14 Juillet… en souvenir de celui de l’été 1789… ou en célébration de la fête de la Fédération de 1790 ? ou des deux ?

J’étais jeune homme que déjà le débat semblait historiquement peu clair entre ceux qui prétendent que la loi du 6 juillet 1880, par laquelle la « République adopte la date du 14 juillet comme jour de fête nationale annuelle » serait la commémoration de la prise de la Bastille à l’été 1789, et ceux qui y voyaient la célébration de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790, jour de concorde nationale comme notre histoire en compte si peu…

Il faut dire que le texte lui-même de la loi n’est pas très bavard à ce sujet :

Alors grâces soient rendues aux sites suivants de nous éclairer un peu plus à ce sujet (spoiler, à la fin on est plus savant mais on continue d’ignorer le fin mot de cette histoire, avec tout de même un rapport et des débats parlementaires qui privilégient l’interprétation consensuelle selon laquelle nous célébrons les deux) :

Citons aussi quelques extraits d’un rapport de l’Assemblée Nationale

ces rapports

« Née par étapes, entre le 4 septembre 1870, le vote des lois constitutionnelles de 1875 et l’élection d’un authentique républicain à sa présidence en 1879, la Troisième République ne célébrera pas son propre avènement, mais celui de la Révolution. Le gouvernement d’Ordre moral ayant échoué à créer une « fête de la France » non commémorative le 30 juin 1878, les républicains reprennent la date du 14 juillet qui, par la loi, est instituée fête nationale en 1880, sans que le texte n’indique d’ailleurs explicitement si l’événement commémoré est la prise de la Bastille ou la fête de la Fédération. Neuf ans plus tard, le premier centenaire de la Révolution est célébré avec faste

[…]
«La Troisième République a mis en place ce que M. Pierre Nora a appelé le « modèle classique de la commémoration nationale », reposant sur la triple affirmation de la France, de la République et de la Nation (144), à travers les cérémonies du 14 juillet et du 11 novembre, introduites par le Parlement qui, comme cela a déjà été indiqué, est à l’origine de ces deux cérémonies.

Le 14 juillet, qui célèbre l’unité d’un peuple autour de la nation mise en scène par la fête de la Fédération de 1790, est au cœur de la culture républicaine de la commémoration. Le 14 juillet est d’ailleurs la fête de la République, instituée par l’article unique de la loi du 6 juillet 1880 : « la République adopte comme jour de fête nationale annuelle le 14 juillet » (145). Comme le rappelait M. Henri Martin, rapporteur du projet de loi au Sénat, lors de la séance du 29 juin 1880, « ce jour là, le 14 juillet 1790 (…) la révolution a donné à la France la conscience d’elle-même ».

Le fait que cette date soit souvent confondue avec celle de la prise de la Bastille n’a rien d’étonnant car dès l’origine, le 14 juillet est une date « bicéphale » : pour les vrais républicains, c’est au 14 juillet 1789 que la fête nationale rend hommage, la fête de la fédération n’étant que la réplique de l’événement historique et symbolique survenu aux premiers jours de la Révolution (146). Péguy l’a fort bien exprimé dans son ouvrage Clio : « La prise de la Bastille, dit l’histoire, ce fut proprement une fête, ce fut la première célébration, la première commémoration et pour ainsi dire le premier anniversaire de la prise de la Bastille (…) Ce n’est pas la fête de la Fédération qui fut la première commémoration, le premier anniversaire de la prise de la Bastille. C’est la prise de la Bastille qui fut la première fête de la Fédération, une Fédération avant la lettre ».

La commémoration de la prise de la Bastille est donc un choix volontaire de la part des fondateurs de la Troisième République : ce jour là, les Français ont été libérés des chaînes de l’ancien régime et leur égalité politique et juridique est devenue une réalité. Le 14 juillet est notre « date-souvenir » la plus importante, car elle nous rappelle, chaque année, ce qui fonde notre identité politique en réaffirmant les principes de liberté, d’égalité et de fraternité que la prise de la Bastille a concrétisés. Gambetta, en utilisant un terme religieux, a synthétisé, dans un discours prononcé le 14 juillet 1872 à La Ferté-sous-Jouarre, le sentiment de régénération inséparable du 14 juillet : « c’est la vraie date révolutionnaire, celle qui a fait tressaillir la France (…) On comprend que ce jour-là notre Nouveau Testament nous a été donné et que tout doit en découler ».

[…]

Source : rapport n° 1262 A.N. au nom de la mission d’information sur les questions mémorielles, en date du 18 novembre 2008
https://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i1262.asp