Une procédure d’hospitalisation d’office (HO) est toujours un calvaire juridique pour les personnes, certes, mais aussi pour l’administration.
Pour les policiers municipaux qui gèrent souvent ces urgences et pour les maires ou leurs adjoints qui prennent des arrêtés de police… non pas d’hospitalisation d’office (HO), mais de mesures préalables à une possible HO (à ne pas confondre…)… il importe de prendre garde aux nombreuses bourdes possibles. Par exemple la notoriété publique n’est plus un cas de prise d’un tel arrêté. Les médecins qui font un certificat alors qu’ils n’ont pas vu le patient depuis longtemps peuvent se retrouver à commettre une faute disciplinaire…
Et une autre bévue usuelle consiste à se contenter, dans l’arrêté municipal, de renvoyer sans autre forme de procès au certificat médical… bévue bien logique car l’édile hésite à se substituer aux propos du médecin. Mais une telle bévue s’avère dangereuse. Car la Cour de cassation, confirmant la jurisprudence antérieure du Conseil d’Etat, vient de rappeler avec force que la motivation de l’arrêté doit, sauf urgence absolue, répondre aux canons de la beauté juridique en ce domaine (ceux de l’article L.211-2 du code des relations entre le public et l’administration).
Une motivation circonstanciée, un peu détaillée, s’impose donc :
« 16. Selon l’article L. 211-2, 1°, du code des relations entre le public et l’administration, doivent être motivées les décisions qui restreignent l’exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police.
« 17. Selon l’article L. 211-5 du même code, la motivation ainsi exigée doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.
« 18. Selon l’article L. 211-6, lorsque l’urgence absolue a empêché qu’une décision soit motivée, le défaut de motivation n’entache pas d’illégalité cette décision.
« 19. Il résulte de ces dispositions que le maire ou, à [Localité 2], le commissaire de police, lorsqu’il prononce une mesure d’hospitalisation d’office à titre provisoire, doit indiquer dans sa décision les éléments de droit et de fait qui justifient cette mesure, sauf urgence absolue l’en ayant empêché, et que, s’il peut satisfaire à cette exigence de motivation en se référant à un avis médical, c’est à la condition de s’en approprier le contenu et de joindre cet avis à la décision.
« 20. Ayant relevé, d’une part, que l’arrêté municipal du 27 mai 2014 ne mentionnait pas le moindre élément, laissant à penser que M. [C] était dangereux, d’autre part, que s’il visait le certificat d’un expert psychiatre, il ne précisait pas s’en approprier le contenu et n’indiquait pas que l’avis de ce praticien était joint à la décision, la cour d’appel a pu en déduire qu’il était insuffisamment motivé, et partant, irrégulier. »
Bravo à l’Observatoire responsabilité de la SMACL qui a identifié cet arrêt avant nous et l’a commenté avec moult précisions :
Source : Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 29 septembre 2021, 20-14.611, Publié au bulletin
Voir aussi :
- 4 mois et 19 jours d’hospitalisation d’office avec des vices, surtout de légalité externe peuvent conduire à… 54 930 € de responsabilité de l’Etat (et, ce, sans passer par la case « juge administratif », et ce même si la légalité de cette HO n’a pas en son temps été contestée)
- Hospitalisation d’office : le certificat médical peut bien être transmis, par le psychiatre, aux autorités de police administrative (maire ; préfet…)
- Hospitalisation sans consentement et contentieux judiciaire : le juge d’appel doit accueillir la plupart des moyens nouveaux
- Sortie d’un régime d’hospitalisation sans consentement : le juge judiciaire est compétent s’il s’agit d’apprécier la faute d’un établissement psychiatrique privé
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