Langues régionales : le Conseil constitutionnel plus sensible à la défense de l’exclusivité du français qu’à celle du principe d’égalité en matière de financement scolaire

Le Conseil constitutionnel a censuré partiellement la loi Molac sur les langues régionales. Cette censure partielle porte, non pas sur le financement des écoles mais sur l’ « enseignement immersif » et sur l’utilisation de signes diacritiques dans les actes de l’état-civil.

Chacun attendait au tournant le Conseil constitutionnel sur la question sensible du paiement du forfait scolaire pour les écoles privées, à payer par la commune de résidence quand un élève va dans l’école d’une autre commune au motif que ladite école d’accueil a — pour schématiser — un enseignement de langue régionale :

 

Mais ce n’est pas sur ce point que la future loi Molac a été censurée.

En revanche, c’est sur l’enseignement immersif (Nb l’auteur de ses lignes a trois de ses enfants en enseignement immersif en anglais et lesdits gamins s’en portent très bien… et ne sont pas moins français pour autant mais bon…) et sur les signes diacritiques (notamment le fameux tilde ~ utilisé en breton comme pour Fãnch dans les actes de l’état civil) que le Conseil constitutionnel a cru devoir défendre haut et fort l’unité (jacobine ?) de notre Nation.

Sur ce sujet ô combien symbolique et riche (lourd ?) en vives émotions, chacun aura bien sûr un point de vue d’autant plus vif qu’il s’ancrera dans ses propres madeleines de Proust. Alors plutôt que de laisser s’épancher plus avant mes sentiments (nettement girondins), voici :

  • I. Le texte du communiqué du Conseil
  • II. La décision n° 2021-818 DC du 21 mai 2021

 

I. Le texte du communiqué du Conseil

 

Par sa décision n° 2021-818 DC du 21 mai 2021, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, dont il avait été saisi par plus de soixante députés.

* Une question de recevabilité de ce recours a été tranchée par le Conseil constitutionnel, en réponse à la demande formée par quatre de ses soixante-et-un signataires, postérieurement à son enregistrement par le greffe du Conseil constitutionnel, que leurs signatures en soient retirées.
Le Conseil constitutionnel a rappelé que, en vertu de l’article 61 de la Constitution et de l’article 18 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, la saisine du Conseil constitutionnel par les membres du Parlement résulte indivisiblement d’une ou plusieurs lettres signées par au moins soixante députés ou soixante sénateurs. L’effet de cette saisine est de mettre en œuvre, avant la clôture de la procédure législative, la vérification par le Conseil constitutionnel des dispositions de la loi déférée. Aucune disposition de la Constitution non plus que de la loi organique relative au Conseil constitutionnel ne permet aux autorités ou parlementaires habilités à déférer une loi au Conseil constitutionnel de le dessaisir en faisant obstacle à la mise en œuvre du contrôle de constitutionnalité engagé. Dès lors, hormis les cas d’erreur matérielle, de fraude ou de vice du consentement, le Conseil constitutionnel ne saurait prendre en compte des demandes exprimées en ce sens.

En l’espèce, le Conseil constitutionnel a jugé qu’il ne ressortait pas de l’instruction que le consentement des députés ayant demandé le retrait de leur signature eût été vicié ou que ceux-ci eussent commis une erreur matérielle en saisissant le Conseil constitutionnel. Les signatures que comporte la saisine ont pu être authentifiées. Le Conseil constitutionnel a jugé qu’il y avait lieu, par suite, de les faire figurer au nombre des signataires de la saisine.

* L’unique article contesté par les députés requérants était l’article 6 de la loi déférée, qui modifie les dispositions de l’article L. 442-5-1 du code de l’éducation relatives aux modalités de participation financière d’une commune à la scolarisation d’un enfant résidant sur son territoire dans un établissement privé du premier degré situé sur le territoire d’une autre commune et dispensant un enseignement de langue régionale. Les dispositions contestées prévoient que la participation financière à la scolarisation des enfants dans les établissements privés du premier degré sous contrat d’association dispensant un enseignement de langue régionale fait l’objet d’un accord entre la commune de résidence et l’établissement d’enseignement situé sur le territoire d’une autre commune, à la condition que la commune de résidence ne dispose pas d’école dispensant un enseignement de langue régionale.

