Privatisation de l’aéroport de Toulouse-Blagnac : le Conseil d’Etat, au contraire de la CAA de Paris, valide la procédure et laisse les procédures informelles de mise en concurrence rester assez informelles…

Le Conseil d’État juge légale la décision des ministres de l’économie et des finances sélectionnant l’acquéreur des parts de l’État dans le capital de la société ATB exploitant cet aéroport.

Pour le juriste, cette décision est intéressante en termes de relative liberté, sauf élément contraire dans le cahier des charges public, d’évolution dans les membres des groupements soumissionnaires. 

Les polémistes tenteront de lier cela à la procédure concernant Aéroport de Paris, comme ce fut fait à tort (et en sens inverse) lors de l’étape précédente, en CAA, de ce même dossier. Mais plutôt en vain car le cadre de ces affaires reste fort différent. 

Revenons un peu en arrière. 

 

I. les faits de l’espèce

 

Reprenons les faits :

  • Un décret du 11 juillet 2014 a autorisé le transfert au secteur privé d’une participation majoritaire au capital de la société ATB, à laquelle avait été apportée la concession de l’aéroport en application du II de l’article 7 de la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports, désormais codifié à l’article L. 6322-2 du code des transports.
  • En 2014, les ministres compétents ont annoncé l’organisation d’une procédure d’appel d’offres, régie par un cahier des charges, d’une participation au capital de la société ATB, en deux temps, minoritaire puis majoritaire
  • Les Ministres ont ensuite annoncé qu’ils avaient choisi un consortium pour être acquéreur et le contrat a été signé en 2015. Mais entre temps, la composition dudit consortium a évolué.

 

II. La censure faite le 16 avril 2019 par la CAA de Paris, portant sur l’évolution de la composition du Consortium au regard des règles de la mise en concurrence

 

La CAA de Paris avait le 16 avril 2019 censuré cette procédure.

A l’époque cette décision avait été récupérée médiapolitiquement (terme duhamélien très pertinent selon nous) puisque nous étions en pleine polémique sur la privatisation d’ADP (voir d’ailleurs à ce sujet ici et ) et, parce qu’à l’époque, E. Macron s’était, semble-t-il, impliqué dans ce dossier de l’aéroport de Toulouse-Blagnac.

Mais en droit nous commentions à l’époque cet arrêt pour signaler que celui-ci ne méritait ni excès d’honneur ni, naturellement, la moindre indignité. Cet arrêt était intéressant sur la question de l’équilibre entre les offres dans les procédures informelles, un point c’est tout :

 

Car cette annulation ne s’était pas faite sur le principe.

La CAA avait considéré que le « cahier des charges » qui avait été établi pour cette opération de privatisation, lequel prévoyait trois étapes dans la procédure de sélection de l’acquéreur, ne pouvait, contrairement à ce qu’avaient estimé les services de l’Etat, être interprété comme permettant qu’un consortium candidat puisse évoluer dans sa composition au cours de cette procédure.

NB ce point en droit n’est pas nouveau. Mais il est vrai que les règles, sur ce point, connues en marchés publics pour leur rigidité, ont pu donner lieu à débats en DSP ( (P. Lignières et C. Chapellier, Délégations de services publics : recomposition des groupements entre les deux tours : Dr. adm. 2003, prat. 11)…. et donc encore plus pour de telles procédures. Mais il va de soi que des changements importants dans la composition du groupement au fil de la procédure ne peut que fragiliser celle-ci (assez bêtement d’ailleurs car il existe des astuces pour éviter de telles affres dans les offres). 

Voir le point 9 de cet arrêt CAA Paris, arrêt n°17PA01605 du 16 avril 2019 17PA01605

 

A noter : cet arrêt n’avait de toute manière que peu d’effets pratiques sur l’application du contrat de cession passé le 7 avril 2015 entre l’Etat et la société Casil Europe (cf. d’ailleurs la jurisprudence Tarn et Garonne CE, Assemblée, 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, n° 358994, souvent commentée sur le présent blog), lequel, ainsi que l’a jugé le Conseil d’Etat par un arrêt du 27 octobre 2015 (386595 et 390657), est au demeurant un contrat de droit privé (à moins qu’un recours devant le juge judiciaire n’ait été opéré contre le contrat  ? Ce que nous ignorons… et serait-ce le cas qu’il n’en résulterait pas automatiquement l’annulation dudit contrat par le juge judiciaire ; rappelons qu’avant la jurisprudence Tarn-et-Garonne, l’annulation d’une délibération autorisant à passer un contrat de droit privé pouvait ne pas entraîner l’annulation dudit contrat de droit privé ; Le célébrisssime arrêt CE S., 7 octobre 1994, époux Lopez, Rec. p.430… s’était conclu par un refus du juge judiciaire d’annuler le contrat au civil ! Voir CA Riom, 28 mars 1996 Henriques, RFDA 97, p.353).

