Contenu du SCOT : attention à ne pas oublier la protection de la biodiversité

La Cour administrative d’appel de Douai vient de rendre un arrêt intéressant en ce qu’il rappelle que le contenu d’un SCOT doit, pour être légal, conserver une certaine cohérence (à ce propos, nous remercions M. Gabriel Ulmann pour la transmission de cette décision).

En l’espèce, la révision du SCOT avait notamment pour effet de permettre dans une zone pourtant qualifiée de « réservoir de biodiversité » l’exercice d’activités économiques comprenant notamment l’exploitation du sous-sol ainsi que le stockage et le traitement de déchets.

Or, le rapport de présentation ne contenait pas de développements particuliers exposant les incidences de ces activités sur cette zone.

Pour la Cour, il s’agit d’une lacune qui est de nature à fragiliser la légalité du SCOT :

« Or, en dépit des conséquences dommageables que sont susceptibles de provoquer, par leur objet, de telles activités sur les espaces naturels identifiés comme des  » réservoirs de biodiversité « , le rapport de présentation relève que  » les éléments de la trame verte et bleue du SCoT constituent une contrainte pour les projets d’exploitation des ressources du sous-sol « , sans analyser les incidences prévisibles notables de la mise en œuvre des objectifs 3.2.1 et 3.2.5 du document d’orientation et d’objectifs sur les zones revêtant une importance particulière pour l’environnement et, en particulier, sur les zones Natura 2000. Si le rapport recommande que les projets d’exploitation des ressources du sous-sol présentent  » des conditions de remise en état et de mise en œuvre dans le temps particulièrement adaptés aux sites concernés et à leurs abords  » et réduisent leurs impacts  » en optimisant au maximum le phasage du projet, ainsi que la taille des espaces impactés lors d’une même phase « , ces recommandations générales ne sauraient pallier les lacunes mentionnées ci-dessus compte tenu de l’objet des activités économiques en cause et du caractère remarquable et sensible des espaces naturels susceptibles d’être impactés.

15. Dans ces conditions, les appelantes sont fondées à soutenir que le rapport de présentation méconnaît les prescriptions des articles L. 141-3, L. 151-4 et R. 141-2 du code de l’urbanisme, en tant qu’il n’analyse pas les incidences prévisibles notables de la mise en œuvre du schéma dans les espaces qu’il identifie comme des  » réservoirs de biodiversité « .

Mais la Cour va plus loin en se penchant sur le moyen qui était tiré de la méconnaissance par le SCOT de l’article 6 de la Charte sur l’environnement.

Selon cette article  » Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social. « 

Pour la Cour :

« Il résulte de cette disposition qu’il appartient aux autorités compétentes de veiller à concilier, dans la conception des politiques publiques, la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social ».

En ce qu’il autorise les activités économiques précitées sans prévoir de mesures particulières pour assurer la protection de la biodiversité, le SCOT ne respecte pas l’article 6 de la Charte de l’environnement :

« le schéma de cohérence territoriale permet le développement d’une catégorie d’activités économiques qui, par leur objet, sont susceptibles de provoquer des dommages notables sur les milieux naturels, en l’espèce les plus remarquables et sensibles du territoire communautaire, sans prévoir, par des prescriptions adaptées qui n’empiètent pas sur le contenu d’autres documents d’urbanisme ou celui des autorisations administratives qui seraient requises, des conditions suffisamment protectrices de la biodiversité et des continuités écologiques.

Eu égard au nombre et à l’importance d’un point de vue environnemental des espaces naturels susceptibles d’être notablement impactés à l’échelle du territoire communautaire, cette lacune est de nature à entraîner un déséquilibre manifeste dans la poursuite des objectifs mentionnés à l’article L. 101-2 du code de l’environnement, en particulier entre les objectifs de satisfaction des besoins économiques et de protection des milieux naturels, de la biodiversité et des continuités écologiques, alors même que, par ailleurs, le schéma réduit de plus de moitié, par rapport à celui précédent, les objectifs de consommation foncière et comporte des mesures protectrices des ressources en eau et du patrimoine culturel et paysager.

Par suite, les appelantes sont fondées à soutenir que le schéma de cohérence territoriale méconnaît les exigences du principe de conciliation inscrit à l’article 6 de la Charte de l’environnement et précisé par les dispositions précitées de l’article L. 101-2 du code de l’environnement, en tant que les dispositions des objectifs 3.2.1 et 3.2.5 du document d’orientation et d’objectifs permettent l’exploitation des ressources du sous-sol dans les espaces identifiés comme des  » réservoirs de biodiversité « . »

Les éléments du SCOT permettant l’exploitation du sous-sol dans « les réservoirs  de biodiversité » identifiés dans ce document sont donc annulés.

Ref. : CAA Douai, 12 octobre 2021, Association Valois Environnement, req., n° 20DA00617. Pour lire l’arrêt, cliquer ici