L’article L. 211-11 du code de la sécurité intérieure prévoit le remboursement, par les organisateurs de manifestations sportives, récréatives ou culturelles, de certaines dépenses qui ont été supportées par les services de police ou de gendarmerie pour mettre en place, dans l’intérêt de ces personnes privées, des services d’ordre à l’occasion des manifestations qu’elles organisent. Fin 2019, déjà, le Conseil d’Etat avait validé l’interprétation faite par le Ministère de l’Intérieur, de ce dispositif.
Bis repetita : hier, la Haute Assemblée a de nouveau refusé ce censurer ce régime. Mais elle a rappelé — voire précisé — les limites strictes de ce régime, via un arrêt à publier aux tables du rec.
Une instruction n° INTK1804913J du 15 mai 2018, signée par G. Collomb, alors ministre d’Etat, ministre de l’intérieur prévoyait l’indemnisation des services d’ordre.
Il s’agissait pour le Ministre de mettre en oeuvre l’article L. 211-11 du code de la sécurité intérieure.
Cet article prévoit le remboursement, par les organisateurs de manifestations sportives, récréatives ou culturelles, de certaines dépenses qui ont été supportées par les services de police ou de gendarmerie pour mettre en place, dans l’intérêt de ces personnes privées, des services d’ordre à l’occasion des manifestations qu’elles organisent.
Bref, l’Etat doit déployer des forces de police ou de gendarmerie, alors autant qu’il les facture comme n’importe quel autre service de sécurité ou autres bandes de Hells Angels appelés à assurer la « sécu » d’un concert.
Source pour la partie de gauche : Litteul Kevin (de feu le génial Coyote) bien sûr ! Source pour la partie de droite, voir Spenser on Unsplash
Le Conseil d’Etat a pour l’essentiel validé cette circulaire, fin 2019, et notamment son principe même fondé sur une disposition législative : seules deux prescriptions relatives aux modalités de paiement ont été censurées.
Conseil d’État, 5ème – 6ème chambres réunies, 31/12/2019, 422679, Inédit au recueil Lebon
Hier, par un arrêt à mentionner aux tables, le Conseil d’Etat est revenu sur ce régime, en en confirmant la légalité et, même, la constitutionnalité, mais avec d’importantes précisions.
Ces dispositions, précise la Haute Assemblée :
« n’ont, en tout état de cause, ni pour objet ni pour effet de soumettre les forces de police ou de gendarmerie exerçant de telles missions à l’autorité de ces personnes privées.»
Bon… Les Hells angels, quand ils font de la sécurité… ne se placent parfois que très très théoriquement sous l’autorité des organisateurs privés de manifestations (voir ici pour les douloureux épisodes du Festival d’Altamont avec les Stones). Mais bon cette distinction est importante à rappeler.
D’autant que celle-ci n’est pas sans conséquences. Notamment, le Conseil d’Etat en déduit que :
« le deuxième alinéa de l’article L. 211-1 du CSI ne méconnaît pas l’article 12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 (DDHC). »
Le deuxième alinéa de l’article L. 211-1 du CSI ne prévoit pas d’obligation, pour les personnes physiques ou morales qu’il mentionne, de confier aux forces de police ou de gendarmerie les services d’ordre qu’elles mettent en place pour leurs propres besoins (certes…).
Il ne prévoit, lorsque ces personnes décident d’y avoir recours, le remboursement à l’Etat que des seules dépenses correspondant aux missions qui, exercées dans leur intérêt, excèdent les besoins normaux de sécurité auxquels la collectivité est tenue de pourvoir dans l’intérêt général, pose le Conseil d’Etat (sur ce point, on retrouve des débats importants que l’on a eu aussi en matière d’incendie et de secours, de secours en mer ou en montagne, etc.).
Le Conseil d’Etat en déduit que l’article L. 211-1 du CSI ne fait pas peser sur des personnes privées des dépenses qui incombent à l’Etat. Dès lors, il ne méconnaît pas, pour ce motif, l’article 13 de la DDHC relatif à l’égalité devant les charges publiques.
CE, 16 mars 2021, n° 448010, à mentionner aux tables du recueil Lebon
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