Quelle publicité des actes de délégation de signature au sein des centres pénitentiaires ?

Un détenu est sanctionné pour avoir gravé sur un mur. Puis il se plaint de cette punition faute pour l’autorité disciplinaire d’avoir vu ses pouvoirs (par délégation) gravés dans le marbre. De fait, cela soulevait une question intéressante : une telle délégation, aux effets internes aux prisons, peut-elle n’être publiée que en préfecture ? Oui répond le Conseil d’Etat.

 

 

M. B… C…, incarcéré au centre pénitentiaire de Liancourt (Oise), s’est vu infliger, par une décision prise le 2 octobre 2017 par la présidente de la commission de discipline du centre pénitentiaire, une sanction de confinement en cellule ordinaire pour une durée de cinq jours, pour avoir été l’auteur, le 29 août 2017, d’une inscription sur le mur d’une cour de promenade du quartier disciplinaire du centre pénitentiaire.

Cette sanction a été confirmée sur recours administratif par une décision du directeur interrégional des services pénitentiaires des Hauts-de-France du 3 novembre 2017, laquelle s’est substituée à la décision initiale du 2 octobre 2017.

Ce directeur adjoint du centre pénitentiaire agissait en vertu d’une délégation de signature qui lui avait été accordée par une décision de la directrice du centre pénitentiaire du 24 juillet 2017, publiée le 11 août 2017 au recueil des actes administratifs de la préfecture de l’Oise, mis en ligne sur le site internet de la préfecture.

Etait contestée la possibilité d’infliger une sanction sur la base de ladite délégation, alors que cette dernière avait donné lieu à (ou plutôt n’avait donné lieu qu’à) publication au recueil des actes administratifs de la préfecture et mis en ligne sur le site internet de cette dernière.

La Haute Assemblée a estimé, de manière souple, qu’eu égard à l’objet d’une délégation de signature, une telle publication au recueil des actes administratifs, qui permet de donner date certaine à la décision de délégation prise par le chef d’établissement, constitue une mesure de publicité adéquate.

A noter aussi cet apport, ainsi résumé au résumé de la base Ariane qui préfigure celui des tables :

« 1) Il résulte des art. R. 57-7-6, R. 57-7-8, R. 57-7-13 et R. 57-7-14 du code de procédure pénale (CPP) que la présence dans la commission de discipline d’un assesseur choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d’encadrement et d’application du personnel de surveillance de l’établissement, qui ne peut être ni l’auteur du compte rendu établi à la suite d’un incident, ni l’auteur du rapport établi à la suite de ce compte rendu, constitue une garantie reconnue au détenu, dont la privation est de nature à vicier la procédure, alors même que la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires, prise sur le recours administratif préalable obligatoire (RAPO) exercé par le détenu, se substitue à celle du président de la commission de discipline. 2) i) L’art. R. 57-6-9 du CPP permet à l’administration pénitentiaire de ne pas communiquer à la personne détenue certains éléments du dossier au cours de la phase préalable à l’intervention d’une décision administrative défavorable. Cet article, comme d’ailleurs dans le cas particulier où est envisagée l’infliction d’une sanction l’art. R. 57-7-16, ne sont pas applicables à l’information de la personne détenue quant à la composition même de la commission de discipline. ii) Est, en revanche, applicable à toutes les procédures dans le cadre desquelles un agent est chargé du traitement d’une affaire, y compris les procédures disciplinaires, l’art. L. 111-2 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA). 3) Si la méconnaissance de l’art. L. 111-2 du CRPA est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision prise, au terme de la procédure, par l’autorité administrative compétente, il appartient au juge administratif, saisi d’un moyen en ce sens, de s’assurer, le cas échéant en ordonnant la production par l’administration des informations nécessaires et sans que communication en soit alors donnée au requérant, que le premier assesseur a bien été choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d’encadrement et d’application du personnel de surveillance de l’établissement et qu’il n’était l’auteur ni du compte rendu d’incident ni du rapport d’enquête, comme l’exigent les art. R. 57-7-8, R. 57-7-13 et R. 57-7-14 du code de procédure pénale.»

 

 

Source :

Conseil d’État, 23 novembre 2022, n° 457621, aux tables du recueil Lebon