Le texte de loi sur les bibliothèques et la lecture publique n’a pas fini son parcours parlementaire.
Mais il s’avère fort consensuel tant au sein de chaque chambre qu’entre les deux composantes de notre Parlement.
Survolons donc en le contenu à ce jour, après adoption en première lecture en des termes proches par les deux chambres.

En février dernier, la sénatrice (PS) Sylvie Robert déposait une Proposition de loi relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique (n° 339 ).
Il s’agit notamment de prolonger les travaux du rapport « Orsenna-Corbin » de 2017 et du plan bibliothèques :
- Le plan Bibliothèques à livre ouvert
- Quelle réforme des bibliothèques/médiathèques ? avec quelles heures d’ouverture au public ? Avec quel accompagnement financier de l’Etat ?
- Bibliothèques / médiathèques : le Ministère lance sa grande tournée de promotion des horaires élargis, sur fond de flou sur les aides correspondantes
- Bibliothèques/médiathèques : l’État appuiera financièrement ceux qui s’engageront dans une plus grande amplitude horaire d’ouverture
… et de clarifier l’enchevêtrement des compétences en ce domaine. Voici un extrait du premier rapport sur cette proposition de loi au Sénat :
« L’architecture institutionnelle des bibliothèques, plus précisément, de ce qui relève de la « lecture publique », revêt une grande complexité, avec trois acteurs décentralisés concernés.
« Les communes sont ainsi responsables de la création et de la gestion des bibliothèques, en application de la clause de compétence générale dans le domaine culturel. De leur côté, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent choisir d’endosser cette fonction au titre de la compétence optionnelle « équipements culturels ». Enfin, les départements gèrent les anciennes bibliothèques départementales de prêt (BDP), dont le rôle s’inscrit plus dans la coordination, mais sans que la loi ne précise s’il s’agit d’une compétence obligatoire ou optionnelle.
« À la différence des autres domaines patrimoniaux, les bibliothèques n’ont jamais fait l’objet d’une loi-cadre. Jusqu’en 2017, les dispositions relatives à ces établissements ne traitaient que d’aspects administratifs et de rattachement.
« L’ordonnance n° 2017-650 du 27 avril 2017 a permis de clarifier et de donner une cohérence au cadre institutionnel des bibliothèques. Prise en application de l’article 95 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP), elle a refondu entièrement le livre III dédié du code du patrimoine.»
… et d’apporter des définitions en ces domaines, qui semble-t-il manquaient…. et de clarifier certaines dispositions financières (DGD).
Avec un tel programme, nulle surprise que cette proposition ait donné lieu à un travail très très consensuel dans les deux chambres du Parlement, au point que ce texte finit vite et bien son parcours parlementaire apaisé.
I. Le texte devant le Sénat en 1e lecture
L’article 1er définit de manière explicite ces missions, communes à toutes les bibliothèques des collectivités et de leurs groupements, autour de trois grandes thématiques : la conservation et la communication des collections, la mise en place de services autour de leurs missions et l’activité patrimoniale. Cet article inscrit également les activités des bibliothèques dans le respect des grands principes républicains de pluralisme, d’égalité d’accès et de neutralité.
Ils sont complétés par les articles 2 et 3 qui établissent la liberté et la gratuité d’accès aux bibliothèques municipales et intercommunales.
Enfin, l’article 5 reprend le principe de pluralisme et de diversité pour l’appliquer aux collections des bibliothèques des collectivités et de leurs groupements, dont la définition est renvoyée par l’article 4 à un décret en Conseil d’État.
En application de la liberté d’administration des collectivités, l’auteure de la proposition de loi n’a pas souhaité formuler des obligations, mais plutôt tracer un cadre respectueux des compétences locales.
Ainsi, l’article 7 charge les bibliothèques d’établir les orientations générales de leur politique documentaire, orientations que l’assemblée délibérante serait incitée à débattre.
De même, l’article 8 prévoit que les agents travaillant dans les bibliothèques disposent des qualifications nécessaires à l’exercice de ces missions, sans pour autant tracer un cadre contraignant.
L’article 9 de la proposition de loi définit les missions des bibliothèques départementales, en les confortant dans leur rôle d’assistance et de soutien aux bibliothèques des collectivités et de leurs groupements. La question de l’inscription de ces établissements dans les compétences obligatoires des départements n’est pas abordée, mais devra nécessairement être étudiée dans un cadre législatif plus adapté.
Les articles 10 à 12 proposent différentes adaptations, en particulier une extension à d’autres types de groupements de communes de l’éligibilité au concours particulier « bibliothèques » de la dotation de décentralisation (article 10), l’obligation pour une intercommunalité qui exerce la compétence « lecture publique » d’élaborer un schéma de développement (article 11), enfin, la possibilité de céder à titre gratuit à certains organismes sans but lucratif les fonds des bibliothèques devenus sans emploi (article 12).
L’article 13 assure la recevabilité financière de la proposition de loi. III. LES
La commission de la culture du Sénat a fait évoluer le texte de la façon suivante :
• mentions plus claires sur les articles 4, 6 et 7 afin de préciser que ces dispositions s’étendaient aux bibliothèques des collectivités et de leurs groupements.
• amendement qui donne une meilleure définition des missions patrimoniales des bibliothèques.
• amendements permettant de prendre en compte les bibliothèques municipales spécialisées et permettant aux bibliothèques départementales recevant du public de continuer à le faire, sans que cela ne constitue une obligation.
… Conduisant, après passage en plénière, à ce texte adopté en 1e lecture au Sénat :