 

III. L’arrêt du Conseil d’Etat rendu ce jour

 

Le Conseil d’État estime tout d’abord que la décision de sélection de l’acquéreur a été prise à l’issue d’une procédure régulière. En particulier, il relève que la procédure suivie pour choisir parmi les différents candidats a respecté les règles définies par le cahier des charges. Il juge notamment que ce cahier des charges n’interdisait pas que la composition d’un groupement candidat évolue au cours de la procédure.

De fait, l’analyse détaillée du cahier des charges (voir les points 9 à 14 de la décision du CE…) semble fort convaincante. 
Le Conseil d’État juge ensuite que le choix du Consortium Symbiose comme acquéreur de la participation en cause n’est pas entaché d’une erreur manifeste d’appréciation. Les arguments soulevés par les requérants ne sont en effet pas de nature à remettre en cause le choix des ministres.

Cette analyse juridique conduit le Conseil d’État, statuant comme juge de cassation, à annuler l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris qui, le 16 avril dernier, avait annulé la décision sélectionnant l’acquéreur, et à rejeter les demandes d’annulation.

 

VOICI CETTE DÉCISION (dont là aussi il ne faut tirer aucun enseignement pour le sujet médiatique d’ADP…. sauf pour l’appréciation de la liberté d’évolution des candidatures dans les procédures informelles sous réserve, au cas par cas, de ce qui aura été inséré dans le cahier des charges…) :

 

 

