Le maître de l’ouvrage, informé par plusieurs documents de l’intervention sur le chantier d’un sous-traitant non déclaré, qui ne met en demeure l’entrepreneur principal d’y remédier commet une faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle.
Au préalable un petit rappel du contexte et des obligations en la matière s’impose.
La théorie tout d’abord : dans les marchés de travaux de bâtiment et de travaux publics, l’article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance impose au maître de l’ouvrage qui a connaissance de la présence sur le chantier d’un sous-traitant qui n’a pas été déclaré, et qui ne peut donc pas bénéficier du paiement direct, de mettre en demeure l’entrepreneur principal de faire accepter le sous-traitant.
En pratique ensuite : la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, dans un arrêt du 17 décembre 2018, n° 16BX01315 nous enseigne qu’à défaut, le sous-traitant occulte peut invoquer sa responsabilité délictuelle afin d’obtenir réparation intégrale de son préjudice consistant en le paiement des travaux effectués qui ne lui ont pas été réglés. La cour refuse au sous-traitant non déclaré le bénéfice d’une acceptation expresse ou tacite mais ouvre la possibilité d’une action en responsabilité délictuelle. Concrètement, le sous-traitant doit établir que le maître de l’ouvrage était suffisamment informé de la nature de son intervention dans l’exécution du marché et de ses liens avec l’entreprise principale, ce qui n’est pas toujours aisé à démontrer.
En l’espèce, l’intervention du sous-traitant était précisément décrite et chiffrée dans un avenant, tout comme dans la facture et dans le décompte général et définitif que l’entrepreneur principal avait adressé au maître de l’ouvrage ainsi que dans le certificat de paiement pour avancement des travaux établi par le maître d’œuvre. Pour la cour administrative d’appel de Bordeaux, ces éléments établissaient clairement que la commune ne pouvait ignorer ni l’intervention du sous-traitant ni la nature de sa mission dans le cadre de l’exécution du marché.
En cas de procédure collective frappant l’entrepreneur principal, le sous-traitant occulte doit en outre justifier de l’absence de récupération partielle ou totale de la créance à la procédure collective. Le courrier par lequel il déclarait sa créance auprès du mandataire judiciaire n’est pas une preuve suffisante du préjudice.