Quand nos concitoyens croient que les forfaitures d’un tribunal aux ordres en 1940… peuvent remettre en cause le droit en 2022 !? (@AjacCon)

Le 2 août 1940, le tribunal militaire permanent de la 13e région siégeant à Clermont-Ferrand (et après quelques péripéties contentieuses, voir ici) :

« condamne par contumace le colonel d’infanterie breveté d’état-major en retraite de Gaulle, Charles, André, Joseph, Marie, susqualifié, à la majorité des voix, à la peine de mort, à la dégradation militaire, et ordonne la confiscation des biens meubles et immeubles du condamné ».

… avec privation des droits civiques (semble-t-il).

Le chef de la France libre fera une magnifique réponse à cette vilénie :

« Les vieillards qui se soignent à Vichy emploient leur temps et la passion à faire condamner ceux qui sont coupables de continuer à combattre pour la France » (source voir ici).

Or, voici que ce sinistre jugement est aujourd’hui utilisé de manière comique par d’incertains pour remettre en cause toutes nos institutions.

Gloire sur ce point soit rendue à l’hilarant fil twitter AJAC (je cite « arguments juridiques à la con ») qui dégotte à longueur de journées des tweets absolument idiots en droit. Mais qui là nous a trouvé une perle :

https://twitter.com/AjacCon/status/1488981944733949952

Magnifique. Enorme. Du grand n’importe quoi qui remonte jusqu’à la Cour de cassation…

Voici l’arrêt intégral :

 

Avec ces extraits qui seraient très comiques si de telles absurdités ne revenaient pas nombreuses ces temps-ci avec un petit goût de vert-de-gris rance, moisi depuis 80 longues années… Ce qui suit est la liste des QPC déposées :

«Attendu que la première question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« L’acte dit « ordonnance du 2 novembre 1945 portant statut des huissiers de justice » est contraire à la constitution en ce qu’il est pris comme prétendu acte législatif par un homme se disant « président du gouvernement provisoire de la République française » alors qu’aucune constitution ni aucune élection ne l’a jamais nommé à cette fonction, et que par ailleurs, il était à la date du 2 novembre 1945, définitivement condamné par le jugement du 2 août 1940 de la 13ème région militaire à Clermont-Ferrand à la peine de mort, assortie des privations des droits civils, civiques et de famille, et donc inéligible a toute fonction publique! » ;

Attendu que la deuxième question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« L’acte dit « ordonnance n° 58-1296 modifiant le code de procédure pénale » qui a, entre autres, institué les articles 550 à 566 du code de procédure pénale régissant la signification des actes de procédure pénale, est contraire à la constitution en ce qu’il est pris comme prétendu acte législatif par un homme se disant « président du conseil des ministres » alors qu’ il était à la date du 23 décembre 1958, définitivement condamne par le jugement du 2 août 1940 de la 13 ème région militaire à Clermont-Ferrand à la peine de mort, assortie des privations des droits civils, civiques et de famille, et donc inéligible a toute fonction publique! » ;

Attendu que la troisième question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« L’acte dit « ordonnance n° 58-1270 portant loi organique sur le statut de la magistrature » est contraire à la constitution en ce qu’il est pris comme prétendu acte législatif par un homme se disant « président du conseil des ministres » alors qu’il était définitivement condamné par le jugement du 2 août 1940 de la 13ème région militaire à Clermont-Ferrand a la peine de mort, assortie des privations des droits civils, civiques et de famille, et donc inéligible a toute fonction publique! En conséquence, les prétendues « ordonnances législatives » du 2 novembre 1945, n° 58-1296 et n°58-1270 doivent non seulement être immédiatement abrogées, mais déclarées faux en écriture publique, annulées et effacées de toutes archives publiques, y compris le Jorf, et le parlement devra consacrer d’urgence ses prochaines séances à leur remplacement » ;

Attendu que la quatrième question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les articles 395 et suivants cpp instituant la procédure barbare de « comparution immédiate » transforment la police et les procureurs en diktateurs ayant pouvoir de détenir quiconque sur la foi de leur simple suspicion, avec tous les abus les plus ignobles et criminels que ceci comporte! Il faut donc immédiatement abroger pour anticonstitutionnalité des articles barbares 395, 396, 397, 397-1, 397-2, 397-3, 397-3-1, 397-4 code de procédure pénale ! » ;

Attendu que la cinquième question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Pour les mêmes raisons qu’en n° 4, la procédure barbare de « garde a vue » doit être immédiatement abrogée, car la police ne peut pas détenir les gens à seule fin de rédiger des pv de prétendue « culpabilité », grâce à des procédés de torture physique et psychologique purs et simples, sans jugement aucun !
Il faut abolir les barbares articles 53 à 78 code de procédure pénale qui donnent pouvoir au procureur et à la police prétendue « judiciaire » de détenir et torturer quiconque pour soi-disant « découvrir » des délits et crimes alors qu’on leur donne carte blanche pour commettre eux-mêmes tous délits et crimes impunément, contre n’importe qui, sans aucune raison !
Halte à la diktature et au fascisme des bureaucrates de la ripoublik, sous couvert de « justice » !
Nous sommes des êtres humains libres, et non pas les esclaves de la police et des fonctionnaires du ministère de la prétendue « justice » de la ripoublik fasciste et bannière de France ! » ;

 

Faire une QPC pour que le Conseil constitutionnel de la Ve  reconnaisse l’inconstitutionnalité de mesures du quotidien (dont certaines réglementaires) au nom de l’inconstitutionnalité de la… Constitution… qui serait due à des actes qui ne sont pas matriciels des actes suivants… c’était en effet à tout le moins osé.

Trêve de comique troupier façon feldgrau. Car en droit on va rappeler une base.

Durant le régime de l’Etat français à Vichy (1940-1944)… Qui était dépositaire « de la souveraineté nationale » ? Qui a « assuré la continuité de la République » ? Voici la réponse du Conseil d’Etat (à l’occasion d’une affaire relative à la notion d’archives publiques).

La réponse a été donnée :

Voir aussi : https://www.conseil-etat.fr/actualites/discours-et-interventions/retablir-la-legalite-republicaine

Et au pire du pire contester l’éligibilité du Général de Gaulle ne saurait entraîner par exception d’illégalité (pour les non juristes : effet domino) la chute de tout notre édifice institutionnel.

Reste la question. La vraie question. Faut-il en rire ? ou en pleurer ?