Zones humides : la nouvelle définition confortée, mais pour l’avenir seulement

Zones humides : le Conseil d’Etat valide la nouvelle définition… Revenons sur cette saga avec le droit révolutionné par le Conseil d’Etat en 2017 (I), corrigé par la loi en 2019 (II), puis maintenant conforté par le juge administratif (III), mais pour l’avenir seulement comme le juge l’affirme mais aussi comme des débats parlementaires en cours le prévoient (IV).

 

 

I. le droit révolutionné par le Conseil d’Etat en 2017

 

Aux termes de l’article L. 211-1, §I/1°, du code de l’environnement, on entendait par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année.

 

Un arrêté du 24 juin 2008 définissait une zone comme humide si celle-ci présentait l’un seulement de ces deux critères (sol ou végétation)… alors que le Conseil d’État avait ensuite exigé (22 février 2017, n° 386325) la réunion de ces deux critères :

« qu’une zone humide ne peut être caractérisée, lorsque de la végétation y existe, que par la présence simultanée de sols habituellement inondés ou gorgés d’eau et, pendant au moins une partie de l’année, de plantes hygrophiles. »

Ces deux critères étant bien :

« cumulatifs, (…) contrairement d’ailleurs à ce que retient l’arrêté (interministériel) du 24 juin 2008 précisant les critères de définition des zones humides en application des articles L. 214-7-1 et R. 211-108 du code de l’environnement. »

 

Ce n’est pas un mais deux articles (quand on aime…) que le présent blog avait consacré à la nouvelle définition des zones humides brossée par le Conseil d’Etat par cet arrêt du 22 février 2017 :

 

Voir aussi (Nouvelle diffusion du rapport sur les zones humides protégées / RAMSAR).

 

Les services de l’Etat ont d’ailleurs vite ajusté le tir par la Note technique du 26 juin 2017 relative à la caractérisation des zones humides (NOR : TREL1711655N) que voici :

 

 

II. Une heureuse correction législative en 2019

 

C’est peu de dire que le monde de l’environnement s’était un ému de cette restriction de la notion de zone humide faite par le Conseil d’Etat, à la faveur il est vrai d’un texte législatif disons, mal rédigé.

Puis via le projet de loi Office français de la biodiversité, nous avons pu revenir au statu quoi ante, à la faveur de l’article 23 de la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019.

En une mini-vidéo de 3mn32, Me Eric Landot fait le point sur ce sujet aux enjeux environnementaux et d’aménagement majeurs :

 

 

 

III. Une confirmation jurisprudentielle

 

Par une décision en date du 17 juin 2020, le Conseil d’Etat a rejeté une demande de QPC formée en ce domaine.

La société requérante soutenait que :

  • les dispositions de l’article 23 de la loi du 24 juillet 2019 modifieraient les dispositions du 1° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement relatives à la définition d’une zone humide, portent atteinte au droit à un procès équitable garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, faute de comporter des dispositions transitoires.
    … ce qui a été rejeté par le Conseil d’Etat (au nom de la non rétroactivité de ladite loi).
  • les dispositions contestées méconnaîtraient les stipulations de l’article 7 de la Charte de l’environnement en ce qu’elles ont été adoptées sans la participation du public et sans que celui-ci ait été informé de leurs incidences sur l’environnement. Toutefois, le Conseil d’Etat pose que le grief tiré de la méconnaissance de la procédure d’adoption d’une loi ne peut, en tout état de cause, être invoqué à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution.

 

Source : CE, 17 juin 2020, n° 438062 :

http://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2020-06-17/438062

 

 

IV. le Conseil d’Etat valide la nouvelle définition… mais tant le juge que les débats parlementaires confirment que c’est bien pour l’avenir, uniquement, que s’applique cette nouvelle définition

 

Cette nouvelle décision précise, discrètement mais nettement, que la nouvelle loi ne s’applique pas aux litiges antérieurs (ce qui va un peu de soi en droit à vrai dire en l’état de la rédaction de la loi).

Le projet de loi « ASAP » (commenté ici, sur notre site,lors de son début d’examen…) est en cours de débats parlementaires, lesquels ont schématiquement été interrompus par la crise sanitaire. En première lecture, ce projet de loi a été complété par le Sénat par l‘amendement, adopté, que voici :

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