Voici la décision de la CEDH condamnant la Suisse pour inaction climatique (une telle censure étant une première)

Pour la première fois, la CEDH vient de condamner un Etat signataire de cette convention, pour violation violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme, ainsi que pour violation de l’article 6 § 1 (accès à un tribunal).

En effet, dans son arrêt de Grande Chambre, rendu ce jour dans l’affaire Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse (requête no 53600/20), la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la Confédération helvétique.

L’affaire concerne une requête introduite par quatre femmes ainsi qu’une association suisse, Verein KlimaSeniorinnen Schweiz. L’ensemble des membres de cette association sont des femmes âgées qui sont préoccupées par les conséquences du réchauffement climatique pour leur santé et leurs conditions de vie. Les requérantes considèrent que les autorités suisses, en dépit des obligations que leur impose la Convention, ne prennent pas des mesures suffisantes pour atténuer les effets du changement climatique.

La CEDH leur donne raison même si une partie de leurs demandes sont irrecevables.

NB : les deux paragraphes ci-dessous reprennent le communiqué de la Cour. 

La Cour conclut que la Confédération suisse a manqué aux obligations (« obligations positives ») que la Convention lui imposait relativement au changement climatique. Le processus de mise en place du cadre réglementaire interne pertinent a comporté de graves lacunes, notamment un manquement des autorités suisses à quantifier, au moyen d’un budget carbone ou d’une autre manière, les limites nationales applicables aux émissions de gaz à effet de serre (GES). De plus, la Suisse n’a pas atteint ses objectifs passés de réduction des émissions de GES. Tout en reconnaissant que les autorités nationales jouissent d’une ample marge d’appréciation quant à l’application d’une législation et de mesures, la Cour constate à partir des éléments dont elle dispose que les autorités suisses n’ont pas agi en temps utile et de manière appropriée afin de concevoir, élaborer et mettre en œuvre la législation et les mesures pertinentes en l’espèce.

En outre, la Cour dit que l’article 6 § 1 de la Convention trouve à s’appliquer au grief de l’association requérante qui concerne la mise en œuvre effective des mesures d’atténuation prévues par le droit interne en vigueur. Elle constate que les juridictions suisses n’ont pas expliqué de façon convaincante pourquoi elles ont estimé qu’il n’y avait pas lieu d’examiner le bien-fondé des griefs de l’association requérante. Lesdites juridictions n’ont pas tenu compte des données scientifiques incontestables concernant le changement climatique et n’ont pas pris au sérieux les griefs formulés.

Voici cette décision :

CEDH,GRANDE CHAMBRE, 9 avril 2024, AFFAIRE VEREIN KLIMASENIORINNEN SCHWEIZ ET AUTRES c. SUISSE, n° 53600/20