Pour se prononcer sur sa conformité à la Constitution, le Conseil constitutionnel a rappelé que, aux termes de l’article 2 de la Constitution, « La langue de la République est le français ». Cette disposition n’interdit pas à l’État et aux collectivités territoriales, pour concourir à la protection et à la promotion des langues régionales, d’apporter leur aide aux associations ayant cet objet.

A l’aune du cadre constitutionnel ainsi rappelé, le Conseil constitutionnel relève, d’une part, que les dispositions contestées n’ont pas pour effet d’imposer l’usage d’une langue autre que le français à une personne morale de droit public ou à une personne de droit privé dans l’exercice d’une mission de service public. Elles n’ont pas non plus pour effet de permettre à des particuliers de se prévaloir, dans leurs relations avec les administrations et les services publics, d’un droit à l’usage d’une langue autre que le français, ni de les contraindre à un tel usage. D’autre part, le seul fait de prévoir, dans les conditions prévues par les dispositions contestées, la participation d’une commune au financement de la scolarisation d’un élève résidant sur son territoire et souhaitant être scolarisé dans un établissement du premier degré sous contrat d’association situé sur le territoire d’une autre commune au motif qu’il dispense un enseignement de langue régionale au sens du 2 ° de l’article L. 312-10, ne méconnaît pas le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution.

* Le Conseil constitutionnel s’est par ailleurs saisi d’office de deux autres dispositions de la loi déférée.

– D’une part, il a statué sur son article 4, qui étend les formes dans lesquelles peut être proposé, dans le cadre des programmes de l’enseignement public, un enseignement facultatif de langue régionale. Il prévoit que cet enseignement peut être proposé sous la forme d’un enseignement immersif en langue régionale, sans préjudice d’une bonne connaissance de la langue française.

Le Conseil constitutionnel a rappelé que, en vertu des dispositions de l’article 2 de la Constitution, l’usage du français s’impose aux personnes morales de droit public et aux personnes de droit privé dans l’exercice d’une mission de service public. Les particuliers ne peuvent se prévaloir, dans leurs relations avec les administrations et les services publics, d’un droit à l’usage d’une langue autre que le français, ni être contraints à un tel usage. Il a également rappelé que, aux termes de l’article 75-1 de la Constitution, « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Il en résulte que si, pour concourir à la protection et à la promotion des langues régionales, leur enseignement peut être prévu dans les établissements qui assurent le service public de l’enseignement ou sont associés à celui-ci, c’est à la condition de respecter les exigences précitées de l’article 2 de la Constitution.

A cette aune, le Conseil constitutionnel relève qu’il résulte notamment des travaux préparatoires de la loi déférée que l’enseignement immersif d’une langue régionale est une méthode qui ne se borne pas à enseigner cette langue mais consiste à l’utiliser comme langue principale d’enseignement et comme langue de communication au sein de l’établissement.

Il en déduit que, en prévoyant que l’enseignement d’une langue régionale peut prendre la forme d’un enseignement immersif, l’article 4 de la loi déférée méconnaît l’article 2 de la Constitution.

– D’autre part, il a statué sur l’article 9 de la loi déférée, qui autorise les signes diacritiques des langues régionales dans les actes de l’état civil.

Le Conseil constitutionnel juge que, en prévoyant que des mentions des actes de l’état civil peuvent être rédigées avec des signes diacritiques autres que ceux employés pour l’écriture de la langue française, ces dispositions reconnaissent aux particuliers un droit à l’usage d’une langue autre que le français dans leurs relations avec les administrations et les services publics. Dès lors, elles méconnaissent les exigences précitées de l’article 2 de la Constitution.

