Toilette mortuaire : le mort peut attendre

L’interdiction des soins de conservation et de la toilette mortuaire, imposée lors du 1er confinement, insuffisamment justifiée, est annulée par le Conseil d’Etat . 

 

Au fil des mois, la camarde et son traitement juridique évoluent au fil de la pandémie, eux aussi. Voir, pour la dernière réincarnation de ce droit mutant :

Mais trop c’est trop, surtout quand la sévérité n’est pas démontrée.

C’est ce que vient d’estimer le Conseil d’Etat, pour la 1e phase du confinement, celui du printemps dernier.

L’article 1er du décret du 1er avril 2020 insérait en effet dans le décret du 23 mars 2020 un article 12-5 qui disposait que :  » Jusqu’au 30 avril 2020 : /  » -les soins de conservation définis à l’article L. 2223-19-1 du code général des collectivités territoriales sont interdits sur le corps des personnes décédées ; /  » -les défunts atteints ou probablement atteints du covid-19 au moment de leur décès font l’objet d’une mise en bière immédiate. La pratique de la toilette mortuaire est interdite pour ces défunts « .

Or, la mise en bière immédiate est susceptible d’entraîner l’impossibilité pour les proches de personnes décédées de voir le défunt.

Nb : rappelons qu’il s’agissait notamment de prémunir de la contagion les personnes en charge de ladite toilette mortuaire… 

Le Conseil d’Etat ne censure pas ce texte au motif que le Haut conseil de la santé publique avait un autre avis : le gouvernement n’était en effet pas tenu de suivre l’avis du 24 mars 2020 de ce haut conseil, lequel recommandait d’effectuer de telles pratiques en respectant la stricte observance de règles d’hygiène et de mesures de distance physique.

Mais il le censure car le Gouvernement n’a apporté, dans le cadre de la présente instance, aucun élément de nature à justifier de la nécessité d’imposer de façon générale et absolue, à la date où elles ont été édictées, les restrictions prévues par ces dispositions.

Par suite, ces dispositions, en raison de leur caractère général et absolu, portent une atteinte manifestement disproportionnée au droit à une vie privée et familiale normale et doivent, dès lors, être annulées, tranche la Haute Assemblée (dans le cadre d’un contrôle classique de proportionnalité lorsque sont en cause l’exercice de pouvoirs de police, d’une part, et des libertés publiques d’autre part).

 

Source : CE, 22 décembre 2020, n° 439804, à publier aux tables du recueil Lebon