II. Approbation très consensuelle, avec quelques ajustements, en 1e lecture A.N.
Citons un extrait du rapport, ensuite, à l’Assemblée Nationale (A.N.), de Mme la députée LREM Florence Provendier :
« Adoptée à l’unanimité par le Sénat en juin 2021, cette proposition de loi a ainsi pour ambition de réaffirmer les missions des bibliothèques territoriales dans l’accès à la culture, à l’information, à l’éducation, aux savoirs et aux loisirs mais également les grands principes qui guident leur action tels que l’accès libre et égal, la gratuité, le pluralisme des collections et la neutralité du service public. Ce texte traduit également les évolutions de notre temps en introduisant le numérique dans les usages et collections des bibliothèques et le fait que celles-ci soient des lieux multiples offrant d’autres services que ceux directement relatifs à la lecture publique. La proposition de loi souligne aussi le rôle central du bibliothécaire tant dans la médiation et l’accès au savoir que dans le lien social qu’il tisse. »
Sur la base du rapport de Mme Provendier, les principaux apports de la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation de l’A.N. furent :
• cinq amendements pour :
– affirmer le principe d’égal accès aux bibliothèques territoriales ;
– ajouter la mission de favoriser le développement de la lecture ;
– expliciter la mission de médiation culturelle confiée aux bibliothèques territoriales, qui doit notamment garantir l’exercice des droits culturels, définis comme le droit de chacun de participer à la vie culturelle ;
– ajouter la mission de coopérer avec les organismes culturels, éducatifs et sociaux et les établissements pénitentiaires ;
– inscrire le principe de mutabilité parmi les principes que doivent respecter les bibliothèques dans l’exercice de leurs missions.
• À l’article 4, la commission a introduit le mot « livres » parmi les documents que doivent contenir les collections des bibliothèques et a supprimé le décret d’application prévu pour déterminer la liste des documents et objets que peuvent contenir les collections.
• À l’article 5, la commission a adopté un amendement disposant que les collections des bibliothèques territoriales doivent être exemptes de toutes formes de censure idéologique, politique, religieuse ou de pressions commerciales.
• Enfin, la commission a adopté une nouvelle rédaction de l’article 12, créant un nouvel article L. 3212‑4 au sein du code général de la propriété des personnes publiques. Cet article permet aux bibliothèques de l’État et des collectivités territoriales de donner les livres dont elles n’ont plus l’usage et appartenant au domaine privé à des fondations, associations philanthropiques ou entreprises de l’économie sociale et solidaire et autorise la revente de ces livres par ces bénéficiaires.
En plénière, à l’Assemblée, les amendements notables on porté sur les points suivants :
- lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme ;
- diffusion et à la promotion du patrimoine linguistique ;
- partenariats avec les organismes culturels, éducatifs et sociaux, les établissements pénitentiaires et les établissements d’accueil de la petite enfance ;
- amendement visant à empêcher les départements, qui ont bénéficié du transfert par l’Etat d’une bibliothèque centrale de prêt en application de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983, de supprimer leur bibliothèque départementale
- extension de la DGD Bibliothèques aux établissements publics de coopération culturelle (EPCC) et aux groupements d’intérêt public (GIP)
Voir :

III. Voici donc ce texte tel qu’adopté par l’A.N. et qui revient en 2nde lecture au Sénat, mais qui devrait ressembler au texte définitif tant les divergences entre les deux assemblées ne sont pas notables et tant le consensus entre élus de toutes tendances est, à ce sujet, très net
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