janvier 2024, Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, req., n° 470379. Pour lire l’arrêt, cliquer ici