Droit minier : le serpent de mer est sorti de son trou (suite et fin aux dires du gouvernement)

En avril 2022, le gouvernement s’était enfin attaqué à la refonte tant attendue du droit minier à travers une série de quatre ordonnances (voir à ce sujet notre article).

Toutefois, ces ordonnances présentaient quelques erreurs et lacunes rectifiées vendredi 11 novembre par la publication de l’ordonnance n° 2022-1423 du 10 novembre 2022 portant diverses dispositions relatives au code minier.

Présentée par le ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et la ministre de la Transition énergétique comme la finalisation de la refonte du code minier initié par la Loi climat et Résilience de 2021, elle s’inscrit dans une volonté d’assurer une meilleure protection de la santé et de l’environnement ainsi que de renforcer la participation des territoires à l’élaboration des décisions publiques dans ce domaine.

Ainsi, outre la correction d’erreurs matérielles, d’intitulés ou de renumérotations du nouveau code minier, certains apports s’avèrent intéressants quand d’autres nous laissent sur notre faim (est-ce donc vraiment le point final de la réforme ?).
Parmi les clarifications et compléments bienvenus on notera notamment :

  • La réalisation d’une analyse environnementale, économique et sociale pour les demandes de prolongation de permis exclusifs de recherches, à l’exception de la géothermie (ajout d’autant important qu’une prolongation des permis exclusifs de recherches minières est possible pour une durée totale du permis ne pouvant excéder 15 ans)
  • La possibilité pour l’autorité compétente de demander la mise à jour totale ou partielle de l’étude environnementale, économique et sociale en cas de changement substantiel des conditions prises en compte à la date où le titre minier a été initialement attribué
  • La prise en compte des intérêts énoncés aux articles L.161-1 et L.161-2 du code minier parmi les critères d’attribution des autorisations d’exploitation ainsi que pour l’application de sanctions administratives
  • L’unification des régimes en matière de prorogation de la durée de validité des d’exploitation de gîte géothermiques
  • La clarification des dispositions en cas de superposition des titres miniers et de connexion hydraulique
  • L’assouplissement du transfert des équipements de surveillance et de prévention des risques entre l’Etat
  • La déclinaison locale de la politique nationale relative à la gestion durable des substances et des usages du sous-sol
  • La soumission à enquête publique de la révision ou la modification des plans de prévention des risques miniers
  • La mise en œuvre d’enquêtes publiques et la consultation des propriétaires dans le cadre de l’élaboration des servitudes d’utilité publique
  • L’harmonisation des polices des mines en s’appuyant dorénavant sur les inspecteurs de l’environnement

Il faut donc bien reconnaître que les apports de cette ordonnance sont loin d’être négligeables. Alors que pourrions-nous lui reprocher ? En premier, le report de l’entrée en vigueur de l’ensemble des dispositions sauf celles relatives aux sanctions administratives (c’est déjà ça !) sous motif de délais de mise en œuvre opérationnelle. Certaines dispositions n’entreront donc en vigueur qu’en juillet 2024 ! Était-ce nécessaire ? On peut en douter… mais il est usuel en droit de l’environnement de différer certains effets pour laisser aux acteurs le temps de s’adapter.

D’autres points, en revanche, auraient mérité d’être encore plus ambitieux, en particulier pour l’outre-mer. Ainsi, à défaut de lutter efficacement contre les sites orpaillés illégalement en Guyane, des autorisations spéciales prévues à l’article L.612-4-1 pourront être délivrées à des opérateurs légaux pour l’occupation de ces mêmes sites.

Autre regret de cette ordonnance, toujours en Guyane, les autorisations d’exploitation ne seront soumises qu’à un examen au cas par cas de l’évaluation environnementale pour des superficies pouvant aller jusqu’à 25 ha. Nul doute que le juge guyanais, particulièrement actif ces dernières années en la matière, s’appropriera ces nouvelles dispositions.