L’annulation contentieuse de la suspension d’un agent pour faute grave n’appelle pas de mesure de régularisation de sa situation.

Un agent ayant fait l’objet de mesures de suspension pour faute grave annulées pour vice de forme par le juge administratif, peut-il faire l’objet de nouvelles mesures de suspensions rétroactives afin de régulariser sa situation ?

Par un arrêt M. C… c/ recteur de l’académie de Paris en date du 23 février 2023 (req. n° 21PA03995), la cour administrative d’appel de Paris a répondu négativement. Elle a en effet considéré que le fonctionnaire qui fait l’objet d’une mesure de suspension étant maintenu en position d’activité, l’annulation d’une telle mesure ne suppose l’intervention d’aucun acte pour assurer la continuité de la carrière de l’agent ou régulariser sa situation.

Par un arrêté du 28 juin 2018, le recteur de l’académie de Paris a suspendu de ses fonctions à titre conservatoire M. C…, professeur agrégé de mathématiques, pour une durée de quatre mois à compter du 10 juillet 2018. Cette décision, qui n’a pas été contestée, a été prolongée par quatre arrêtés successifs de même durée pris respectivement les 9 octobre 2018, 11 février 2019, 25 juin 2019 et 10 octobre 2019 et portant sur la période comprise entre le 10 novembre 2018 et le 9 mars 2020.

Ces arrêtés de prolongation ont été annulés par un jugement du tribunal administratif de Paris du 8 avril 2020 au motif qu’ils n’étaient pas suffisamment motivés. Le 9 mars 2020, en cours d’instance, le recteur de l’académie de Paris a pris un nouvel arrêté de prolongation, portant sur la période comprise entre le 10 mars et le 9 juillet 2020. Le 10 avril 2020, à la suite de l’annulation contentieuse, il a pris quatre nouveaux arrêtés portant sur la période comprise entre le 10 novembre 2018 et le 9 mars 2020. Enfin, il a décidé de la prolongation de cette mesure conservatoire par des arrêtés des 23 juin 2020, 16 octobre 2020 et 25 février 2021 au titre de la période comprise entre le 10 juillet 2020 et le 9 juillet 2021.

Le tribunal administratif de Paris ayant par un jugement du 19 mai 2021 rejeté ses demandes tendant à l’annulation des arrêtés des 9 mars 2020, 10 avril 2020, 23 juin 2020, 16 octobre 2020 et 25 février 2021, M. C… a saisi la cour administrative d’appel de Paris.

Tout d’abord, celle-ci rappelle que « les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l’avenir. S’agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, l’administration ne peut, en dérogation à cette règle générale, leur conférer une portée rétroactive que dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l’agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation. »

Or, poursuit-elle, « le fonctionnaire qui fait l’objet d’une mesure de suspension étant maintenu en position d’activité, l’annulation d’une telle mesure ne suppose l’intervention d’aucun acte pour assurer la continuité de la carrière de l’agent ou régulariser sa situation. Par suite, si l’administration est en droit, après l’annulation contentieuse d’une première mesure de suspension, d’en prendre une nouvelle, sous réserve que les conditions prévues à l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983 demeurent remplies, elle ne peut légalement lui donner un effet rétroactif. »

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :

https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CAA/decision/2023-02-23/21PA03995