Ô temps, suspends ton vol ! Et vous, contentieux post-mortem, ne suspendez pas votre cours !

Ô temps, suspends ton vol ! et vous, heures propices, suspendez votre cours ! Laissez-nous savourer les rapides délices des plus beaux de nos jours !
Alphonse de Lamartine

 

Les juges du Palais Royal n’aiment pas Lamartine. Car s’il est une cause de suspension du temps et du cours des heures propices, c’est bien la mort.

C’est d’ailleurs l’avis aussi du Code de justice administrative pour qui, en son article R. 634-1, dans :

« […] les affaires qui ne sont pas en état d’être jugées, la procédure est suspendue par la notification du décès de l’une des parties ou par le seul fait du décès, de la démission, de l’interdiction ou de la destitution de son avocat. Cette suspension dure jusqu’à la mise en demeure pour reprendre l’instance ou constituer avocat. »

Et pourtant, pour le Conseil d’Etat, même la camarde n’interdit pas qu’au contentieux continue le canardage. Mais à la condition qu’il y ait plusieurs requérants et que le décédé ait pu, en droit, tirer au contentieux avant de passer l’arme à gauche.

Le régime où le décès d’un des requérants justifie une suspension de procédure (art. R. 634-1 du CJA) ne s’applique pas, en effet, selon la Haute Assemblée dès lors que l’affaire est en tout état de cause en l’état d’être jugée à la date de notification du décès de l’une des parties…

Ce point était déjà en partie tranché par Conseil d’État, 10 octobre 2018, 400807, aux tables du rec., pp. 837-841. Voir notre article :

Mais ce qui est nouveau est que le Conseil d’Etat pose que l’affaire sera en tout état cause considérée comme en l’état d’être jugée si la notification du décès de l’un des requérants aux juges du fond intervient postérieurement au dépôt du mémoire en défense de ladite partie.

Source :

Conseil d’État, 7 novembre 2022, n° 455631, aux tables du recueil Lebon