Conseil d’État, 9 octobre 2019, Aéroport de Toulouse-Blagnac

Décision N°430538, 431689

N° 430538, 431689
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MINISTRE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES c/ M. G… et autres
SAS CASIL EUROPE c/ M. G… et autres
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Séance du 20 septembre 2019
Lecture du 9 octobre 2019
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’État statuant au contentieux (Section du contentieux, 9ème et 10ème chambres réunies)
Sur le rapport de la 9ème chambre de la Section du contentieux
Vu les procédures suivantes :
Procédures contentieuses antérieures :
Par une requête enregistrée sous le n° 386595, M. AX… G…, Mme AJ… BR…, MM. BA… Q…, BE… D…, T… AK…, AI… AL…, BA… K…, AA… W…, BC… BF…, BQ… J…, MM. AR… X…, AC… Y…, AH… AO…, E… BH…, AC…-BU… AS…, BT… AD…, AW… N…, BC… BI… et AU… AF…, le Collectif contre les nuisances aériennes, le Collectif Francazal, l’Union syndicale Solidaires de Haute Garonne et la Fédération syndicale unitaire 31 (FSU 31) ont demandé au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir, d’une part, la décision du ministre des finances et des comptes publics et du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, rendue publique le 4 décembre 2014, désignant le consortium « Symbiose » en qualité d’acquéreur pressenti d’une participation de 49,99 % détenue par l’Etat au capital de la société Aéroport Toulouse-Blagnac, d’autre part, les avis rendus par la commission des participations et des transferts préalablement à cette décision, enfin, le refus qui a été opposé par l’Agence des participations de l’Etat à leur demande de communication de ces avis.
Par une requête enregistrée sous le n° 390657, M. AX… G…, Mmes AN… P…, AJ… BR…, BB… BJ…, M. BA… Q…, Mmes AG… R…, AY… S…, MM. BE… D…, T… AK…, AI… AL…, BM… U…, MM. A… I…, AA… W…, BC… BF…, BQ… J…, MM. AR… X…, AC… Y…, BA… K…, BL… Z…, MM. AH… AO…, B… AP…, H… L…, Mmes AV… L…, BG… M…, MM. E… BH…, AC…-BU… AS…, BT… AD…, AW… N…, BC… BI… et AU… AF…, le Collectif contre les nuisances aériennes, le Collectif Francazal, Europe Ecologie Les Verts (EELV) Midi-Pyrénées, l’Union syndicale Solidaires de Haute-Garonne et la Fédération syndicale unitaire 31 (FSU 31) ont demandé au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir, d’une part, l’arrêté du 15 avril 2015 fixant les modalités de transfert au secteur privé d’une participation détenue par l’Etat au capital de la société Aéroport Toulouse-Blagnac, pris par le ministre des finances et des comptes publics et le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, d’autre part, l’autorisation du ministre chargé de l’économie, de l’industrie et du numérique recueillie le 7 avril 2015, enfin, par voie de conséquence, tous les actes et décisions attachés à cette décision, notamment l’acte de cession signé par le représentant de l’Agence des participations de l’Etat le 7 avril 2015.
Par une décision nos 386595, 390657 du 27 octobre 2015, le Conseil d’Etat a, d’une part, rejeté comme manifestement irrecevables les conclusions de la requête n° 386595 tendant à l’annulation des avis de la commission des participations et des transferts et du refus de communication de ces avis. Il a, d’autre part, rejeté comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître les conclusions de la requête n° 390657 dirigées contre l’acte de cession signé par le représentant de l’Agence des participations de l’Etat le 7 avril 2015. Il a, enfin, attribué le jugement du surplus des conclusions des deux requêtes au tribunal administratif de Paris.
Par un jugement nos 1518069, 1518199 du 15 mars 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions des deux requêtes.
Par un arrêt n° 17PA01605 du 16 avril 2019, la cour administrative d’appel de Paris, sur appel de M. G…, de Mme BR…, de MM. Q…, W…, BF…, X…, Y…, de M. et Mme L…, de MM. BH…, AS…, AD…, du Collectif contre les nuisances aériennes, d’EELV Midi-Pyrénées, de l’Union syndicale Solidaires de Haute-Garonne et de la FSU 31, a annulé, en premier lieu, la décision du ministre des finances et des comptes publics et du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, rendue publique le 4 décembre 2014, désignant le consortium « Symbiose » en qualité d’acquéreur pressenti de la participation litigieuse, en deuxième lieu, l’autorisation du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique recueillie le 7 avril 2015 et, en troisième lieu, l’arrêté du ministre des finances et des comptes publics et du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique en date du 15 avril 2015 fixant les modalités de transfert au secteur privé de la participation litigieuse, puis annulé le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu’il rejette les conclusions tendant à l’annulation de ces trois décisions et rejeté le surplus des conclusions d’appel.
Procédures devant le Conseil d’Etat :
1° Sous le n° 430538, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 mai, 17 juin et 17 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’économie et des finances demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter le surplus des conclusions d’appel des requérants ;
3°) de mettre conjointement à la charge de l’Union syndicale solidaires de Haute-Garonne et de la Fédération syndicale unitaire 31 la somme de 6 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Le ministre soutient que la cour administrative d’appel de Paris :
