Quand de mauvaises relations entre le maire et un agent conduisent à la reconnaissance d’une maladie professionnelle.

Par un jugement n° 2001767, Mme B. c/ commune d’Ussac, en date du 28 décembre 2022, le tribunal administratif de Limoges a considéré que le trouble anxio-dépressif réactionnel d’un agent communal consécutif à une altercation avec le maire caractérise une maladie professionnelle dès lors que celui-ci est directement lié à l’environnement délétère dans lequel elle a exercé́ ses fonctions, en particulier au conflit relationnel qui l’a opposée au maire de cette commune.

Mme B…, fonctionnaire au sein de la commune d’Ussac, s’est vu prescrire, le 3 décembre 2014, à la suite d’une altercation avec le maire de cette commune, un arrêt de travail pour « déprime, surmenage et problèmes relationnels au travail ». Cet arrêt de travail a été prolongé à plusieurs reprises par la suite, sans discontinuité́. Malgré l’avis favorable émis par la commission de réforme, le maire de la commune d’Ussac a, par un arrêté́ du 20 février 2015, refusé de reconnaître l’altercation du 3 décembre 2014 comme un accident de service et l’imputabilité́ au service des congés pour raisons de santé qui ont suivi.

Après avoir tenté en vain de faire reconnaître par le juge administratif son congé de maladie comme imputable au service, Mme B. a, par un courrier du 15 janvier 2020, demandé à ce que sa maladie soit reconnue comme maladie professionnelle. A la demande de la commune d’Ussac, qui par un courrier du 19 février 2020 l’a invitée à compléter sa demande, elle a déposé́, le 5 mars 2020, une « déclaration de maladie professionnelle » qu’elle a datée du 3 décembre 2014.

Par une décision du 15 juillet 2020, le maire de la commune d’Ussac lui a indiqué́ qu’il ne pouvait faire droit à sa demande au motif que la déclaration de maladie professionnelle avait été adressée au-delà̀ du délai de deux ans prévu au II de l’article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 tel que modifié par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019. Par un courrier du 31 juillet 2020, Mme B… a formé un recours gracieux contre cette décision. Ce recours gracieux a été rejeté́ par une décision du 12 novembre 2020. Par cette requête, Mme B… demande l’annulation de cette décision du 12 novembre 2020 ainsi que  de la décision initiale du 15 juillet 2020.

Le tribunal administratif lui a donné raison.

En premier lieu, il concerne que c’est à tort que le maire a opposé à Mme B. le délai de ans prévu par le décret du 30 juillet 1987 dans sa rédaction issue du décret du 10 avril 2019. En effet, relève le jugement, « dans la mesure où les droits des agents en matière d’accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l’accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la situation de Mme B…, dont le trouble anxio-dépressif réactionnel a été médicalement constaté pour la première fois le 3 décembre 2014, soit avant le 13 avril 2019, était exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues par les dispositions de l’article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, et non celles énoncées par l’article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et les articles 37-1 et suivants du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 créés par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019. » Le délai de deux ans prévu au II de l’article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 n’était donc pas applicable à la situation de Mme B….

En second, sur le fond, le tribunal rappelle tout d’abord qu’une « maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service. »

Or, constate le tribunal au vu des pièces du dossier, « le trouble anxio-dépressif réactionnel présenté par Mme B…, qui a justifié des arrêts de travail sans discontinuité́ à compter du 3 décembre 2014 à la suite d’une altercation du même jour avec le maire de la commune d’Ussac, est directement lié à l’environnement délétère dans lequel elle a exercé́ ses fonctions, en particulier au conflit relationnel qui l’a opposée au maire de cette commune. Ce trouble anxio-dépressif réactionnel, dont l’apparition et la persistance ne résultent pas d’un état antérieur, constitue donc une maladie professionnelle. »

Ce jugement peut être consulté à partir du lien suivant :

http://limoges.tribunal-administratif.fr/content/download/210325/2016095/version/1/file/201767.pdf