L’histoire de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes n’a pas manquer de faire couler beaucoup d’encre depuis plusieurs années et ce n’est pas fini puisque, après la décision d’abandon du projet, la question de la résiliation du contrat de concession se règle désormais devant le juge administratif pour trancher la question de l’indemnisation due au concessionnaire, sujet sur lequel nous avions déjà fait un rappel des modalités d’indemnisation dans un pareil cas.
Dans cette affaire, la société Aéroports du Grand Ouest (ci-après AGO) a signé une concession pour la construction et l’exploitation de l’aéroport Notre-Dame-des-Landes et l’exploitation des aéroports existants de Nantes-Atlantique et Saint-Nazaire-Montoir. En janvier 2018, l’État a abandonné le projet de construction du nouvel aéroport. Par un arrêté du 24 octobre 2019, l’État a prononcé la résiliation de ladite concession.
Le deuxième alinéa de l’article 1 de l’arrêté prévoit que cette résiliation prendra effet à la plus tardive des deux dates entre la date d’entrée en vigueur de la convention de concession à conclure avec le nouveau concessionnaire des aéroports existants et la date de notification à ce dernier du certificat prévu à l’article L. 6331-3 du Code des transports.
Le jour du jugement, la nouvelle convention de concession n’a pas été conclue, de sorte que la société AGO continue à exploiter les aéroports existants en vertu du contrat de concession.
La société AGO conteste devant le Tribunal administratif de Nantes la résiliation de la convention par l’État. Elle demande, à titre principal, de déclarer l’arrêté du 24 octobre 2019 irrégulier et de résilier la convention pour faute de l’État et de condamner l’État à lui verser la somme de 1,6 milliards d’euros.
À titre subsidiaire, la société demande au tribunal de condamner l’État à lui verser la somme de 1,4 milliards d’euros en indemnisation de la résiliation pour motif d’intérêt général, à parfaire, assortie des intérêts au taux légal.
Dans cette espèce, le tribunal s’attache à déterminer si la résiliation unilatérale de la concession de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes par l’État est légale.
Dans un premier temps, le juge rejette les conclusions et les fins de non-recevoir soulevées par l’État.
Puis, s’agissant du bien-fondé de la résiliation, la juridiction considère que :
« Ainsi, cette décision, après que l’État a essayé pendant plusieurs années de mener à bien le projet prévu par la concession en dépit des fortes tensions et oppositions exprimées, tout en préservant les différents intérêts publics en présence, obéit à des considérations d’intérêt général et ne peut être regardée comme fautive ».
Dès lors, le juge considère que la résiliation de la concession est justifiée par des motifs d’intérêt général. En conséquence, le juge rejette les conclusions principales de la société, à savoir la condamnation pour faute de l’État à lui verser 1,6 milliards d’euros.
Dans un second temps, s’agissant des conclusions indemnitaires présentées à titre subsidiaire liées à la résiliation pour motif d’intérêt général, le juge estime, classiquement, que cette résiliation ouvre droit à une indemnité. Cette indemnité couvre les dépenses exposées par le concessionnaire et son manque à gagner telles que définis dans les stipulations contractuelles.
Toutefois, au jour du jugement, comme le prévoit l’article 1er de l’arrêté du 24 octobre 2019, la résiliation n’a pas encore pris effet, le calcul et le versement de l’indemnité ne pourra être effectué qu’à la date de prise d’effet de la résiliation. La société AGO n’est donc pas encore fondée à demander la condamnation de l’État à lui verser une indemnité en raison de la résiliation pour motif d’intérêt général :
« 19. Ainsi qu’elle le demande, la requérante a droit à la valeur non amortie des biens de retour tels que définis par ces stipulations. Toutefois, comme précédemment, le montant de l’indemnité due à ce titre ne pourra être fixé qu’à la date de prise d’effet de la résiliation et son versement dépend de la désignation du futur concessionnaire, lequel aura in fine la charge desdits biens, en vertu de l’annexe 1 à l’arrêté du 30 décembre 2009 relatif aux modalités de déclaration des exploitants d’aérodromes pour l’établissement du tarif passager de la taxe d’aéroport. Il y a donc lieu de surseoir également à statuer sur ce point ».
Le tribunal devra alors déterminer ultérieurement le montant de cette indemnité, en prenant en considération notamment les avantages éventuels obtenus par la société AGO ou ses sociétés actionnaires si elles sont désignées comme nouveaux concessionnaires de l’aéroport de Nantes-Atlantique.
Par conséquent, le Tribunal administratif de Nantes rejette les conclusions principales et subsidiaires de la société AGO.
Il est donc fort probable qu’il y aura un prochain acte à ce sujet devant le juge administratif à ce sujet.
Tribunal administratif de Nantes, 20 mars 2024, Société Aéroport du Grand Ouest, n°1913502
Article écrit avec la collaboration de Lou Préhu, juriste
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