 

II. Le texte de cette décision

 

Décision n° 2021-818 DC du 21 mai 2021

Loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion [Non conformité partielle]

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 61 de la Constitution, de la loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, sous le n° 2021-818 DC, le 22 avril 2021, par Mme Aurore BERGÉ, M. Didier BAICHÈRE, Mme Géraldine BANNIER, MM. Xavier BATUT, Grégory BESSON-MOREAU, Yves BLEIN, Pierre-Yves BOURNAZEL, Mmes Blandine BROCARD, Danielle BRULEBOIS, Samantha CAZEBONNE, Fannette CHARVIER, MM. Francis CHOUAT, François CORMIER-BOULIGEON, David CORCEIRO, Dominique DA SILVA, Frédéric DESCROZAILLE, Mme Françoise DUMAS, MM. Jean-François ELIAOU, Jean-Michel FAUVERGUE, Alexandre FRESCHI, Mmes Agnès FIRMIN LE BODO, Pascale FONTENEL-PERSONNE, M. Luc GEISMAR, Mmes Anne GENETET, Perrine GOULET, Florence GRANJUS, M. Benjamin GRIVEAUX, Mmes Marie GUÉVENOUX, Christine HENNION, MM. Pierre HENRIET, Christophe JERRETIE, François JOLIVET, Guillaume KASBARIAN, Mmes Aina KURIC, Anne-Christine LANG, M. Philippe LATOMBE, Mmes Célia de LAVERGNE, Monique LIMON, Aude LUQUET, M. Sylvain MAILLARD, Mme Sereine MAUBORGNE, M. Jacques MARILOSSIAN, Mme Jacqueline MAQUET, MM. Jean-Baptiste MOREAU, Bruno MILLIENNE, Jean-Michel MIS, Mmes Cendra MOTIN, Naïma MOUTCHOU, Catherine OSSON, Valérie PETIT, Michèle PEYRON, Béatrice PIRON, M. Jean-Pierre PONT, Mmes Cathy RACON-BOUZON, Stéphanie RIST, Laëtitia ROMEIRO DIAS, MM. Stéphane TESTÉ, Stéphane TRAVERT, Nicolas TURQUOIS, Mmes Michèle de VAUCOULEURS et Laurence VICHNIEVSKY, députés.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code de l’éducation ;

Au vu des pièces suivantes :

  • le courrier électronique de Mme BRULEBOIS, enregistré le 22 avril 2021 ;
  • les courriers électroniques de Mmes LIMON, PEYRON et de M. DA SILVA, enregistrés le 23 avril 2021 ;
  • les observations complémentaires présentées par Mme PEYRON, à la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l’instruction, enregistrées le 27 avril 2021 ;
  • les observations complémentaires présentées par M. DA SILVA, à la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l’instruction, enregistrées le même jour ;
  • les observations complémentaires présentées par Mme LIMON, à la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l’instruction, enregistrées le 29 avril 2021 ;
  • la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l’instruction adressée le 26 avril 2021 à Mme BRULEBOIS, qui n’a pas produit d’observations ;

Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 14 mai 2021 ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion. Ils contestent son article 6.

2. Quatre députés signataires de la saisine ont, postérieurement à son enregistrement par le Conseil constitutionnel, demandé à ne pas être comptés parmi les signataires, en invoquant qu’ils auraient soit exprimé leur souhait de retirer leur signature auprès d’un de leur collègue avant le dépôt officiel de la saisine, soit signé « de manière précipitée », soit commis une « erreur » sans autre précision.

