Après s’être prononcé, en 2012, sur le sort, en fin de contrat, des biens acquis par le concessionnaire et nécessaires au fonctionnement du service public (CE, 21 déc. 2012, Commune de Douai, req. n°34788), le Conseil d’Etat se retrouve face à une question quelque peu similaire à propos des provisions pour renouvellement de ces biens.
Dans cette fameuse jurisprudence Commune de Douai, le Conseil d’Etat avait jugé que:
« Dans le cadre d’une délégation de service public ou d’une concession de travaux mettant à la charge du cocontractant les investissements correspondant à la création ou à l’acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l’ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, dès leur réalisation ou leur acquisition à la personne publique »
En l’espèce, (CE, 18 oct. 2018,Soc. Electricité Tahiti (EDT ENGIE), req. n°420097) la Société EDT ENGIE, concessionnaire d’un contrat de concession de service public conclu avec la Polynésie française, demandait au Conseil d’Etat de déclarer la loi du pays n°2018-16 LP/APF, adoptée le 14 mars 2018 par l’Assemblée de la Polynésie française, non conforme à la loi organique du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française.
Cette loi prévoit notamment que les provisions pour renouvellement des biens nécessaires au service public constituent des financements de l’autorité délégante, et qu’ainsi elles doivent revenir au délégant en fin de contrat.
Le Conseil d’Etat a, en premier lieu, rappelé les règles applicables aux biens de retours telles que dégagées dans sa jurisprudence « Commune de Douai » : les biens acquis par le concessionnaire qui sont nécessaires au fonctionnement du service public, doivent retourner gratuitement dans le patrimoine de la personne publique à l’échéance du contrat.
Puis, en second lieu, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur le sort de sommes requises pour l’exécution des travaux de renouvellement des biens nécessaires au fonctionnement du service public qui ont seulement donné lieu, à la date d’expiration du contrat, à des provisions. Il a ainsi considéré que ces sommes doivent également faire l’objet d’un retour gratuit dans le patrimoine de la personne publique.
Il précise par ailleurs qu’il en va de même pour les sommes qui auraient fait l’objet de provision pour l’exécution de travaux de renouvellement pour des montants excédant ce que lesdits renouvellements exigeaient lorsque l’équilibre économique du contrat ne justifie pas leur conservation par le concessionnaire .
Il peut en être déduit, que si l’équilibre économique du contrat avait été menacé par un retour de ces sommes au concédant, le concessionnaire aurait éventuellement pu les conserver.
Mais que se passe-t-il pour les biens non inachevés ?
Pour le moment, le Conseil d’Etat n’a pas admis le pourvoi d’un syndicat mixte qui invoquait comme moyen l’erreur de droit, commise par la cour administrative d’appel (CAA) de Versailles, qui avait refusé de considérer ces sommes comme un bien de retour (CE, 26 octobre 2018, SMCTVPE, n°s 422652 et 423140).
Nous restons donc en attente d’une jurisprudence plus claire sur ce dernier point. Nous aurons sans doute l’occasion de revenir dessus dans les prochains mois via ce blog. Affaire à suivre…