La rue Cambon se hasarde à traiter de la gestion publique des risques. Un exercice non sans dangers :
- avec un péril évité par la Cour des comptes selon moi, qui était d’être trop général dans ses propos… car ce travers, si la Cour s’y est (logiquement) abîmée dans sa « synthèse » voire (et c’est plus regrettable) dans ses « recommandations » , n’a pas été à déplorer s’agissant du rapport intégral, ni même du référé à la Première Ministre
- avec un risque patent de se prendre un retour de bâton au stade de la réponse de la Première Ministre… risque qui n’a pas été obvié en l’espèce
- avec sur le fond la difficulté d’avoir à trancher entre la promotion d’outils précis, mais trop limités ou trop sectoriels, ou de grandes planifications ou cartographies qui intègrent divers dangers mais qui peuvent être trop généraux et, même, déresponsabiliser des acteurs sectoriels. La Cour des comptes tend à penser que c’est sur ce second volet singulièrement que nous avons, ou aurions, des manques.
La gestion publique des risques correspond à un large spectre ainsi représenté séquentiellement par la Cour des comptes quand on en soustrait la gestion des crises elles-même, qui relève d’autres problématiques sur le terrain :
Avec un grand nombre d’acteurs du coté de l’Etat (et d’outils) :
Avec l’éternel débat : à prendre des outils très larges (ex PPRNM) on coordonne la prise en compte des risques mais on risque de ne pas être assez spécifique… et à développer des outils ad hoc on risque de ne pas prendre assez en compte des effets croisés (par exemple effets croisés d’inondations combinés à un risque de submersion marine, façon Katrina aux Etats-Unis… selon une matrice de risques qui en France aussi s’avère souvent peu coordonnée dans certains territoires).
Le rapport publié par la Cour s’attache à analyser concrètement la gouvernance de la gestion publique des risques, les processus qu’elle met en œuvre et les conditions de son adaptation à l’évolution des risques.
Avec le recommandations suivantes (que je trouve pertinentes, sans conteste, mais un peu floues, ou en tous cas très « macro », ce qui contraste avec les développements point par point du rapport intégral qui, eux, s’avèrent précis et concrets) :
- Rationaliser les dispositifs sectoriels de gestion des risques
1. Réviser les dispositifs sectoriels de gestion des risques et leur documentation, afin de les rendre plus efficients et de mieux les articuler .
2. Exploiter les données quantitatives collectées afin d’adapter les dispositifs de gestion de risques aux particularités, notamment géographiques, de ces derniers et de mieux évaluer leur efficacité . À cet effet, rationaliser et ouvrir les systèmes d’information sectoriels mis en œuvre pour la collecte et le traitement des données, afin de rendre possible leur exploitation dans un cadre interministériel ou par d’autres filières sectorielles
- Améliorer la vision d’ensemble de la puissance publique sur les risques qu’elle supporte et sur les moyens qu’elle met en œuvre pour les gérer
3.Définir, mettre à jour et publier tous les cinq ans une carte globale des risques auxquels la Nation est exposée, le coût de leur gestion pour l’ensemble des acteurs impliqués et le niveau des risques résiduels .
4.Établir un « responsable de la gestion des risques par l’État » rattaché au Premier ministre, chargé de coordonner et d’harmoniser les dispositifs sectoriels de gestion des risques .
- Voir plus loin et plus large afin d’organiser globalement la résilience de la Nation
5. Compléter les travaux de cartographie des risques par un exercice de prospective visant à actualiser la connaissance des risques systémiques émergents ou de longue échéance .
6. Recenser et caractériser les services d’importance vitale et les approvisionnements de biens stratégiques qui conditionnent l’action des pouvoirs publics, et renforcer les mesures visant à garantir l’accès à ces biens et services .
7.Définir et mettre en place une organisation nationale et territoriale à même de mettre en œuvre la stratégie nationale de résilience .
8. Généraliser la sensibilisation et la formation des agents publics aux risques et à leur gestion .
A noter une tonalité très différente dans le référé (au sens de cette expression dans le monde des juridictions financières) adressé à la Première ministre avec trois titres chocs beaucoup plus offensifs et bien plus étroits, en termes d’angle d’attaque, que ce qui se trouve dans le rapport :
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L’ACTION DU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE ET DE LASÉCURITÉ NATIONALE (SGDSN) EST EFFECTIVE POUR PLANIFIER LARÉPONSE AUX CRISES LES PLUS GRAVES, MAIS SON EFFICACITÉ ESTLIMITÉE PAR L’INTÉRÊT INSUFFISANT QU’Y PORTENT LES MINISTÈRESCONCERNÉS
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FAUTE DE COORDINATION, LA CONNAISSANCE ET LA PRÉVENTION DESRISQUES RELÈVENT PRESQUE EXCLUSIVEMENT DES FILIÈRES SECTORIELLES
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AU-DELÀ DE LEUR IMPACT SUR LES RESSOURCES PUBLIQUES, L’ ÉVOLUTION DES RISQUES APPELLE UNE VISION D’ENSEMBLE DE LA « GESTION DES RISQUES » PAR LA PUISSANCE PUBLIQUE
Avec seulement, dans ce référé, deux recommandations :
A noter : une réponse ferme et très majoritairement composée de refus, de la part de la Première Ministre, avec des arguments qui méritent d’être écoutés me semble-t-il :
Sources :
- RAPPORT : Lire le document (PDF – 4 MB)
- SYNTHÈSE (TRÈS SYNTHÉTIQUE…) Lire le document
- RÉFÉRÉ (au sens de cette expression en langage des juridictions financière, adressé en l’espèce à la Première Ministre) Lire le document
- Réponse de la Première ministre au référé
- Réponses des administrations, organismes et personnes concernés au rapport
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