Par notre métier, nous sommes bien placés pour savoir combien importe la protection de la présomption d’innocence, tant les mises en examen touchent de très nombreux innocents qui seront bien vite cloués au pilori des médias avant que d’être, bien longtemps après, dans un silence médiatique absolu, innocentés par la Justice des Hommes.
Entre temps, l’Homme enfin innocenté est, souvent, devenu un Homme brisé.
N.B.1 : naturellement, ce n’est pas le nombre de mis en examen que nous contestons, mais le pré-jugement médiatique.
N.B.2 : le terme Homme est ici utilisé pour dire « être humain de tout sexe »… bien sûr.
Donc ce n’est pas faire injure aux personnes requérantes en l’espèce, ni à quiconque, que de rappeler la présomption d’innocence dont jouit et doit jouir le Vice-Président (i.e. le vrai patron) du Conseil d’Etat qui se trouve mis en examen au titre de fonctions passées au sein de l’Autorité de la concurrence :
Mais ce n’est pas non plus porter atteinte à ladite présomption d’innocence que de constater :
- d’une part, que cela est un peu gênant pour une fonction juridictionnelle aussi prestigieuse
- et, d’autre part, que de noter qu’il semblerait que la communication à ce stade au sein de l’ordre juridictionnel administratif ait, disons, mal fonctionné, sur fond de relations internes tendues.
Sur ce second point, et telle est l’information que nous voulions relayer, voici le communiqué du Syndicat de la Juridiction administrative (SJA) :
RÉACTION DU SJA À LA MISE EN EXAMEN DU VICE-PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ETAT
Le SJA a souhaité, une fois rendue publique la mise en examen du vice-président du Conseil d’Etat, réagir auprès des magistrats des juridictions administratives, par le message suivant :Le journal Le Monde a révélé vendredi midi que le vice-président du Conseil d’Etat avait été mis en examen à propos de faits survenus alors qu’il dirigeait l’Autorité de la concurrence.
Nous regrettons fortement, en premier lieu, que les magistrats des tribunaux et des cours aient appris par voie de presse cette mise en examen, seuls les chefs de juridiction, les membres du CSTACAA et les organisations syndicales ayant été informés de l’évolution de cette procédure jeudi soir, sans être invités à vous relayer cette information. Pour leur part, les membres et agents du Conseil d’Etat ont directement et simultanément reçu du vice-président un courriel à ce sujet.
En second lieu, sans préjuger de l’issue que trouvera cette procédure, nous nous inquiétons vivement des répercussions médiatiques possibles de celle-ci, et notamment de l’atteinte qu’elle est susceptible de porter à l’image de la juridiction administrative et à la confiance que lui accordent les justiciables. Le SJA est également inquiet de voir le gestionnaire de la juridiction mis en cause, particulièrement alors que des réflexions structurantes pour l’ensemble de la justice administrative sont en cours, notamment en ce qui concerne la carrière des magistrats administratifs.
Le SJA restera très vigilant quant à la portée et aux effets de cette information dans les jours et semaines à venir.
Un tel communiqué dans le monde de la magistrature administrative est assez inédit. Une telle situation aussi, il est vrai.