Parution du décret n° 2022-767 du 2 mai 2022 modifiant le Code de la commande publique : vers une commande publique plus durable

Ce 3 mai 2022, vient de paraitre au Journal officiel le décret n° 2022-767 du 2 mai 2022 portant diverses modifications du Code de la commande publique à destination des acheteurs publics et opérateurs économiques.

Ce décret modifie la partie réglementaire du Code de la comande publique afin d’y inclure les dispositions de l’article 35 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et Résilience.

Ainsi, plusieurs mesures réglementaires sont insérées dans le Code de la commande publique visant principalement à promouvoir et accroître le processus de verdissement de la commande publique.

I/ Élargissement de l’obligation d’établir un schéma de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (Spaser) :

Conformément à l’article L. 2111-3 du Code de la commande publique, les collectivités territoriales et les acheteurs dont le statut est déterminé par la loi, ont l’obligation d’établir un Spaser lorsque le montant de leurs achats est supérieur à un montant fixé par voie réglementaire.

  • Jusqu’au 31 décembre 2022, l’obligation d’établir un Spaser s’impose aux acheteurs dont le montant annuel des achats est supérieur à 100 millions d’euros (article D. 2111-3 du Code de la commande publique), ce montant devant s’apprécier au regard de l’ensemble des marchés notifiés dans l’année ;
  • A compter du 1er janvier 2023, cette obligation s’imposera aux acheteurs dont le montant annuel des achats sera supérieur à 50 millions d’euros (article D. 2111-3 du Code de la commande publique), ce montant devant s’apprécier au regard des dépenses effectuées au cours d’une année civile.

Ainsi, l’abaissement de 100 à 50 millions d’euros du seuil à partir duquel l’établissement d’un Spaser est obligatoire va permettre, selon la Direction des affaires juridiques, « de faire passer le nombre de collectivités concernées de près de 130 à environ 300 ».

 

II/ La fin du critère unique du prix et l’obligation de prévoir un critère prenant en compte les considérations environnementales de l’offre :

Conformément à l’article R. 2152-7 du Code de la commande publique, l’acheteur public doit se fonder sur un ou plusieurs critères pour attribuer un marché public au candidat présentant l’offre économiquement la plus avantageuse.

A cet effet, jusqu’au 20 août 2026, l’acheteur public peut continuer à sélectionner les offres sur la base du critère unique du prix.

Toutefois, pour tous les marchés lancés à compter du 21 août 2026, l’acheteur public ne disposera plus de la faculté de sélectionner les offres sur la base du critère unique du prix.

En effet, à compter de cette date, si l’acheteur public souhaite se fonder sur un unique critère, il ne pourra s’agir que de celui du coût qui devra obligatoirement prendre en compte les caractéristiques environnementales de l’offre et pourra être déterminé grâce au coût du cycle de vie.

Par ailleurs, si l’acheteur public se fonde sur une pluralité de critères parmi lesquels figurent le prix ou le coût, l’un de ces critères devra obligatoirement prendre en compte les caractéristiques environnementales de l’offre.

Ainsi, et comme cela été annoncé depuis la promulgation de la loi Climat et résilience, les acheteurs publics savent désormais à partir de quelle date, il sera obligatoire de prévoir, dans leurs marchés, un critère environnemental. Si un tel critère est pertinent pour un grand nombre de marchés, cela peut sembler moins évident pour certains marchés, notamment, ceux de prestations intellectuelles. L’article ne prévoyant pas de dérogations pour certains types de marchés, cette obligation s’appliquera donc à tous les marchés, sauf ceux évalués uniquement sur le critère du coût.

A noter, le verdissement des critères d’attribution a également conduit à une modification des dispositions relatives aux enchères électroniques qui à compter du 21 août 2026, devront porter « sur le prix ou sur d’autres éléments quantifiables indiqués dans les documents de la consultation ».

III/ L’obligation de prendre en compte les caractéristiques environnementales de l’offre dans les contrats de concession :

Conformément à l’article L. 3124-5 du Code de la commande publique, l’autorité concédante doit attribuer le contrat de concession au soumissionnaire présentant la meilleure offre au regard de l’avantage économique global.

Jusqu’au 20 août 2026, l’autorité concédante aura la faculté de se fonder sur une pluralité de critères non discriminatoires dont notamment « des critères environnementaux, sociaux, relatifs à l’innovation. » (article R. 3124-4 du Code de la commande publique).

 Toutefois, pour toute consultation lancée à compter du 21 août 2026, l’autorité concédante doit se fonder sur une pluralité de critères non discriminatoires « dont au moins l’un d’entre eux prend en compte les caractéristiques environnementales de l’offre. Au nombre de ces critères peuvent également figurer des critères sociaux ou relatifs à l’innovation. » (article 7 du décret n° 2022-767 du 2 mai 2022).

Ainsi, l’autorité concédante devra obligatoirement prendre en compte les caractéristiques environnementales de l’offre des candidats.

Également, au plus tard à compter du 21 août 2026, les concessionnaires devront décrire dans le rapport annuel communiqué à l’autorité concédante les « mesures mises en œuvre par le concessionnaire pour garantir la protection de l’environnement et l’insertion par l’activité économique dans le cadre de l’exécution du contrat. ».

IV/ La publication et le recensement des données essentielles des marchés :

Conformément à l’article R. 2196-1 du Code de la commande publique, l’acheteur public doit publier dans les 2 mois suivant la notification ou la modification du marché des données essentielles lorsque la valeur de son besoin est égale ou supérieure à 40 000 euros hors taxes.

Au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023, l’acheteur public peut publier ces données essentielles sur son profit d’acheteur.

En revanche, au plus tard à compter du 1er janvier 2024 (la date d’entrée en vigueur devant être précisément fixée par un arrêté du ministre chargé de l’économie), l’acheteur public devra publier ces données essentielles sur le portail national de données ouvertes.

 Ainsi, au plus tard le 1er janvier 2024, les données essentielles des marchés seront centralisées sur une même plateforme (le portail national de données ouvertes) et non plus individuellement publiées sur le profil de chaque acheteur.

Le décret prévoit une disposition similaire pour les données essentielles des contrats de concession.

Par ailleurs, ce nouveau décret précise également que le recensement économique des marchés publics sera désormais réalisé par l’Observatoire économique de la commande publique à partir des données essentielles publiées par les acheteurs sur le portail national de données ouvertes, l’obligation de déclaration des données de recensement étant supprimée, ce qui allégera ainsi le travail des acheteurs publics.

V/ Nouveau cas d’interdiction de soumissionner facultative :

A compter du 4 mai 2022, les acheteurs publics et les autorités concédantes ont la faculté, en vertu des articles L. 2141-7-1 et L. 3123-7-1 du Code de la commande publique, d’exclure de la procédure de passation les entreprises qui n’ont pas satisfait à l’obligation d’établir un plan de vigilance prévue à l’article L. 225-102-4 du Code de commerce. Il convient de relever que cette disposition, contrairement aux autres évolutions précédemment énoncées, est d’application immédiate.