Un permis de construire peut légalement imposer des travaux sur la propriété voisine !

 

Les éoliennes ne font pas qu’alimenter le réseau d’électricité : elles enrichissent aussi parfois la jurisprudence au gré des contentieux qu’elles suscitent régulièrement.

C’est ainsi qu’un recours dirigé contre un permis autorisant l’implantation de cinq éoliennes dans la Nièvre a donné lieu à une décision du Conseil d’Etat qui ne manquera pas d’interpeller les férus du droit de l’urbanisme.

Le permis litigieux avait ceci de particulier qu’il autorisait l’implantation des éoliennes (jusque là, rien de très original) mais à la condition que le pétitionnaire implante des haies sur les terrains voisins au projet (ce qui est plus singulier…).

Evidemment, les auteurs du recours contre le permis ne se sont pas privés de soulever l’illégalité de ce dernier en soutenant que l’implantation des haies par le pétitionnaire n’était pas garantie, celui-ci ne disposant d’aucune autorisation des propriétaires des parcelles où les végétaux devaient être plantés.

La Cour administrative d’appel de Lyon a suivi ce raisonnement et a annulé partiellement le permis de construire en jugeant que son titulaire n’avait pas la maitrise foncière des terrains voisins où les haies devaient être implantées.

A l’issue de la procédure de cassation, le Conseil d’Etat a censuré cette analyse au motif que les permis de construire sont toujours délivrés sous réserve des droits des tiers (dont notamment les propriétaires voisins de la construction) et qu’ainsi, l’auteur d’un permis imposant des prescriptions sur les parcelles voisines du projet n’avait pas à vérifier que les propriétaires concernés avaient donné leur accord. Mais, afin de rassurer les requérants, le Conseil d’Etat a pris soin de préciser que le projet ne pourra légalement voir le jour que si les haies sont implantées…donc lorsque les propriétaires des terrains voisins auront donné leur accord.

Cette décision précise ainsi qu’un permis de construire n’est pas illégal du seul fait qu’il prévoit  des travaux sur un terrain dont le pétitionnaire n’a pas la maitrise foncière…

Et elle rappelle qu’un projet autorisé par un permis de construire n’est pas de ce seul fait réalisable : encore faut-il que les droits des tiers ne soient pas méconnus…ce qui reste le problème du pétitionnaire et non celui de la collectivité qui a délivré le permis.

Ref. : CE, 16 octobre 2015, req., n° 385114 ( à publier au Recueil).