Objectifs en logements sociaux et la loi SRU : que faire si la commune n’a pas de foncier disponible et si le prix de l’immobilier y est prohibitif ? [nouvelle illustration jurisprudentielle de janvier 2023]

Si une commune se trouve dotée d’un prix du foncier très élevé et s’avère dépourvue de zones constructibles… au point par exemple de ne pas arriver à user de son droit de préemption… cette commune peut-elle bénéficier d’une révision à la baisse de ses objectifs de logements sociaux en cas de carence desdits logements sociaux, dans l’application de la loi SRU (art. 55 ; art. L.302-8, VII, du Code de la construction et de l’habitation) ?

Un contentieux très intéressant avait conduit à une réponse très stricte du Conseil d’Etat en ce domaine, en 2021, posant qu’en ce domaine le contrôle (normal) du juge était strict et n’admettant les lignes de défense des communes que dans de rares cas où celles-ci n’ont pas le moins du monde participé à la création des conditions rendant difficile aujourd’hui la réalisation des objectifs de la loi SRU.

Source : CE, 2 juillet 2021, n° 433733, à mentionner aux tables du recueil Lebon ( voir ici cette décision et notre article détaillé). Voir antérieurement et en sens contraire : CAA Versailles, 20 juin 2019, 17VE02936   ; voir l’arrêt et notre commentaire d’alors ici. 

Ce match vient en partie de se rejouer devant le TA de Cergy-Pontoise, avec le même résultat, pour la commune de Saint-Cloud.

Cette dernière avait demandé audit tribunal administratif l’annulation de l’arrêté en date du 21 décembre 2020 prononçant à son encontre une double sanction s’agissant de la période triennale 2017-2019 : la majoration de 170% d’un prélèvement effectué chaque année sur les ressources fiscales de la commune et le transfert à l’Etat de la compétence en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme dans les zones urbaines de la commune.

La ville faisait valoir que le préfet n’avait pas suffisamment pris en considération ses difficultés notamment en raison de son territoire très majoritairement urbanisé. Elle soutenait surtout avoir été privée d’une opportunité sérieuse de réaliser près de trois cents logements sociaux suite au changement de destination de l’ancienne caserne qu’elle aurait pu acquérir dans ce but mais qui va être finalement transformée en musée.

Le tribunal a toutefois relevé que l’accord entre le département et la commune sur la destination de l’ancienne caserne ne comportait aucun échéancier et que l’avancement du projet au moment de son abandon n’était pas suffisant pour en garantir la réalisation sur la période 2017-2019.

En conséquence, par un jugement du 17 janvier 2023, le tribunal a jugé que la non-réalisation par la commune des objectifs sur la période en cause justifiait les deux sanctions qui ne présentaient pas de caractère disproportionné.

Source :

TA Cergy-Pontoise, 17 janvier 2023, n°2102533