– a dénaturé les faits et les pièces du dossier en retenant que les dispositions du cahier des charges impliquaient nécessairement que les participants à un consortium soient les mêmes du début à la fin de la procédure, qu’elles ne sauraient être interprétées comme autorisant une modification des candidatures en cours de processus et qu’une reconfiguration des candidatures n’aurait pas été en cohérence avec l’économie du dispositif ;
– a commis une erreur de droit, inexactement qualifié et dénaturé les faits en retenant que la composition des consortiums ne pouvait pas évoluer entre le stade des offres indicatives et celui des offres fermes ;
– a commis une erreur de droit en ne recherchant pas si le vice de procédure qu’elle avait identifié avait eu une influence sur le sens des décisions attaquées ;
– a insuffisamment motivé son arrêt en s’abstenant d’indiquer pour quels motifs l’irrégularité identifiée aurait été de nature à compromettre le résultat de la procédure en cause.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 23 août 2019, la société Casil Europe demande que le Conseil d’Etat fasse droit aux conclusions du pourvoi n° 430538. Elle se réfère aux moyens exposés dans le pourvoi du ministre et à ceux exposés au soutien de son pourvoi enregistré sous le numéro 431689.
Par un mémoire en défense et un nouveau mémoire, enregistrés les 2 et 19 septembre 2019, l’Union syndicale Solidaires de Haute-Garonne et la Fédération Syndicale unitaire 31 concluent au rejet du pourvoi et à ce que la somme de 15 000 euros soit mise à la charge de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par deux mémoires en intervention, enregistrés les 13 et 20 septembre 2019, la société par actions simplifiée (SAS) Edeis demande que le Conseil d’Etat fasse droit aux conclusions du pourvoi n° 430538. Elle se réfère aux moyens exposés dans le pourvoi du ministre et soutient en outre que la cour a commis une erreur de droit en annulant la procédure de consultation dans son ensemble alors qu’elle ne devait l’annuler que partiellement.
2° Sous le n° 431689, par un pourvoi et un mémoire en réplique enregistrés les 14 juin et 9 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société par actions simplifiée (SAS) Casil Europe demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter le surplus des conclusions d’appel des requérants ;
3°) de mettre à la charge de chacun des requérants la somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société soutient que la cour administrative d’appel de Paris :
– a inexactement qualifié les faits et commis une erreur de droit en jugeant que les syndicats requérants justifiaient d’un intérêt à agir pour contester la légalité des décisions désignant le consortium Symbiose comme acquéreur de la participation de l’Etat ;
– a commis une erreur de droit en s’abstenant de vérifier si les vices invoqués par les syndicats requérants étaient susceptibles de les léser ;
– a commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en jugeant que les dispositions du cahier des charges interdisaient nécessairement toute modification de la composition des consortiums au cours du processus de sélection des candidatures et des offres ;
– a inexactement qualifié les faits et insuffisamment motivé son arrêt en jugeant que le vice affectant la procédure suivie, à supposer qu’il soit avéré, était susceptible d’avoir exercé une influence sur le sens de la décision ;
– a méconnu l’article R. 412-1 du code de justice administrative en faisant droit, alors qu’elle était irrecevable faute pour les requérants d’avoir produit devant le tribunal administratif la copie de la décision attaquée, à la demande d’annulation de la décision du 7 avril 2015 par laquelle le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique a autorisé le commissaire aux participations de l’Etat à signer le contrat.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2019, l’Union syndicale Solidaires de Haute-Garonne et la Fédération Syndicale unitaire 31 concluent au rejet du pourvoi et à ce que soit mis à la charge de l’Etat la somme de 15 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent, d’une part, que le pourvoi est irrecevable dès lors que la société, qui était représentée en appel par l’Etat et n’aurait donc pas eu qualité pour faire tierce opposition si elle n’avait pas été invitée par la cour à présenter des observations, n’avait pas la qualité de partie à l’instance et, d’autre part, que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
Par deux mémoires en intervention, enregistrés les 13 et 20 septembre 2019, la société Edeis demande que le Conseil d’Etat fasse droit aux conclusions du pourvoi n° 431689. Elle se réfère aux moyens exposés dans le pourvoi de la société Casil Europe et soutient en outre que la cour a commis une erreur de droit en annulant la procédure de consultation dans son ensemble alors qu’elle ne devait l’annuler que partiellement.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
– la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
– le code de commerce ;
– le code de l’environnement ;
– le code des transports ;
– le code du travail ;
– la loi n° 86-912 du 6 août 1986 ;
– la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 ;
– la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 ;
– l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 ;
– le décret n° 93-1041 du 3 septembre 1993 ;
– le décret du 25 octobre 2013 portant nomination à la Commission des participations et des transferts ;
– le décret n° 2014-403 du 16 avril 2014 ;
– le décret n° 2014-404 du 16 avril 2014 ;
– le décret n° 2014-795 du 11 juillet 2014 ;
– le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,
