Par un arrêt Mme C. c/ commune de Pont-du-Château (Puy-de-Dôme) en date du 29 décembre 2021 (req. n° 433838), le Conseil d’État a considéré que si un agent qui dénonce des faits de harcèlement moral dont il s’estime victime ou dont il est témoin ne peut pour cette raison être disciplinairement sanctionné, il doit en revanche le faire dans le respect de son obligation de réserve. À défaut, une procédure disciplinaire peut être engagée à son encontre.
Les faits sont les suivants : Mme C…, adjointe administrative de deuxième classe au sein des services de la commune de Pont-du-Château, a adressé, le 24 novembre 2015, un courrier électronique à des élus de la commune afin de dénoncer des faits de harcèlement moral dont elle s’estimait victime. Par un arrêté du 17 décembre 2015, le maire de Pont-du-Château lui a infligé un blâme au motif que ce courriel constituait un manquement à son devoir de réserve.
Saisie par Mme C., le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, par un jugement du 13 avril 2017, notamment annulé cet arrêté. Toutefois, par arrêt du 25 juin 2019 de la cour administrative d’appel de Lyon a annulé, sur l’appel de la commune de Pont-du-Château, ce jugement et rejeté les conclusions de première instance tendant à l’annulation de l’arrêté litigieux. Mme C. s’est alors pourvu en cassation devant le Conseil d’État.
Ce dernier lui a donné raison en précisant les limites que l’agent ne doit pas franchir quand il dénonce un harcèlement moral dont il s’estime victime. En effet, si en vertu des dispositions de l’article 6 quiquies de la loi du 13 juillet 1983, « les fonctionnaires ne peuvent être sanctionnés lorsqu’ils sont amenés à dénoncer des faits de harcèlement moral dont ils sont victimes ou témoins », en revanche « l’exercice du droit à dénonciation de ces faits doit être concilié avec le respect de leurs obligations déontologiques, notamment de l’obligation de réserve à laquelle ils sont tenus et qui leur impose de faire preuve de mesure dans leur expression. Lorsque le juge est saisi d’une contestation de la sanction infligée à un fonctionnaire à raison de cette dénonciation, il lui appartient, pour apprécier l’existence d’un manquement à l’obligation de réserve et, le cas échéant, pour déterminer si la sanction est justifiée et proportionnée, de prendre en compte les agissements de l’administration dont le fonctionnaire s’estime victime ainsi que les conditions dans lesquelles ce dernier a dénoncé les faits, au regard notamment de la teneur des propos tenus, de leurs destinataires et des démarches qu’il aurait préalablement accomplies pour alerter sur sa situation. »
Par suite, poursuit le Conseil d’État « en jugeant que Mme C… avait manqué à son obligation de réserve en dénonçant, par un courriel formulé en des termes excessifs et adressé à un large cercle d’élus de la commune de Pont-du-Château, le harcèlement moral dont elle s’estimait victime, sans prendre en compte les agissements que Mme C… estimait avoir subi, la cour administrative d’appel de Lyon a commis une erreur de droit. »
Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :
https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2021-12-29/433838