3. En vertu de l’article 61 de la Constitution et de l’article 18 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, la saisine du Conseil constitutionnel par les membres du Parlement résulte indivisiblement d’une ou plusieurs lettres signées par au moins soixante députés ou soixante sénateurs. L’effet de cette saisine est de mettre en œuvre, avant la clôture de la procédure législative, la vérification par le Conseil constitutionnel des dispositions de la loi déférée. Aucune disposition de la Constitution non plus que de la loi organique relative au Conseil constitutionnel ne permet aux autorités ou parlementaires habilités à déférer une loi au Conseil constitutionnel de le dessaisir en faisant obstacle à la mise en œuvre du contrôle de constitutionnalité engagé. Dès lors, hormis les cas d’erreur matérielle, de fraude ou de vice du consentement, le Conseil constitutionnel ne saurait prendre en compte des demandes exprimées en ce sens.

4. Il ne ressort pas de l’instruction que le consentement des députés ayant demandé le retrait de leur signature ait été vicié ou que ceux-ci aient commis une erreur matérielle en saisissant le Conseil constitutionnel. Les signatures que comporte la saisine ont pu être authentifiées. Il y a lieu, par suite, de les faire figurer au nombre des signataires de la saisine.

– Sur l’article 6 :

5. L’article 6 de la loi déférée modifie les dispositions de l’article L. 442-5-1 du code de l’éducation relatives aux modalités de participation financière d’une commune à la scolarisation d’un enfant résidant sur son territoire dans un établissement privé du premier degré situé sur le territoire d’une autre commune et dispensant un enseignement de langue régionale.

6. Les députés requérants considèrent que cet article impose à une commune de participer au financement de la scolarisation d’un enfant résidant sur son territoire dans un établissement privé situé sur le territoire d’une autre commune afin de pouvoir suivre un enseignement de langues régionales. Il en résulterait une méconnaissance de la jurisprudence du Conseil constitutionnel selon laquelle, en application de l’article 2 de la Constitution, l’enseignement des langues régionales ne saurait présenter qu’un caractère facultatif.

7. Aux termes du premier alinéa de l’article 2 de la Constitution : « La langue de la République est le français ».

8. Cette disposition n’interdit pas à l’État et aux collectivités territoriales, pour concourir à la protection et à la promotion des langues régionales, d’apporter leur aide aux associations ayant cet objet.

9. En application du premier alinéa de l’article L. 442-5-1 du code de l’éducation, la contribution de la commune de résidence pour un élève scolarisé dans une autre commune dans une classe d’un établissement privé du premier degré sous contrat d’association constitue une dépense obligatoire lorsque cette contribution aurait également été due si cet élève avait été scolarisé dans une des écoles publiques de la commune d’accueil. En application des sixième et septième alinéas de ce même article, la participation financière à la scolarisation des enfants dans ceux de ces établissements dispensant un enseignement de langue régionale au sens du 2 ° de l’article L. 312-10 du code de l’éducation, lorsque cet établissement est situé sur le territoire d’une autre commune, est une contribution volontaire. Elle fait l’objet d’un accord entre la commune de résidence et l’établissement d’enseignement situé sur le territoire de la commune d’accueil, à la condition que la commune de résidence ne dispose pas d’école dispensant un enseignement de langue régionale.

10. En application du 2 ° de l’article L. 312-10, l’enseignement facultatif de langue et culture régionales peut être proposé sous la forme d’un enseignement bilingue en langue française et en langue régionale.

11. L’article 6 remplace les sixième et septième alinéas de l’article L. 442-5-1 par un seul alinéa prévoyant que la participation financière à la scolarisation des enfants dans les établissements privés du premier degré sous contrat d’association dispensant un enseignement de langue régionale au sens du 2 ° de l’article L. 312-10 fait l’objet d’un accord entre la commune de résidence et l’établissement d’enseignement situé sur le territoire d’une autre commune, à la condition que la commune de résidence ne dispose pas d’école dispensant un enseignement de langue régionale.

12. En application du huitième alinéa de l’article L. 442-5-1, qui devient son septième alinéa, à défaut d’accord, le représentant de l’État dans le département réunit le maire de la commune de résidence et le responsable de l’établissement afin de permettre la résolution du différend en matière de participation financière, dans l’intérêt de la scolarisation des enfants en cause.