– les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du ministre de l’économie et des finances, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de l’Union syndicale Solidaires de Haute-Garonne et de la Fédération syndicale unitaire 31, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Edeis venant au droits de la société SNC Lavalin et à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la société Casil Europe ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes visées ci-dessus présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
2. Le décret du 11 juillet 2014 a autorisé le transfert au secteur privé d’une participation majoritaire au capital de la société anonyme Aéroport Toulouse Blagnac (ATB), à laquelle avait été apportée la concession de l’aéroport en application du II de l’article 7 de la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports, désormais codifié à l’article L. 6322-2 du code des transports. Par un avis publié au Journal officiel le 18 juillet 2014, les ministres chargés des finances et de l’économie ont annoncé l’organisation d’une procédure d’appel d’offres, régie par un cahier des charges consultable sur le site internet de l’Agence des participations de l’Etat, pour la cession de gré à gré, par l’Etat, d’une participation au capital de la société ATB, portant, dans un premier temps, sur 49,99 % du capital et comportant également une option de vente par l’Etat de sa participation résiduelle au capital, soit 10,01 %. Au terme de cette procédure, le ministre des finances et des comptes publics et le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique ont annoncé, par un communiqué de presse du 4 décembre 2014, qu’ils avaient choisi comme acquéreur pressenti le consortium Symbiose, constitué des sociétés Shandong Hi-Speed Group et Friedmann Pacific Asset Management. Le contrat de cession a été signé le 7 avril 2015 par le représentant de l’Agence des participations de l’Etat, qui y avait été autorisé par une décision du ministre chargé de l’économie recueillie le même jour, avec la société Casil Europe, société française détenue et contrôlée par le consortium Symbiose. Enfin, les ministres chargés des finances et de l’économie ont, par un arrêté du 15 avril 2015, décidé que le transfert de la participation de 49,99 % s’effectuerait par cession à la société Casil Europe au prix de 4 163 euros par action. Le ministre de l’économie et des finances et la société Casil Europe demandent l’annulation des articles 1er et 2 de l’arrêt du 16 avril 2019 par lesquels la cour administrative d’appel de Paris, faisant droit à l’appel des syndicats Union syndicale Solidaires de Haute-Garonne et Fédération syndicale unitaire 31 (FSU 31), a, d’une part, annulé le jugement du 15 mars 2017 du tribunal administratif de Paris rejetant les conclusions présentées par ces syndicats, ainsi que par MM. G… et autres, tendant à l’annulation de la décision de sélection de l’acquéreur révélée par le communiqué de presse du 4 décembre 2014, de l’autorisation du ministre chargé de l’économie recueillie le 7 avril 2015 ainsi que de l’arrêté du 15 avril 2015 et, d’autre part, prononcé l’annulation de ces trois décisions.
Sur les interventions :
3. En tant que cessionnaire de la participation en litige, la société Casil Europe justifie d’un intérêt suffisant à l’annulation de l’arrêt attaqué. Ainsi, son intervention au soutien du pourvoi du ministre est recevable.
4. En faisant valoir que la société SNC Lavalin, aux droits de laquelle elle vient, était au nombre des participants de l’offre indicative présentée par le consortium Symbiose au cours de la procédure d’appel d’offres préalable à la cession de la participation en litige, alors qu’elle s’était retirée du consortium lors du dépôt des offres fermes parmi lesquelles l’acquéreur a été sélectionné, la société Edeis ne justifie pas d’un intérêt suffisant à l’annulation de l’arrêt attaqué. Ainsi, ses interventions au soutien du pourvoi du ministre et du pourvoi de la société Casil Europe sont irrecevables.
Sur la recevabilité du pourvoi de la société Casil Europe :
5. D’une part, la voie du recours en cassation n’est ouverte, en vertu des règles générales de la procédure, qu’aux personnes qui ont eu la qualité de partie dans l’instance ayant donné lieu à la décision attaquée. Doit être regardée comme une partie à l’instance devant les juges du fond la personne qui a été invitée par la juridiction à présenter des observations et qui, si elle ne l’avait pas été, aurait eu qualité pour former tierce opposition contre la décision rendue par les juges du fond.
6. D’autre part, aux termes de l’article R. 832-1 du code de justice administrative : « Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu’elle représente n’ont été présents ou régulièrement appelés dans l’instance ayant abouti à cette décision. »
7. Il ressort des pièces de la procédure que la société Casil Europe a été appelée par la cour administrative d’appel de Paris à présenter des observations dans l’instance. Compte tenu de l’objet des actes attaqués, qui se rattachent à la cession d’une participation de l’Etat au capital d’une société, la société requérante avait, en sa qualité d’acquéreur de la participation litigieuse, des intérêts propres à défendre dans le litige contestant la cession et ne pouvait donc être regardée comme ayant été représentée par le ministre de l’économie et des finances dans l’instance ayant statué sur ce litige. Par suite, elle aurait eu qualité, si elle n’avait pas été invitée par la cour à présenter des observations, pour former tierce opposition contre l’arrêt attaqué. Dès lors, l’Union syndicale Solidaires de Haute-Garonne et la FSU 31 ne sont pas fondées à soutenir que la société Casil Europe, qui avait la qualité de partie à l’instance devant la cour, n’est pas recevable à contester l’arrêt qu’elle attaque.
