Un AMI doit être impartial et s’arrêter en Tarn-et-Garonne (bref, le TA de Limoges nous décrit Fernand Naudin)

Fernand Naudin l’a prouvé dans les Tontons flingueurs : c’est un vrai AMI. Qui a quitté Montauban (Tarn-et-Garonne) et qui va aider, même post-mortem, son pote le Mexicain.

Et qui va avec impartialité distribuer les bourre-pifs entre différentes factions jusqu’à pouvoir conduire héritages et héritière à bon port. Histoire de pouvoir revenir à Montauban.

Bref, un AMI ce doit être impartial et cela doit en passer par le Tarn-et-Garonne. Surtout pour les AMI se terminant en contrats oraux avec du grisbi à la clef.

Le Tribunal administratif de Limoges, qui notamment grâce à son rapporteur public Pierre-Marie Houssais connaît ses classiques, ne dit pas autre chose : un AMI doit être impartial et il peut devoir en passer par la case Tarn-et-Garonne.

Procédons par ordre dans le cas très particulier de ces AMI qui sont des appels à manifestation d’intérêt :

  • ce que l’on appelle un « recours Tarn-et-Garonne », depuis l’arrêt éponyme, est le recours possible, directement, contre un contrat. Mais par voie de conséquence, symétriquement, les recours contre les actes détachables du contrats, tel celui qu’est une délibération autorisant à passer un contrat, ne sont plus recevables (sauf cas particuliers notamment pour leurs vices propres ou pour certains cas de conclusion de contrats de droit privé). Voir CE, Assemblée, 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, n° 358994, rec. p. 70… et la nombreuse postérité de cet arrêt, souvent commenté au sein du présent blog.
    Dans ce cadre, considérer qu’un appel à manifestation d’intérêt (AMI) doit en passer par un recours Tarn-et-Garonne n’est pas inédit (voir par exemple TA Paris, 7 février 2019, n° 1712038, Association Asie Horizon 2020, C+).
    SAUF qu’une telle position, pour le TA de Limoges, certes sans doute liée aux faits de l’espèce, faut reconnaître que c’est du brutal...

  • Car, dans un cas (pourtant très contractuel en l’espèce) de subvention, le Conseil d’Etat a posé le principe inverse (obligation d’en passer par un recours pour excès de pouvoir classique et non par un recours Tarn-et-Garonne). Voir CE, 29 mai 2019, n° 428040, publié au recueil Lebon.Autant dire que le TA de Limoges a osé le bourre-pif en plein paix jurisprudentielle.  De quoi faire exploser la vaisselle du lieu aux 4 coins de la France du droit public, façon puzzle.
  • l’autre sujet, même pour un marin, requiert moins le besoin de faire des phrases.
  • L’administration doit être impartiale. En amitiés comme ailleurs. Mais même en AMI, il ne faut pas faire trop ami-ami. De quoi y perdre son latin comme son argot ? De quoi faire perdre leurs vertus même aux jeux de mots ?
    Car dans les domaines complexes que sont les AMI (nécessairement intuitu personae me glisse Me Folace), par définition non dépourvus d’entre-soi (pour éviter le mot « amitiés ».. car là cela ferait trop de répétitions, non ?), comme celui des contrats non-écrits liant les Urgences et l’ARS… il est bien difficile d’éviter de tels écueils.

 

Voici le communiqué diffusé par le TA de Limoges :

« Par des requêtes enregistrées sous les n° 1901982 et n° 1901983, la société B et autres ont demandé au tribunal d’annuler, d’une part, les arrêtés n° 2019/48 et n° 2019/49 du 17 octobre 2019 par lesquels le directeur général de l’ARS Nouvelle-Aquitaine a délivré au GIE Urgences 19 une autorisation d’implantation sur le territoire de « Sud Corrèze » et de « Moyenne Corrèze » pour une durée de deux ans à compter du 1er novembre 2019 et, d’autre part, la décision en date du 27 septembre 2019 de la directrice de la délégation départementale de la Corrèze de l’ARS les informant du rejet de la candidature commune qu’elles ont déposée pour le lot n° 1 et pour le lot n° 2 de l’appel à manifestation d’intérêt portant sur les transports sanitaires privés à une demande d’aide médicale urgente en dehors des périodes de garde ambulancière.

