Le Conseil d’État précise les règles d’indemnisation des congés annuels non pris en raison d’un arrêt de maladie

On se souvient que pour assurer la comptabilité du droit français avec celui de l’Union européenne sur le report des congés payés non pris, le Conseil d’État a considéré (CE, 26 avril 2017, ministre de l’intérieur, avis n°406009) :

  • d’une part, que la période de report des congés payés qu’un agent s’est trouvé, du fait d’un congé de maladie, dans l’impossibilité de prendre au cours d’une année civile donnée est de quinze mois après le terme de cette année ;
  • d’autre part, que ce droit au report ne vaut que dans la limite de quatre semaines de congés non pris.

Cependant, le Conseil d’État ne s’était pas encore prononcé sur l’indemnisation des jours de congés non pris reportables mais non reportés en raison de congés de maladie ou de fin de la relation de travail (voir sur cette question nos deux brèves : https://blog.landot-avocats.net/2018/11/23/conge-annuel-non-pris-la-cjue-etend-les-hypotheses-dindemnisation/; https://blog.landot-avocats.net/2018/11/23/conge-annuel-non-pris-la-cjue-etend-les-hypotheses-dindemnisation/). C’est chose faite. En effet, par un arrêt M. A… c/ ministre de l’intérieur en date du 22 juin 2022 (req. n° 443053), le Conseil d’État apporte une précision sur les règles d’indemnisation des congés annuels non pris en considérant que celle-ci était limitée à l’équivalent de quatre semaines de congés lorsque l’agent se trouve dans l’impossibilité de les prendre en raison d’un arrêt de maladie.

En l’espèce, M. A…, brigadier-chef de police, a été admis à la retraite à compter du 31 décembre 2013. Par un jugement du 27 novembre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’État à l’indemniser, premièrement, des jours restant inscrits, à la date de son départ en retraite, sur son compte épargne-temps, deuxièmement, des heures supplémentaires effectuées et non récupérées à la même date et, enfin, des congés annuels qui, à cette date, n’avaient pas été pris.

Par un arrêt du 16 juin 2020, la cour administrative d’appel de Marseille a, sur appel de M. A…, annulé ce jugement en tant qu’il statue sur les conclusions indemnitaires relatives aux heures supplémentaires non récupérées et aux congés annuels non pris et condamné l’État à verser à l’intéressé, à ces deux titres, les sommes de 1 623,25 euros et 1 050 euros.

Saisi d’un pourvoi par le ministre de l’intérieur, le Conseil d’État a annulé l’arrêt. Certes, constate-t-il d’abord, « la cour administrative d’appel a pu juger à bon droit, ainsi qu’il résulte des termes de son arrêt, que les dispositions de l’article 5 du décret du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l’État ne sont, en tant qu’elles ne prévoient pas l’indemnisation des congés annuels qu’un agent aurait été, en raison d’un arrêt de maladie, dans l’impossibilité de prendre avant la fin de sa relation de travail, pas compatibles avec les dispositions de l’article 7 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003. »

Cependant, tempère la Haute Assemblée, « en condamnant l’État à verser à M. A…, pour cette raison, une indemnité correspondant à vingt-cinq jours de congés payés qui n’avaient pu être pris du fait d’un arrêt de maladie, alors que l’administration devait faire application de la limite de quatre semaines par année de référence, soit vingt jours de congés, prévue par l’article 7 de la directive du 4 novembre 2003, la cour a commis une erreur de droit. »

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :

https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2022-06-22/443053