Enquête interne et harcèlement sexuel ou moral ou agissements sexistes : la Cour de cassation vient de donner sa grille d’analyse sur le caractère probant, ou non, d’une enquête interne produite par l’employeur. Voici qui intéressera aussi les pouvoirs publics, d’une part, directement, pour leurs agents de droit privé… et, d’autre part, plus indirectement, à titre d’inspiration, pour ce qui est des agents de droit public.
Voyons cela au fil d’une courte vidéo et d’un article.
I. VIDEO (53 secondes ; par G. Glénard)
https://youtube.com/shorts/VT3W8I64aNY

II. ARTICLE (par G. Glénard)
Par un arrêt du 18 juin 2025 (pourvoi n° 23-19.022), la Chambre sociale de la Cour de cassation a précisé qu’en cas de licenciement d’un salarié en raison de la commission de faits de harcèlement sexuel ou moral ou d’agissements sexistes ou à connotation sexuelle, il appartient aux juges du fond d’apprécier la valeur probante d’une enquête interne produite par l’employeur, au regard le cas échéant des autres éléments de preuve produits par les parties.
En l’espèce, la Cour de cassation a considéré que la cour d’appel a bien apprécié la valeur probante du rapport d’enquête interne au regard des autres éléments de preuve produits, de part et d’autre, par les parties.
Voici les motifs de l’arrêt de la Cour de cassation :
« La cour d’appel, par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve produits par les parties, notamment le rapport de l’enquête interne à laquelle avaient conjointement recouru l’employeur et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), a d’abord relevé que les faits du 5 janvier 2018 dénoncés par Mme [D] dans son compte rendu d’entretien étaient décrits de manière assez semblable dans le compte rendu d’entretien de M. [M], mais que le compte rendu d’entretien de Mme [D] était partiellement tronqué concernant les autres faits qu’elle décrivait, sans permettre d’établir qu’elle en avait été personnellement témoin.
Elle a ensuite constaté, d’une part, que les faits dénoncés par Mme [F] n’étaient confirmés par aucune personne en ayant été témoin et qu’il n’était pas produit le compte rendu d’entretien de M. [G], entendu par la commission d’enquête, alors que celui-ci avait reçu en 2017 les confidences de Mme [F] concernant deux des quatre incidents dont elle disait avoir été victime de la part du salarié et, d’autre part, que les faits décrits par Mme [L] n’étaient confirmés par aucune autre personne bien que des salariés en aient été témoins selon l’intéressée.
Elle a encore retenu qu’aucune autre personne n’indiquait avoir été personnellement témoin des remarques faites par le salarié concernant son épouse telles que relatées par M. [H] et il n’apparaissait pas que celui-ci ait été personnellement témoin des autres faits évoqués par lui, outre que les passages de son compte rendu d’entretien y ayant trait avaient été tronqués, le nom des personnes citées étant caviardé, sans que ces faits ne soient corroborés par d’autres éléments.
Elle a enfin constaté que l’intégralité de l’enquête n’était pas versée aux débats puisque seulement cinq comptes rendus sur les quatorze entretiens réalisés étaient produits, que si la société affirmait que cette absence de communication résultait de la volonté de salariés de conserver l’anonymat et de ne pas produire leur témoignage, elle n’expliquait pas en quoi elle n’aurait pu anonymiser ces éléments, et a retenu, procédant à la recherche prétendument omise, que la société ne justifiant pas du motif allégué à ce titre, il ne pouvait être exclu que ces comptes rendus soient absents des pièces produites par la société du fait de leur caractère favorable au salarié ou de ce qu’ils infirmaient précisément tout ou partie des faits imputés à ce dernier, les conclusions de l’enquête n’étant pas à même de suppléer à cette absence de production, ce d’autant plus au regard des conditions de l’enquête critiquées de manière similaire par deux témoins.
En l’état de ces constatations, dont il ressort qu’elle a apprécié la valeur probante du rapport d’enquête interne au regard des autres éléments de preuve produits, de part et d’autre, par les parties, la cour d’appel a estimé que les griefs invoqués par l’employeur à l’appui du licenciement n’étaient pas établis par des éléments suffisamment probants et que le doute devait dès lors profiter à l’intéressé. »
Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :
https://www.courdecassation.fr/decision/6852514ea7fdae5a8046f32f01

En savoir plus sur
Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Vous devez être connecté pour poster un commentaire.