Fruits de notre histoire administrative, les sections de commune sont des entités juridiques regroupant certaines habitants d’une commune (bien souvent, il s’agit des habitants d’un hameau distant du centre de la commune). Dotées de la personnalité juridique au terme de l’article L. 2411-1 du Code général des collectivités territoriales, les sections de commune sont propriétaires de biens ou de droits propres, notamment de parties de forêts situées sur leur territoire.
Dans certaines sections, un usage – parfois ancien – voulait que les revenus provenant des ventes de coupes de bois soient directement partagés entre les membres de la section sur le territoire de laquelle les coupes étaient pratiquées.
La légalité de cette pratique est demeurée longtemps incertaine, même si certaines décisions de Tribunaux administratifs penchaient déjà dans le sens son illégalité (v. par exemple : TA Grenoble, Ord. ref., 4 décembre 2009, Section de commune des Sermes et Planey, req., n° 0904302).
Désormais l’illégalité de cette pratique ne fait plus aucun doute, le Conseil d’Etat venant de la condamner dans des termes particulièrement nets :
“Il résulte de l’ensemble des dispositions citées aux points 3 et 4 qu’une section de commune est une personne morale de droit public possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune et que, si les membres de la section ont, dans les conditions résultant soit des décisions des autorités municipales, soit des usages locaux, la jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature, ils ne sont pas titulaires d’un droit de propriété sur ces biens ou ces droits. Les revenus en espèces, qui doivent être affectés en priorité à la prise en charge des dépenses relatives à la mise en valeur et à l’entretien des biens de la section ainsi qu’aux équipements correspondants, doivent être employés dans l’intérêt exclusif de cette personne publique qui ne peut, en principe, les redistribuer entre ses ayants droit”.
Ce n’est qu’à titre exceptionnel, et à la condition d’être clairement motivée, que la commune peut décider de déroger à cette interdiction :
“Toutefois, un conseil municipal peut décider de ne pas partager en nature une coupe de bois d’affouage entre les titulaires du droit d’affouage mais d’en vendre tout ou partie, soit au profit du budget communal pour un emploi dans l’intérêt de la section, soit à titre dérogatoire au profit des membres de la section titulaires du droit d’affouage. A cette fin et quels qu’aient pu être les facteurs naturels à l’origine de la décision de coupe, le conseil municipal doit préalablement, d’une part, affecter à l’affouage la coupe dont il envisage la vente en fonction de la quantité de bois propre à satisfaire la consommation rurale et domestique des titulaires du droit d’affouage et selon un mode de partage déterminé et, d’autre part, arrêter les délais et les modalités d’exécution et de financement de l’exploitation de cette coupe. Il doit, également, préciser les motifs pour lesquels, le cas échéant, il ne destine pas tout ou partie du produit de la vente au budget communal mais le réserve aux membres de la section titulaires du droit d’affouage”.
Même si elles sont distinctes de la commune à laquelle elles sont rattachées, les sections de commune n’en demeurent pas moins des personnes publiques : leurs recettes doivent donc être utilisées pour satisfaire des besoins d’intérêt public (qui peuvent être ceux de la section) et non pour enrichir le patrimoine privé de leurs membres.
Ref. : CE, 2 mai 2018, Commune de Chanaleilles, req., n° 392497. Pour lire l’arrêt, cliquer ici.