Lorsqu’une opération de lotissement a été autorisée par l’autorité administrative, les règles d’urbanisme sont en principe figées pendant cinq ans à compter, soit de la délivrance de l’autorisation lorsque la division a été effectuée par une déclaration préalable, soit de la fin des travaux d’aménagement en cas de délivrance d’un permis d’aménager.
Cette cristallisation de la règle d’urbanisme pour les lotissements est posée très clairement par l’article L. 442-14 du Code de l’urbanisme :
“Lorsque le lotissement a fait l’objet d’une déclaration préalable, le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme nouvelles intervenues depuis la date de non-opposition à la déclaration préalable, et ce pendant cinq ans à compter de cette même date.
Lorsque le lotissement a fait l’objet d’un permis d’aménager, le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme nouvelles intervenues depuis la date de délivrance du permis d’aménager, et ce pendant cinq ans à compter de l’achèvement des travaux constaté dans les conditions prévues par décret en Conseil d’Etat.”
Dans une décision rendue le 13 juin dernier, le Conseil d’Etat vient d’apporter une précision importante à l’application de ce mécanisme.
En effet, dans cette décision, il est jugé que la cristallisation de la règle d’urbanisme ne peut bénéficier au propriétaire d’une unité foncière qui a divisé celle-ci en vue de construire sur l’un des lots (c’est le principe du lotissement) et obtenu l’autorisation idoine si, à la date du permis de construire sollicité, la cession qui aurait dû accompagner la division n’a pas été effectuée :
“Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société La Garriguette a adressé au maire de Bormes-les-Mimosas une déclaration préalable de division de la parcelle cadastrée section AD n° 133 en deux lots, en vue de construire sur l’un d’eux, l’autre supportant une villa. Par un arrêté du 28 avril 2015, le maire de cette commune ne s’est pas opposé à cette déclaration préalable. Toutefois, ainsi que l’a relevé la cour, la société La Garriguette, qui entendait conserver la propriété de l’ensemble de la parcelle dont elle avait préalablement déclaré la division et sollicitait le permis litigieux pour son propre compte, en vue de la location saisonnière de la construction projetée, n’avait, à la date du permis de construire, pas procédé à la cession dont aurait résulté la division. Dès lors, en l’absence de tout transfert de propriété ou de jouissance, elle ne pouvait se prévaloir, à l’occasion de cette demande de permis de construire, des droits attachés, en vertu de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme cité ci-dessus, au lotissement autorisé, dont le projet de construction ne pouvait relever. Par suite, en jugeant que la règle posée à l’article L. 442-14 s’appliquait à l’arrêté litigieux, pour en déduire que sa légalité devait être appréciée au regard des règles du plan local d’urbanisme approuvé le 28 mars 2011 et non de celles du plan approuvé le 17 décembre 2015, la cour a commis une erreur de droit”
Pour que la règle d’urbanisme soit figée pendant cinq ans, il faut donc, non seulement que l’opération de lotissement ait été autorisée, mais encore qu’elle ait été réalisée, ce qui implique donc la vente d’un des lots issus de la division.
Ref. : CE, 13 juin 2022, M. et Mme B., req., n° 452457. Pour lire l’arrêt, cliquer ici