Sur le bien-fondé des pourvois :
8. Aux termes de l’article 4 de la loi du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations, applicable avant le 24 août 2014 : « Les cessions ou échanges de titres, les ventes de droits préférentiels ou les renonciations à de tels droits sont réalisés suivant les procédures du marché financier. / Toutefois, le ministre chargé de l’économie peut décider de faire appel à des acquéreurs hors marché. Le choix du ou des acquéreurs et les conditions de cession sont arrêtés par le ministre chargé de l’économie, sur avis conforme de la commission de la privatisation. Un décret en Conseil d’Etat fixe notamment les règles de publicité auxquelles sont subordonnées ces décisions et les cas dans lesquels il est recouru à un appel d’offres ». Selon le 2° de l’article 1er du décret du 3 septembre 1993 pris pour l’application de ces dispositions : « (…) la décision de vente ou d’échange de gré à gré des titres ou droits des entreprises publiques fait l’objet d’une publicité assurée par une insertion au Journal officiel de la République française. Lorsqu’il est établi un cahier des charges régissant l’opération, cette insertion fait connaître aux acquéreurs éventuels qu’ils disposent d’un délai minimal de quinze jours pour faire parvenir leur offre accompagnée de leurs références financières. (…) La commission de la privatisation est saisie (…) par le ministre chargé de l’économie des offres reçues ». Aux termes du II de l’article 26 de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, applicable à compter du 24 août 2014 : « La Commission des participations et des transferts est saisie par le ministre chargé de l’économie de toute opération de cession au secteur privé mentionnée à l’article 22 réalisée en dehors des procédures des marchés financiers ». Aux termes du II de l’article 27 de la même ordonnance : « Lorsqu’elle est saisie sur le fondement du II de l’article 26, la commission émet, en outre, un avis sur les modalités de la procédure, qui doit respecter les intérêts du secteur public, puis sur le choix du ou des acquéreurs et les conditions de la cession proposés par le ministre chargé de l’économie. / La commission tient notamment compte de la valeur de la société, des droits statutaires ou contractuels de toute nature accordés au secteur public, de la nature de l’opération, du prix, des caractéristiques des acquéreurs en cause et du projet industriel et stratégique afférent à l’opération. / Le décret, l’arrêté ou la décision autorisant ou décidant l’opération concernée est conforme à cet avis. »
9. Pris en application des dispositions du décret du 3 septembre 1993 citées au point 8, le cahier des charges relatif à la procédure de transfert par l’Etat d’une participation dans la société ATB décrit successivement les conditions dans lesquelles les « Candidats » qui remplissent les conditions de recevabilité peuvent être admis à présenter une « Offre indicative » en tant que « Candidats recevables » puis, le cas échéant, autorisés à déposer une « Offre Ferme » en tant qu’« Acquéreurs Eventuels » parmi lesquels est, enfin, sélectionné « l’Acquéreur ».
10. L’article 3 du cahier des charges prévoit que « les Candidats pourront être soit (i) une entité agissant seule ou avec des entités de son groupe, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, soit (ii) un ensemble d’entités agissant de concert, au sens de l’article L. 233-10 du code de commerce (l’« Offre Conjointe ») (les participants à une Offre Conjointe sont ci-après dénommés les « Participants ») ». Le même article précise que : « En cas d’Offre Conjointe, les Participants à l’Offre Conjointe devront désigner une entité chef de file, dûment habilitée, qui les représentera, agira au nom et pour le compte de tous les Participants et prendra tous engagements au nom de chacun des Participants tout au long de la Procédure de Transfert (le « Chef de File »), étant précisé que la qualité de Chef de File ne pourra être transférée à un autre Participant. / Les Participants à une Offre Conjointe seront tenus solidairement responsables de l’ensemble des engagements pris par le Chef de File à l’occasion de la Procédure de Transfert. / Un même Participant ne pourra participer à plusieurs Offres Conjointes à la fois. » En cas d’offre conjointe, les articles 6 et 8 et l’annexe 3 à laquelle ils renvoient imposent aux candidats recevables puis aux acquéreurs éventuels de produire, respectivement à l’appui de leur offre indicative et de leur offre ferme, une lettre d’identification faisant apparaître, « pour l’ensemble des Participants à l’Offre Conjointe envisagés », leur identité précise et les liens capitalistiques et contractuels existant entre eux.
11. L’article 6 du cahier des charges prévoit que chaque candidat recevable dépose une « Offre indicative » au plus tard le 15 septembre 2014. Aux termes du dernier paragraphe de l’article, « L’Etat, au vu de l’ensemble des Offres indicatives (…) décidera de la suite à donner à la Procédure de Transfert, notamment en termes de calendrier, et pourra opérer une sélection sur avis conforme de la Commission des Participations et des Transferts. L’Etat notifiera aux Candidats Recevables, le cas échéant après sélection, qu’ils sont autorisés à déposer une offre irrévocable et inconditionnelle d’acquisition de la Participation Initiale et de la Participation Résiduelle (…) (les « acquéreurs éventuels ») ». Selon l’article 8, chaque acquéreur éventuel dépose une offre ferme au plus tard le 31 octobre 2014. Enfin, l’article 9 prévoit que c’est « au vu des Offres Fermes » et « parmi les Acquéreurs Eventuels » que le ministre chargé de l’économie opère le choix de l’acquéreur.
