Contentieux administratif : le Conseil d’Etat valide le régime de l’autorisation exceptionnelle de faire intervenir en visio, un témoin, un expert…

Pas moins de 8 décrets ont été publiés au JO du 22 juin 2023, relatifs aux membres des juridictions administratives (générales et financières)… portant d’ailleurs un peu au passage, aussi, sur télérecours citoyen et sur les visio-audiences…. Voir :

 

Au nombre de ces textes, se trouvait le décret n° 2023-485 du 21 juin 2023 relatif à l’échelonnement des grades et emplois et au reclassement indiciaire des membres du Conseil d’Etat et portant diverses dispositions modifiant le code de justice administrative :

 

Ce décret apportait notamment quelques modifications à la procédure administrative contentieuse avec l’élargissement de l’utilisation de Télérecours citoyens et l’introduction de la possibilité pour le juge d’autoriser une partie à participer, pour un motif légitime, à une audience devant une juridiction administration par visioconférence.

 

En ce domaine, il faut rappeler que, pour ce qui est des visio-audiences :

 

Le nouveau décret, précité, n° 2023-485 du 21 juin 2023, a été attaqué par un syndicat de magistrats administratifs en tant que ce texte avait inséré, après l’article R. 731-2 du code de justice administrative, un article R. 731-2-1 aux termes duquel :

« Le président de la formation de jugement peut à titre exceptionnel pour un motif légitime autoriser une partie, un témoin, un expert ou toute autre personne convoquée à l’audience et qui en a fait expressément la demande à être entendu par un moyen de communication audiovisuelle au cours de l’audience ou de l’audition.
« Les modalités d’application du présent article, notamment les conditions de sécurité et de confidentialité des échanges, sont fixées par arrêté du vice-président du Conseil d’État
. »

 

Il ne s’agit donc pas vraiment d’une visio-audience, encore moins d’une dérogation à la publicité des audiences, mais juste d’une autorisation exceptionnelle de faire intervenir ainsi, en visio, un témoin, un expert… Voir ce passage de la nouvelle décision du Conseil d’Etat :

« 3. Les dispositions contestées, qui ne permettent pas qu’il soit dérogé au principe de la publicité des audiences, ont pour seul objet de permettre au président d’une formation de jugement d’autoriser à titre exceptionnel une partie, un témoin, un expert ou toute personne en ayant expressément fait la demande et justifiant d’un motif légitime faisant obstacle à sa présence physique à l’audience publique, à participer à cette dernière par un moyen de communication audiovisuelle, n’affectent pas les garanties accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques et ne mettent pas davantage en cause les autres matières réservées au législateur par la Constitution. En outre, elles ne dérogent à aucune disposition législative. Il suit de là que la Première ministre était compétente pour édicter lesdites dispositions et que l’Union syndicale des magistrats administratifs n’est pas fondée à soutenir qu’elles seraient entachées d’incompétence. »

Ce recours a donc été rejeté par le Conseil d’Etat en ces termes :

« 5. Les dispositions contestées prévoient que la faculté d’une partie, un témoin, un expert ou toute personne en ayant expressément fait la demande de participer à une audience publique par un moyen de communication audiovisuelle est subordonnée à l’autorisation préalable du président de la formation de jugement, laquelle ne peut être donnée qu’à titre exceptionnel pour un motif légitime. Elles n’ont, ainsi qu’il a été dit au point 3, ni pour objet ni pour effet de permettre que l’audience ne se tienne pas publiquement. Par suite, la requérante n’est pas fondée à soutenir que ces dispositions, alors même qu’ainsi qu’elle le fait valoir, elles n’énoncent pas les contentieux concernés, ni les motifs légitimes susceptibles d’être retenus, ni ne prévoient l’accord préalable des autres parties, méconnaîtraient le droit à un procès équitable garantis par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et l’article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en particulier en ce qu’il inclut le principe de publicité des audiences. »

 

Source :

Conseil d’État, 27 février 2024, n° 476228