Le placement en CITIS est un acte créateur de droit ne pouvant être retiré que dans un délai de 4 mois, sauf s’il est prononcé à titre provisoire.

Par un arrêt Mme A… c/ commune de Saint-Laurent-de-la-Salanque en date du 3 novembre 2023 (req. n° 465818), le Conseil d’État a considéré que la reconnaissance par l’administration de l’imputabilité au service d’une maladie ou d’un accident et, par voie de conséquence, l’octroi à l’agent intéressé d’un congé pour invalidité imputable au service (CITIS), est une décision créatrice de droit qui ne peut être retiré, dans le cas où elle serait illégale, que dans un délai de quatre mois.

Il en va toutefois différemment, si l’administration fait usage de la possibilité qui lui est offerte, lorsqu’elle n’est pas en mesure d’instruire la demande de l’agent dans les délais impartis, de le placer en CITIS à titre seulement provisoire et que la décision précise qu’elle peut être retirée. Dans ce cas, un tel placement en CITIS à titre provisoire ne vaut pas reconnaissance d’imputabilité, et ppeut être retiré si, au terme de l’instruction de la demande de l’agent, cette imputabilité n’est pas reconnue.

Mme B… A…, puéricultrice hors classe, exerçant les fonctions de directrice de crèche au sein de la commune de Saint-Laurent-de-la-Salanque, a été victime d’un accident reconnu imputable au service le 29 novembre 2019, dont la date de consolidation a été fixée au 1er avril 2021. A compter du 25 mai 2021, Mme A… s’est vu délivrer de nouveaux arrêts de travail, renouvelés à plusieurs reprises, pour des troubles qu’elle impute à une rechute de cet accident du travail. Le maire de Saint-Laurent-de-la-Salanque, par un arrêté du 19 août 2021, a placé Mme A… en CITIS à compter du 31 juillet 2021, pour une durée initiale d’un mois, prolongée par plusieurs arrêtés successifs. Toutefois, à la suite d’un avis défavorable émis le 30 mars 2022 par le comité médical départemental sur l’imputabilité au service de l’arrêt de travail et des soins depuis le 25 mai 2021, le maire de Saint-Laurent-de-la-Salanque, par arrêté du 25 avril 2022, a refusé de reconnaître imputable au service la rechute, a retiré les arrêtés ayant placé Mme A… en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter de cette date et a placé l’intéressée en congé de maladie ordinaire du 25 mai 2021 au 6 mai 2022.

Le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ayant rejeté sa demande tendant, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l’arrêté du 25 avril 2022, Mme A… s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’État.

Pour statuer, le Conseil d’État précise les règles applicables en ces termes : « Il résulte de l’article 37-9 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 que lorsque l’administration décide de placer un agent en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS), elle doit être regardée comme ayant, au terme de son instruction, reconnu l’imputabilité au service de l’accident ou de la maladie à l’origine de cette invalidité temporaire. Cette décision est créatrice de droits au profit de l’agent. Par suite, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande de l’agent, l’autorité territoriale ne peut retirer ou abroger un tel arrêté, s’il est illégal, que dans le délai de quatre mois suivant son adoption, et ne saurait ultérieurement, en l’absence de fraude, remettre en cause l’imputabilité au service ainsi reconnue. Tel n’est pas le cas, toutefois, lorsque cette autorité, en application de l’article 37-5 du décret du 30 juillet 1987, a entendu faire usage de la possibilité qui lui est offerte, lorsqu’elle n’est pas en mesure d’instruire la demande de l’agent dans les délais impartis, de le placer en CITIS à titre seulement provisoire et que la décision précise qu’elle peut être retirée dans les conditions prévues à l’article 37-9 du décret du 30 juillet 1987, un tel placement en CITIS à titre provisoire ne valant pas reconnaissance d’imputabilité, et pouvant être retiré si, au terme de l’instruction de la demande de l’agent, cette imputabilité n’est pas reconnue. »

En l’espèce, le Conseil d’État relève «  que l’arrêté du 19 août 2021 plaçant Mme A… en congé pour invalidité temporaire imputable au service ne précise pas que cette décision pouvait être retirée dans les conditions prévues à l’article 37-9 du décret du 30 juillet 1987. Dès lors, […] cet arrêté ne peut être regardé comme ayant placé Mme A… en congé pour invalidité temporaire imputable au service à titre seulement provisoire, et doit être regardé comme reconnaissant l’imputabilité au service de sa rechute. Dès lors, le maire de Saint-Laurent-de-la-Salanque ne pouvait légalement, plus de quatre mois après cette décision créatrice de droits, remettre en cause l’imputabilité ainsi reconnue. Il ne pouvait donc légalement, par son arrêté du 25 avril 2022, retirer l’arrêté du 19 août 2021 plaçant Mme A… en congé pour invalidité temporaire imputable au service. Il ne pouvait davantage retirer, en tout état de cause, au seul motif que la commune refusait de reconnaître l’imputabilité au service de la rechute de Mme A…, les arrêtés ultérieurs ayant prolongé ce congé. »

Le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a donc commis une erreur de droit en jugeant que le moyen tiré de la rétroactivité illégale de l’arrêté du 25 avril 2022 n’était pas de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité.

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :

https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2023-11-03/465818