Par un arrêt Société Derichebourg propreté c/ M. S…, en date du 19 janvier 2022 (pourvoi n° 20-14.014), la chambre sociale de la Cour de cassation a considéré que l’employeur ne se rend pas coupable de discrimination en imposant à un salarié de religion hindouiste de travailler dans un cimetière, dès lors que cette mesure est justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante.
En l’espèce, M. S… a été engagé verbalement le 1er septembre 1998 en qualité d’agent de nettoyage par la société France nettoyage. Il a été promu agent très qualifié puis chef d’équipe. Suivant avenant du 1er février 2011, comportant une clause de mobilité, il a été affecté sur le site sur le site de l’immeuble Gallieni à [localité 7] (92), du lundi au vendredi de 13 heures à 16 heures 30, et sur celui de la mutuelle SMI à [Localité 5], du lundi au vendredi de 17 heures à 20 heures 30.
A la suite de la perte par la société France nettoyage, le contrat de travail du salarié a été transféré à la société Derichebourg propreté (la société) à compter du 1er janvier 2012 en application de l’annexe VII à la convention collective nationale des entreprises de propreté, alors applicable.
Le 2 janvier 2012, la société a informé le salarié de sa mutation sur le site Ségula à [localité 8] (78), laquelle a été refusée par l’intéressé. Le 9 février 2012, la société a notifié au salarié sa mutation sur le site du cimetière de [localité 3] (92), du lundi au vendredi de 13 heures à 17 heures. Le salarié a refusé cette mutation en invoquant une incompatibilité d’horaire avec ses autres obligations professionnelles. Après modification par l’employeur des horaires de travail, qui ont été fixés de 12 heures 30 à 16 heures 30, le 24 avril 2012 le salarié a refusé à nouveau cette mutation en invoquant ses convictions religieuses hindouistes lui interdisant de travailler dans un cimetière.
Après convocation le 23 août 2012 à un entretien préalable à une éventuelle sanction pouvant aller jusqu’au licenciement, fixé au 3 septembre 2012, le salarié s’est vu notifier, par lettre du 21 septembre 2012 à effet du 8 octobre suivant, une mutation disciplinaire sur le site de la société Franfinance à [Localité 6] (92). Par lettre du 1er octobre 2012, il a refusé cette mutation. Après avoir été mis en demeure de rejoindre son poste par lettres des 12 et 22 novembre 2012, le salarié a été licencié pour cause réelle et sérieuse le 8 janvier 2013.
Contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud’homale, le 24 juin 2013, de demandes tendant à la nullité de sa mutation disciplinaire du 21 septembre 2012 et de son licenciement, ainsi qu’au paiement de diverses sommes à titre salarial et indemnitaire. Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 17 octobre 2019 qui a estimé que tant la mise en œuvre de la clause de mobilité que la mutation disciplinaire et, par conséquent, le licenciement étaient discriminatoires dès lors que le refus de M. S… étaient justifié par des convictions religieuses.
La Cour de cassation n’a pas adopté la même position et cassé l’arrêt aux motifs que : « En statuant ainsi, alors que la mutation disciplinaire prononcée par l’employeur était justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante au sens de l’article 4, § 1, de la directive 2000/78 du Conseil du 27 novembre 2000 au regard, d’une part de la nature et des conditions d’exercice de l’activité du salarié, chef d’équipe dans le secteur de la propreté, affecté sur un site pour exécuter ses tâches contractuelles en vertu d’une clause de mobilité légitimement mise en oeuvre par l’employeur, d’autre part du caractère proportionné au but recherché de la mesure, laquelle permettait le maintien de la relation de travail par l’affectation du salarié sur un autre site de nettoyage, ce dont elle aurait dû déduire que la mutation disciplinaire ne constituait pas une discrimination directe injustifiée en raison des convictions religieuses et que, dès lors, le licenciement du salarié n’était pas nul, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »
Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :