Par un arrêt M. A… c/ ministre de l’intérieur et des outre-mer en date du 19 juillet 2022 (req. n° 21NT00286), la cour administrative d’appel de Nantes a considéré que le supérieur hiérarchique direct d’un fonctionnaire de l’État ne peut légalement formuler de nouvelles observations après la signature du compte rendu d’entretien professionnel annuel.
M. A…, ingénieur en chef des ponts, des eaux et des forêts, a été détaché à compter du 15 septembre 2014 sur le poste de directeur départemental des territoires de …. Le 20 avril 2016, M. A… a été reçu par la préfète de … pour son entretien professionnel au titre de l’année 2015.
En désaccord avec les observations portées par son supérieur hiérarchique sur sa manière de servir et sa valeur professionnelle, cet agent a, le 13 mai 2016, saisi le Secrétaire Général du gouvernement d’un recours administratif en vue d’obtenir la révision de son évaluation. En l’absence de réponse, il a, le 9 août 2016, saisi la commission administrative paritaire (CAP) compétente qui a émis un avis favorable à sa demande de révision.
Or, à la suite de cet avis, il a été a procédé à la modification du compte rendu de son évaluation professionnelle pour l’année 2015 au regard des propositions formulées par la CAP. M. A… a, le 12 avril 2017, été reçu par la préfète de … pour son entretien professionnel au titre de l’année 2016. En raison d’un désaccord avec le contenu du compte rendu de cet entretien, M. A… a, le 31 mai 2017, après avoir formulé des observations complémentaires le 27 avril 2017, formé un nouveau recours hiérarchique qui a été implicitement rejeté.
M. A… a, le 25 juillet 2017, saisi le tribunal administratif de Caen d’une demande tendant, d’une part, à l’annulation du compte rendu de l’entretien professionnel au titre de son évaluation professionnelle pour l’année 2016. Cependant, par un jugement du 4 novembre 2020, le tribunal a rejeté sa demande. M. A… a alors interjeter appel.
Devant la cour administrative d’appel, M. A… soutenait que le compte rendu d’entretien professionnel réalisé le 12 avril 2017 a été établi au terme d’une procédure irrégulière dès lors que son supérieur hiérarchique direct, la préfète de …, a formulé des observations après celles qu’il avait lui-même présentées sur les appréciations initiales portées par la préfète et ce, en méconnaissance des dispositions de l’article 4 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l’appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires d’État.
La cour va lui donner raison en considérant qu’il résulte de l’article 4 de ce décret du 28 juillet 2010 « que le compte-rendu d’entretien professionnel doit être établi et signé par le supérieur hiérarchique direct de l’agent évalué, puis ce dernier dispose alors de la faculté de formuler des observations, avant que le compte rendu soit transmis pour visa à l’autorité hiérarchique, qui est alors la seule à être autorisée à formuler, si elle l’estime utile, ses propres observations. Les dispositions de l’article 4 du décret du 28 juillet 2010, qui précisent ainsi les modalités de l’appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l’État, ne prévoient pas la présentation d’observations par le supérieur hiérarchique direct de l’agent après la signature du compte rendu de l’entretien professionnel. »
Or, en l’espèce constate la cour, « la préfète de … a procédé le 12 avril 2017 à l’entretien de M. A… au titre de l’année 2016 et que, dans les suites de cet entretien, elle a établi, en sa qualité de supérieur hiérarchique direct de cet agent, un compte-rendu remis à celui-ci. M. A…, qui a signé ce document le 27 avril 2017, a alors formulé plusieurs observations dans la case H prévue à cette effet, en renvoyant à un document écrit de onze pages auquel était jointes des annexes. Si ce compte-rendu d’entretien a été signé par la préfète de … le 28 avril 2017, cette dernière y a également fait figurer des remarques “suites aux commentaires de M. A…” et en y joignant quatre pièces. C’est dans cet état que le compte rendu d’entretien contesté a été notifié à M. A… le 30 mai 2017 et, qu’il a, en conséquence, été versé à son dossier. En procédant ainsi, la préfète de … a entaché la procédure d’évaluation d’un vice de procédure. Cette irrégularité a privé M. A… d’une garantie dès lors qu’elle ne lui a pas permis, avant le versement de l’entretien d’évaluation à son dossier, d’être informé du contenu des dernières remarques de la préfète et d’y répondre par des observations s’il le jugeait utile ».
Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :
https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CAA/decision/2022-07-19/21NT00286