La liberté syndicale n’exonère pas un syndicaliste de ses obligations professionnelles.

Par un arrêt société La Poste en date du 30 décembre 2021 (req. n° 445128), le Conseil d’État a considéré, dans la ligne d’une jurisprudence constante, que la liberté d’action et d’expression syndicale doit être conciliée avec les obligations déontologiques et les contraintes liées à la sécurité et au bon fonctionnement du service. Ce faisant, cette liberté n’exempte pas un syndicaliste de ses obligations professionnelles. Ainsi, il peut faire l’objet d’une procédure disciplinaire dès lors qu’il commet une faute disciplinaire y compris dans le cadre de son activité syndicale.

En l’espèce, M. E…, agent de La Poste affecté à Annecy et bénéficiant de décharges de fonctions à raison de ses responsabilités syndicales, a fait l’objet, par décision prise le 13 juin 2016, d’une exclusion temporaire de fonctions d’une durée de quinze jours, dont huit jours avec sursis, fondée sur quatre motifs tirés respectivement de ce qu’il avait pris la parole de façon intempestive et collective sans autorisation pendant les heures de service et en perturbant l’exploitation des centres de tri de Thonon et d’Annemasse, de ce qu’il avait refusé d’obtempérer aux injonctions des directeurs de ces centres, de ce qu’il n’avait pas respecté les consignes de sécurité d’un espace sécurisé et de ce qu’il avait méconnu les règles d’exercice du droit syndical à La Poste.

Alors que par un jugement du 6 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble avait rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision, saisie d’un appel, la cour administrative d’appel de Lyon a, par un arrêt du 6 août 2020, jugé le contraire. La Poste s’est alors pourvue en cassation devant le Conseil d’État.

La Haute Assemblée rappelle tout d’abord que « si les agents publics qui exercent des fonctions syndicales disposent de la liberté d’action et d’expression particulière qu’exigent l’exercice de leur mandat et la défense des intérêts des personnels qu’ils représentent, cette liberté doit être conciliée avec le respect des règles encadrant l’exercice du droit syndical dans la fonction publique et le droit de grève, ainsi que de leurs obligations déontologiques et des contraintes liées à la sécurité et au bon fonctionnement du service. »

Or, poursuit le Conseil d’État, « pour juger que les faits reprochés à M. E… ne pouvaient être qualifiés de faute disciplinaire, la cour administrative d’appel s’est bornée à relever que l’agent intervenant à titre syndical dans un établissement où il n’est pas affecté ne peut être regardé comme accomplissant une tâche liée à ses fonctions ni, partant, recevoir d’instruction hiérarchique et que l’intéressé ne pouvait dès lors être sanctionné en raison de la méconnaissance des consignes données par la hiérarchie des centres de tri de Thonon et Annemasse. En statuant ainsi, sans rechercher si les consignes en cause relevaient d’obligations de sécurité et de la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du service, dont les directeurs des centres de tri sont responsables, la cour a commis une erreur de droit. »

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :

https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2021-12-30/445128