« Concernant l’étendue et la recevabilité du litige, après avoir rappelé le considérant de principe issu de la jurisprudence « Département du Tarn-et-Garonne » (CE, 4 avril 2014, n° 358994, en A), et indiqué que les « autorisations d’implantation » litigieuses ne peuvent être regardées comme ayant été prises en application des articles L. 6312-2, R. 6312-1 à R. 6312-43 et R. 6313-7 du code de la santé publique relatifs à l’agrément des sociétés de transports sanitaires et aux autorisations de mise en service de véhicules de transports sanitaires, le tribunal juge que, compte tenu de la procédure particulière de sélection qui a précédé l’adoption des deux arrêtés litigieux, de leur objet, et de leurs motifs et dispositifs, ces arrêtés, qui formalisent la rencontre de l’offre déposée par le GIE Urgences 19 et de l’acceptation de cette offre par l’ARS Nouvelle-Aquitaine, manifestent, en dépit de l’absence de contrats écrits, l’existence d’une situation contractuelle portant sur l’organisation et la mise en œuvre d’une mission de service public administratif. Le tribunal en déduit que les requérantes doivent être regardées comme formant un recours en excès de pouvoir contre les arrêtés du 17 octobre 2019, irrecevable dès lors qu’il s’agit d’actes détachables de contrats, et comme contestant, par la voie d’un recours de pleine juridiction, la validité des deux contrats non-écrits liant le GIE Urgences 19 et l’ARS Nouvelle-Aquitaine pour les deux lots de l’appel à manifestation d’intérêt. Le tribunal ajoute que les requérantes ne sont pas recevables à demander l’annulation de la décision du 27 septembre 2019 puisqu’il s’agit également d’un acte détachable de contrat.

« Concernant ensuite le bien-fondé de la contestation de la validité des contrats, d’une part, le tribunal juge que les requérantes sont fondées à soutenir que l’administration a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’évaluation du critère tenant à la disposition de locaux conformes sur les secteurs de Brive et de Tulle, dès lors notamment que le dossier de candidature du GIE Urgences 19 ne comportait pas de document de nature à justifier d’un local à disposition sur le secteur concerné, et précise que, compte tenu du très faible écart de points entre les candidats classés en première et en deuxième position, cette erreur a nécessairement eu des conséquences sur le choix des offres pour les deux lots de l’appel à manifestation d’intérêt.

« D’autre part, après avoir rappelé qu’en tant que principe général du droit, le principe d’impartialité s’impose à toute autorité administrative, le tribunal juge que ce principe a été méconnu du fait de la présence d’un représentant de l’ATSU 19 dans la commission de sélection des candidatures à l’appel à manifestation d’intérêt qui s’est réunie le 19 septembre 2019, ce dernier ayant été placé dans des conditions lui permettant d’influencer l’issue de la procédure litigieuse.

« Le tribunal en conclut que, eu égard à la nature et à la gravité des vices relevés, les requérantes sont fondées à demander l’annulation des contrats non-écrits conclus entre le GIE Urgences 19 et l’ARS Nouvelle-Aquitaine pour la mise en œuvre des deux lots de l’appel à manifestation d’intérêt publié le 3 juillet 2019, sans qu’il y ait lieu de procéder à un examen de l’opportunité d’une annulation avec effet différé dans la mesure où ils ont été pleinement exécutés à la date du jugement, et rejette pour ce dernier motif les conclusions à fin d’injonction présentées par les sociétés requérantes.

« Le tribunal annule ainsi, dans son dispositif, les contrats liant le GIE Urgences 19 et l’ARS Nouvelle-Aquitaine pour la période du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2021 pour assurer la mise en œuvre des deux lots de l’appel à manifestation d’intérêt public et rejette le surplus des conclusions des requêtes. »

 

Face à de tels péchés de copinages, prions :

 

Voici cette décision sur le site du TA :

 

Si le lien ci-avant venait à être dynamité, nul besoin d’en venir à un « nervous breakdown », il suffit alors de cliquer ci-dessous :

 

Et le premier qui me sort un « ok boomer » pour mes références audiardesques, au sujet de ce jugement, j’m’en vais lui faire une ordonnance, et une sévère.