13. D’une part, les dispositions contestées n’ont pas pour effet d’imposer l’usage d’une langue autre que le français à une personne morale de droit public ou à une personne de droit privé dans l’exercice d’une mission de service public. Elles n’ont pas non plus pour effet de permettre à des particuliers de se prévaloir, dans leurs relations avec les administrations et les services publics, d’un droit à l’usage d’une langue autre que le français, ni de les contraindre à un tel usage. D’autre part, le seul fait de prévoir, dans les conditions prévues par les dispositions contestées, la participation d’une commune au financement de la scolarisation d’un élève résidant sur son territoire et souhaitant être scolarisé dans un établissement du premier degré sous contrat d’association situé sur le territoire d’une autre commune au motif qu’il dispense un enseignement de langue régionale au sens du 2 ° de l’article L. 312-10, ne méconnaît pas le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution.

14. Le grief tiré de ce que les dispositions contestées méconnaissent le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution doit donc être écarté. Le sixième alinéa de l’article L. 442-5-1 du code de l’éducation, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution.

– Sur d’autres dispositions :

. En ce qui concerne l’article 4 :

15. L’article 4 étend les formes dans lesquelles peut être proposé, dans le cadre des programmes de l’enseignement public, un enseignement facultatif de langue régionale. Il prévoit que cet enseignement peut être proposé sous la forme d’un enseignement immersif en langue régionale, sans préjudice d’une bonne connaissance de la langue française.

16. En vertu des dispositions de l’article 2 de la Constitution, l’usage du français s’impose aux personnes morales de droit public et aux personnes de droit privé dans l’exercice d’une mission de service public. Les particuliers ne peuvent se prévaloir, dans leurs relations avec les administrations et les services publics, d’un droit à l’usage d’une langue autre que le français, ni être contraints à un tel usage.

17. Aux termes de l’article 75-1 de la Constitution : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».

18. Si, pour concourir à la protection et à la promotion des langues régionales, leur enseignement peut être prévu dans les établissements qui assurent le service public de l’enseignement ou sont associés à celui-ci, c’est à la condition de respecter les exigences précitées de l’article 2 de la Constitution.

19. Or, il résulte notamment des travaux préparatoires de la loi déférée que l’enseignement immersif d’une langue régionale est une méthode qui ne se borne pas à enseigner cette langue mais consiste à l’utiliser comme langue principale d’enseignement et comme langue de communication au sein de l’établissement.

20. Par conséquent, en prévoyant que l’enseignement d’une langue régionale peut prendre la forme d’un enseignement immersif, l’article 4 de la loi déférée méconnaît l’article 2 de la Constitution. Il est donc contraire à la Constitution.

. En ce qui concerne l’article 9 :

21. L’article 9 prévoit que les signes diacritiques des langues régionales sont autorisés dans les actes de l’état civil.

22. En prévoyant que des mentions des actes de l’état civil peuvent être rédigées avec des signes diacritiques autres que ceux employés pour l’écriture de la langue française, ces dispositions reconnaissent aux particuliers un droit à l’usage d’une langue autre que le français dans leurs relations avec les administrations et les services publics. Dès lors, elles méconnaissent les exigences précitées de l’article 2 de la Constitution.

23. Par conséquent, l’article 9 de la loi déférée est contraire à la Constitution.

– Sur les autres dispositions :

24. Le Conseil constitutionnel n’a soulevé d’office aucune autre question de conformité à la Constitution et ne s’est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. – Les articles 4 et 9 de la loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion sont contraires à la Constitution.

Article 2. – Le sixième alinéa de l’article L. 442-5-1 du code de l’éducation, dans sa rédaction résultant de l’article 6 de la même loi, est conforme à la Constitution.

Article 3. – Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 mai 2021, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT.

Rendu public le 21 mai 2021.

ECLI : FR : CC : 2021 : 2021.818.DC