12. Le cahier des charges établi pour régir une opération de cession de gré à gré d’une participation de l’Etat engagée en application de l’article 4 de la loi du 6 août 1986 ou de l’article 26 de l’ordonnance du 20 août 2014 précités fixe des règles dont le respect s’impose aux autorités administratives chargées de la mise en œuvre de cette procédure.
13. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’au stade du dépôt des candidatures, les sociétés Shandong Hi-Speed Group et Friedmann Pacific Asset Management étaient les seuls participants à l’offre conjointe présentée par le consortium Symbiose. Lors du dépôt des offres indicatives, la société SNC Lavalin, qui avait présenté une candidature distincte déclarée recevable, y a renoncé pour s’adjoindre aux participants de cette offre conjointe, avant de se retirer finalement du consortium, dont l’offre ferme n’émanait plus que des deux participants initiaux.
14. Pour annuler les décisions en litige, la cour a jugé que les dispositions du cahier des charges citées aux points 9 à 11 impliquaient nécessairement que le consortium constitué pour présenter une offre conjointe reste le même jusqu’au dépôt de l’offre ferme et ne pouvaient être interprétées comme autorisant une modification des candidatures en cours de processus, de sorte que ministre chargé de l’économie aurait, en agréant l’offre ferme présentée par le consortium Symbiose en dépit des changements intervenus dans sa composition, méconnu les dispositions du cahier des charges. En statuant par ces motifs, alors qu’aucune des règles fixées par le cahier des charges n’imposait aux participants à une offre conjointe de regrouper les mêmes entités tout au long de la procédure à l’exception de son chef de file, la cour a commis une erreur de droit. Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des pourvois, le ministre de l’économie et des finances et la société Casil Europe sont fondés à demander l’annulation des articles 1er et 2 de l’arrêt qu’ils attaquent.
15. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler, dans cette mesure, l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement attaqué :
16. En premier lieu, en ne faisant pas droit à la demande d’instruction sollicitée par les requérants pour obtenir la communication de pièces qui n’étaient pas nécessaires à la solution des litiges qui lui étaient soumis, le tribunal administratif de Paris n’a porté aucune atteinte au principe du contradictoire.
17. En deuxième lieu, le tribunal n’a pas méconnu le droit à un procès équitable, et notamment le principe de l’égalité des armes, garantis par les stipulations de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en relevant, pour écarter les moyens soulevés devant lui, que les requérants n’apportaient pas la preuve des irrégularités qu’ils invoquaient.
18. En troisième lieu, le tribunal, qui n’était tenu de répondre ni à l’ensemble des arguments des requérants ni aux moyens invoqués lors de l’audience du 27 février 2017 dans leurs observations orales et qui n’ont fait l’objet d’aucun mémoire écrit confirmatif, a suffisamment motivé son jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
19. En premier lieu, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les quatre avis rendus par la commission des participations et des transferts entre le 22 septembre 2014 et le 20 mars 2015 l’auraient été au terme d’une procédure irrégulière en raison de l’absence puis du décès de l’un de ses sept membres dont le siège n’a été pourvu que postérieurement à cette période, dès lors, d’une part, qu’il est constant que le quorum a été respecté lors de chacune des séances de la commission et, d’autre part, qu’en tout état de cause l’absence de l’un des membres n’a pu faire obstacle à la constitution d’une majorité en cas de partage des voix, dès lors que le dernier alinéa du II de l’article 25 de l’ordonnance précitée du 20 août 2014 dispose que la voix du président est prépondérante.
20. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 14 ci-dessus que la circonstance que la société SNC Lavalin, qui avait déposé une candidature distincte avant d’y renoncer, se soit jointe aux deux participants à l’offre indicative présentée par le consortium Symbiose puis se soit retirée du consortium lors du dépôt des offres fermes, n’a pas entaché d’irrégularité la procédure, dès lors qu’aucune disposition du cahier des charges n’imposait aux participants à une offre conjointe de regrouper les mêmes entités tout au long de la procédure à l’exception de son chef de file.
21. En troisième lieu, en se bornant à relever que la société Friedmann Pacific Asset Management avait été désignée comme mandataire du consortium Symbiose par la société Shandong Hi-Speed Group, les requérants n’établissent pas que la qualité de chef de file du consortium aurait été transférée en cours de procédure, en méconnaissance des règles définies par le cahier des charges.
22. En quatrième lieu, les requérants ne contestent pas sérieusement les éléments produits par le ministre qui attestent que la société Shandong Hi-Speed Group, chef de file du consortium, détenait 51 % du capital de la société Casil Europe constituée pour servir de véhicule d’acquisition conformément au dernier alinéa de l’article 3 du cahier des charges et ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que la constitution et la détention de ce véhicule d’acquisition auraient vicié la procédure de cession.
