Qui sème la frime en ligne récoltera le contrôle fiscal ou douanier… Avec la bénédiction du Palais Royal

Le Conseil d’Etat confirme qu’il valide de larges et assez peu différenciées collectes de données individuelles, via des ratios, sur la base de ce qui est laissé en ligne par les possibles fraudeurs eux-mêmes…

Il a en effet refusé de censurer un traitement automatisé des recherches, des algorithmes, des indices laissés en ligne par les utilisateurs de possibles indicateurs de fraudes fiscales ou douanières…

Il va falloir sérieusement, pour les fraudeurs, arrêter de frimer avec leurs propriétés, yachts et autres Bugatti… Les pauvres. 


 

En l’espèce, étaient en cause les disposition du décret n° 2021-148 du 11 février 2021 portant modalités de mise en oeuvre par la direction générale des finances publiques et la direction générale des douanes et droits indirects de traitements informatisés et automatisés permettant la collecte et l’exploitation de données rendues publiques sur les sites internet des opérateurs de plateforme en ligne.

En vertu de l’article 4 de la loi du 6 janvier 1978, les données à caractère personnel doivent être collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes, et doivent être adéquates, pertinentes et, au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées, limitées à ce qui est nécessaire ou, pour les traitements relevant du titre III de cette loi, non excessives.

Il en résulte pour le juge un contrôle « des finalités légitimes » de cette collecte et de ce traitement de données… puis un contrôle de proportionnalité de ceux-ci au regard de ces finalités  (« de manière adéquate et proportionnée au regard de ces finalités »).

Or, en l’espèce, le Conseil d’Etat a validé ce décret à cette aune là… ce qui était tout de même assez prévisible car le décret avait été calqué sur la loi qui elle-même avait été amputée de ce qui était inconstitutionnel aux dires de l’autre aile du Palais Royal.

De plus, il s’agit de données mises en ligne par les utilisateurs eux-mêmes au fil des pans de leur vie privée qu’ils décident de rendre publique, ce qui change un peu la donne…

Source : C. const., décision n° 2019-796 DC du 27 décembre 2019

Les collectes excessives avaient donc déjà été élaguées par le Conseil constitutionnel.

Quant au traitement et aux catégories de données collectées en phase d’exploitation, le Conseil d’Etat a décidé de l’interpréter de manière limitée, ce qui pour partie est incontestable et pour partie contraindra l’administration dans son application concrète, loin des formulations de l’association requérante, connue pour sa faible appétence en matière de nuances.

Source : Conseil d’État, 22 juillet 2022, n° 451653