23. En cinquième lieu, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l’article L. 122-4 du code de l’environnement qui soumettent à une évaluation environnementale « les plans, schémas, programmes et autres documents de planification susceptibles d’avoir des incidences sur l’environnement qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation de travaux ou prescrire des projets d’aménagement, sont applicables à la réalisation de tels travaux ou projets », dès lors que les décisions attaquées, qui avaient pour seul objet la cession de participations détenues par l’Etat dans le capital de la société ATB, n’entraient pas dans le champ de ces dispositions.
24. En sixième lieu, il résulte de la combinaison du II de l’article 27 de l’ordonnance précitée du 20 août 2014 et des articles L. 2323-6 et L. 2323-19 du code du travail alors applicables qu’il appartient à la direction d’une entreprise dont la privatisation a été décidée d’informer et de consulter le comité d’entreprise, avant le transfert de cette entreprise du secteur public au secteur privé, sur les objectifs de la privatisation et sur ses répercussions quant à l’organisation juridique, économique et sociale de l’entreprise. Toutefois, la procédure décrite au II de l’article 27, selon laquelle le choix des acquéreurs et les conditions de cession sont arrêtés par une autorité de l’Etat, sur avis conforme de la commission des participations et des transferts, exclut la consultation du comité d’entreprise sur le choix à opérer entre les offres des candidats à l’acquisition. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la consultation du comité d’entreprise de la société ATB intervenue le 16 février 2015 aurait été réalisée dans des conditions irrégulières au motif que le comité a indiqué dans son avis ne pas être en mesure de rendre un avis éclairé sur le choix de l’acquéreur, dès lors que ce choix n’entrait pas dans l’objet de sa consultation.
25. En septième lieu, les requérants ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance des principes généraux du droit de la commande publique, en particulier des principes de liberté d’accès, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, dès lors que l’opération litigieuse, qui a pour objet la cession d’une participation de l’Etat au capital d’une société, ne relève pas du champ de la commande publique.
26. En huitième et dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le choix du consortium Symbiose comme acquéreur de la participation litigieuse serait entaché d’une erreur manifeste d’appréciation aux seuls motifs allégués par les requérants, tirés de la participation majoritaire détenue au .capital de la société gestionnaire de l’aéroport de Toulouse Francazal par la société SNC Lavalin, qui n’appartenait pas au consortium Symbiose dont l’offre ferme a été sélectionnée, de l’existence d’un pacte d’actionnaires entre l’Etat et l’acquéreur conclu conformément aux dispositions du cahier des charges, de la circonstance que le consortium Symbiose avait proposé le prix d’acquisition le plus élevé parmi les candidats, ni de la prétendue insuffisance de garanties financières du consortium qui n’est étayée par aucune pièce du dossier
27. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir soulevées par le ministre et la société Casil Europe, ni de faire droit à la mesure d’instruction demandée par les requérants, que ceux-ci ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l’annulation, en premier lieu, de la décision du ministre des finances et des comptes publics et du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, rendue publique le 4 décembre 2014, désignant le consortium Symbiose en qualité d’acquéreur pressenti d’une participation au capital de la société ATB, en deuxième lieu, de l’autorisation du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique recueillie le 7 avril 2015 et, en troisième lieu, de l’arrêté du ministre des finances et des comptes publics et du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique en date du 15 avril 2015 fixant les modalités de transfert au secteur privé de la participation litigieuse.
28. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de l’Etat et de la société Casil Europe, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions que la société Casil Europe, d’une part, et le ministre de l’économie et des finances, d’autre part, présentent au même titre.
D E C I D E :
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Article 1er : L’intervention de la société Casil Europe sous le n° 430538 est admise. Les interventions de la société Edeis sous les nos 430538 et 431689 ne sont pas admises.
Article 2 : Les articles 1er et 2 de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 16 avril 2019 sont annulés.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. G… et autres devant la cour administrative d’appel de Paris sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions présentées par l’ensemble des parties devant le Conseil d’Etat et la cour administrative d’appel de Paris au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l’économie et des finances, à la société par actions simplifiée Casil Europe, à M. AX… G…, à Mme AJ… BR…, à MM. BA… Q…, AA… W…, BC… BF…, AR… X…, AC… Y… et M. H… L…, à Mme AV… L…, à MM. E… BH…, BN… AS…, BT… AD…, à la société Aéroport Toulouse-Blagnac, à Europe Ecologie Les Verts Midi-Pyrénées, à l’Union syndicale Solidaires de Haute Garonne, à la Fédération syndicale unitaire 31 et à la société par actions simplifiée Edeis.